Quand un chef de service compare les internes grévistes… aux ouvriers de raffinerie

02/11/2022 Par Marion Jort
Internat Hôpital
Constatant l’absence des internes de son service lundi 31 octobre, en grève pour protester contre l’allongement du DES de médecine générale, un chef de service des urgences s’est fendu d’un long mail à leur égard leur reprochant leur absence et leur attitude “à se foutre de tout”. Il n’a pas hésité à les comparer à des "ouvriers de raffinerie". 

  La consigne donnée par les syndicats d’internes aux carabins pour protester contre le passage en force du Gouvernement sur l’allongement de la formation des futurs généralistes dans le PLFSS 2023, jeudi, était claire: “Ne retournez plus en stage jusqu’à la fin du semestre !”. Partout en France, les étudiants en médecine étaient donc appelés à se mettre en grève jusqu’à ce mercredi 2 novembre, date du nouveau semestre.  Aux urgences de ce CHU, les internes en stage ont suivi le mouvement… et provoqué la colère de leur chef de service, qui a découvert leur absence lundi 31 octobre au matin, alors qu’il était en congé. Visiblement furieux, le PU-PH leur a adressé un mail cinglant (dont Egora a obtenu copie), ainsi qu'à tous les chefs de service du CHU, à la direction générale, au bureau de la CME et aux médecins des urgences. "Cher/e/s internes du service des urgences, je découvre avec STUPEFACTION que certains d’entre vous se sont mis en grève durant le week-end, et sont donc absents ce matin”, débute-t-il, avant de préciser que les “séniors urgentistes sont donc seuls et en difficulté”. Bien que conscient du droit de grève des internes, il les interpelle directement :  “Qu’avez-vous pensé ?
-Que votre absence n’a aucune incidence sur le service, les seniors, les paramédicaux et les patients ?
-Que le personnel de la DAM, qui est également en effectif minimal ce lundi, allait revenir durant le week-end pour venir faire vos réquisitions ?
-Que des médecins séniors allaient annuler en catastrophe leur lundi (jour de vacances déclaré) pour venir renforcer à votre place ?
-Que votre chef de service (qui est également en vacances durant ce week-end prolongé) allait essayer de résoudre le problème : OUI, GAGNE, je suis dans mon bureau ce matin.”  Il leur reproche par ailleurs une grève préparée au dernier moment, qui ne laisse pas la possibilité aux chefs de service de s’organiser en conséquence. “A qui causez-vous des soucis ?, poursuit-il. Au Gouvernement, peut-être. Aux séniors du service certainement et ils sont graves, vu l’état du service ce matin. Aux patients, évidemment et ils sont non seulement graves, mais incompréhensibles à mes yeux pour des personnes qui ont choisi le métier de médecin…”.  Pour ce professeur, les internes auraient dû avoir “deux sous d’intelligence et de conscience” et se présenter en stage le lundi matin, pour leur laisser le temps de les réquisitionner. 

“Impossible de compter sur vous ! Vous pouvez tout à fait vous comporter comme des ouvriers de raffinerie et vous foutre de tout, à commencer par les patients et les équipes du service des urgences. Ce faisant, vous nous poussez à avoir avec vous des relations ‘patron’ à ‘ouvrier’ dans le sens le plus péjoratif du terme. Ce ne sont pas celles que j’envisageais avec de futurs collègues médecins”, assène-t-il.  Faisant part de toute sa “déception”, le PU-PH a donc demandé aux internes sur le planning du 31 octobre de se présenter aux urgences pour “venir épauler les séniors” et “bien sûr à ceux qui sont de garde de les assumer”.

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Michel Lemariey-Barraud

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