Les internes se préparent à la grève contre le stage "prioritaire" en désert

25/06/2019 Par Yvan Pandelé
Furieux de l'amendement qui inscrit dans la loi la nécessité pour les internes de médecine générale d'effectuer leur stage ambulatoire en priorité dans les zones sous-denses, l'Intersyndicale nationale des internes (Isni) se prépare à une mouvement de grève national. Une menace très sérieuse, en ces temps d'embrasement facile.

"L'assemblé générale a duré plus de cinq heures et a été particulièrement houleuse", confie Antoine Reydellet, président de l'Isni. Le syndicat des internes se met sur le pied de guerre en réponse à un amendement, introduit en commission mixte paritaire, qui inscrit dans la loi que le stage de six mois en autonomie supervisée (Saspas) du DES de médecine générale sera obligatoire en dernière année et devra surtout être réalisé "en priorité" en zone sous-dense. La mesure est le fruit d'un compromis : lors de l'examen du projet de loi de santé, le Sénat avait introduit, contre l'avis du gouvernement, l'obligation pour les internes de médecine générale de réaliser leur dernière année de DES dans un désert médical. En commission mixte paritaire, les représentants des députés avaient réussi à vider peu ou prou la mesure controversée de son sens, en la remplaçant par une mesure non contraignante.

Las, les internes estiment qu'une esquisse de risque de contrainte est déjà une contrainte. "Il y a un risque très clair d'obligation pour certaines spécialités d'aller dans les zones sous-denses, alors même qu'il n'y a pas forcément les MSU [maîtres de stage universitaires, NDLR] nécessaire", explique Antoine Reydellet. "C'est un pied dans le jardin de la coercition : si on accepte ça maintenant, on ne sait pas ce qu'on va devoir accepter dans le PLFSS 2022 d'ici trois quatre-mois."

Une disposition en particulier risque de mettre le feu aux poudres : elle prévoit que... l'obligation de réaliser un Saspas "en priorité" en zone sous-dense puisse être étendue à d'autres spécialités "à exercice majoritairement ambulatoire", par simple décret. D'où la crainte pour l'Isni de voir certaines disciplines en tension (ophtalmologie, médecine d'urgence, dermatologie, pédiatrie…) basculer une par une dans le champ de la loi, sans pouvoir réagir par un mouvement unitaire. L'été sera chaud Le moment est critique, puisque le texte final du projet de loi de santé doit être soumis le 10 juillet à l'Assemblée pour un vote final (puis le 23 juillet au Sénat). En cas d'échec du vote, le gouvernement sera contraint de relancer la navette parlementaire, le dernier mot revenant in fine à la chambre basse, à majorité LREM. Mais le coût politique serait exorbitant pour l'exécutif.

On saura demain mercredi 26 juin si l'Isni se lance à plein dans un mouvement de grève national, mais certaines villes ont d'ores et déjà pris leurs dispositions. Une arme de destruction massive, en pleine canicule et alors que les mobilisations se multiplient, notamment aux urgences et chez les pompiers.

Limiter la durée de remplacement peut-il favoriser l'installation des médecins ?

François Pl

François Pl

Non

Toute "tracasserie administrative" ajoutée ne fera que dissuader de s'installer dans les zones peu desservies (et moins rentables)... Lire plus

0 commentaire
3 débatteurs en ligne3 en ligne





 
Vignette
Vignette

La sélection de la rédaction

Histoire
Un médecin dans les entrailles de Paris : l'étude inédite de Philippe Charlier dans les Catacombes
12/07/2024
1
Enquête
Abandon des études de médecine : enquête sur un grand "gâchis"
05/09/2024
15
"Dans cette vallée, le médicobus ne remplace pas le médecin traitant" mais assure "la continuité des soins"
17/09/2024
2
La Revue du Praticien
Addictologie
Effets de l’alcool sur la santé : le vrai du faux !
20/06/2024
2
Podcast Vie de famille
Le "pas de côté" d'un éminent cardiologue pour comprendre le cheminement de son fils apprenti chamane
17/05/2024
0
Rémunération
"Les pouvoirs publics n'ont plus le choix" : les centres de santé inquiets de l'avenir de leur modèle...
07/05/2024
5