Congé maternité : "Il y a une véritable iniquité entre les médecins remplaçantes et les installées"
Lors d'un congé maternité, les médecins remplaçantes bénéficient des mêmes aides de l'Assurance maladie que leurs consœurs libérales installées. Elles sont toutefois exclues de l'avantage supplémentaire maternité, qui s'élève à plusieurs milliers d'euros. Une "iniquité" qui bouscule certains projets de grossesse, et à laquelle souhaite mettre fin le Dr Raphaël Dachicourt, président du Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR).
"Les aides lors du congé maternité permettent de compenser une partie de la perte de chiffre d'affaires, mais il reste une très grande différence entre celles accordées aux installées et aux remplaçantes." La Dre Camille Bordères sait de quoi elle parle. Remplaçante en Occitanie, la généraliste est en congé maternité depuis début mai. "C'est mon deuxième, puisque j'en ai aussi pris un au printemps 2022", glisse la praticienne de 34 ans. Comme les médecins libérales conventionnées, elle bénéficie – en plus d'une aide de sa prévoyance - des indemnités journalières et d'une allocation forfaitaire de repos maternel de l'Assurance maladie durant son arrêt. Les premières sont versées pour chaque jour du congé maternité, à condition d'une cessation d'activité d'au minimum huit semaines dont six après l'accouchement ; tandis que la deuxième, de 3 864 euros, est versée pour moitié au début du congé, puis à la fin de la période obligatoire de huit semaines.
Exclues de l'avantage supplémentaire maternité
Mais contrairement aux installées, les remplaçantes sont exclues de l'avantage supplémentaire maternité, qui s'applique aussi aux congés paternité ou adoption. N'étant pas conventionnés, "on [les remplaçantes, NDLR] voit cette aide financière sauter", regrette Camille Bordères. Ce dispositif, mis en place par l'avenant 3 de la convention médicale, ne bénéfice qu'aux praticiennes et praticiens libéraux installés. Modulé selon la nature du congé (maternité, paternité ou adoption), le secteur et les conditions d'exercice du médecin, il est censé pallier la baisse de revenu et couvrir les charges du cabinet.
Une "justification" qui ne convient pas au Dr Raphaël Dachicourt, président du Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR). Alors que les 12e Rencontres nationales du syndicat, dont Egora est partenaire, aborderont notamment les 30 et 31 mai la question de la parentalité dans la carrière médicale, il voit dans cette exclusion des remplaçants (femmes et hommes) "une véritable iniquité" de traitement qui renforce la précarisation de leur statut. "Ces derniers ont, eux aussi, des cotisations sociales qui continuent à être appelées lors de leur congé maternité ou paternité", estime Raphaël Dachicourt. "Quand en milieu du congé maternité, la Carmf [Caisse autonome de retraite des médecins de France, NDLR] nous réclame 4 000 euros à la fin du semestre, on doit pouvoir les anticiper", confirme Camille Bordères.
Lors de son congé maternité en 2021-2022, la Dre Alizée Delarre assure avoir vu son chiffre d'affaires divisé par trois. Selon la généraliste de 32 ans, qui remplace dans le nord de la France, l'exclusion de l'avantage supplémentaire maternité, paternité et adoption n'est pas négligeable. "C'est une différence énorme, c'est de l'ordre de plusieurs milliers d'euros" sur l'ensemble d'un congé, explique la praticienne, pointant du doigt la "protection sociale désastreuse" à laquelle font face les remplaçantes durant leur grossesse. Cette aide peut, en effet, s'élever jusqu'à 3 100 euros mensuels brut pendant trois mois.
"On demande une certaine équité"
Face à la crainte de pertes financières, certaines vivent moins sereinement l'arrivée de leur enfant. D'autant que cette instabilité oblige à une plus grande anticipation. "Ma première grossesse, je l'ai programmée pour reprendre les remplacements en été. Si elle n'était pas arrivée au bon moment, j'aurais décalé ce projet car l'été est la grosse période où je peux avoir des rentrées financières et essayer de compenser les mois d'arrêt", explique Camille Bordères.
Toutefois, si les remplaçantes souhaitent pouvoir bénéficier de l'avantage supplémentaire, "on ne demande pas les mêmes montants que ceux des installées, précise le Raphaël Dachicourt. Mais on demande une certaine équité ou de pouvoir adapter [cette aide] à leur situation." Une possibilité conditionnée au conventionnement des remplaçants.
Largement demandée par ReAGJIR, cette intégration à la convention médicale "est importante", insiste Camille Bordères, également trésorière d'une antenne locale du syndicat. Au-delà des bonus financiers, "on veut pouvoir travailler ensemble et faire ce qu'il y a de mieux pour les patients, tout en assurant une certaine sécurité pour tout le personnel médical", conclut-elle.
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