Infirmière coordinatrice au sein d’une maison de retraite, Mme W... est licenciée pour faute grave, à savoir une violation des obligations résultant de son contrat de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien de cette salariée dans cet établissement. Il lui était reproché des manquements graves portant sur le suivi des résidents, l’enregistrement et la traçabilité de certaines informations. A l’origine de ce licenciement, le décès d’une résidente intervenu à la suite d’une occlusion intestinale causée par un fécalome dû à une constipation avérée. L’employeur de cette infirmière coordinatrice a voulu consulter le suivi des selles de cette résidente mais n’a pu retrouver les fiches relatives à l’intéressée. Or, cette infirmière aurait dû veiller à ce que ses équipes assurent un suivi rigoureux de cette patiente. Pour sa défense, elle arguait d’un dysfonctionnement informatique, son ordinateur de bureau ne fonctionnant pas.
A l’occasion de ses investigations, son employeur a pu constater que les fiches de suivi n’étaient pas correctement renseignées : le nom de l’ensemble des résidents, notamment pour le suivi des selles, n’était pas précisé de sorte que certains patients ne faisaient pas l’objet de contrôles. Plusieurs résidentes, dépendantes et incontinentes, ne figuraient pas dans le suivi informatique planifié, alors que le défaut d’alimentation de ces informations ne pouvait être imputable à un problème informatique puisque les informations n’ont pas été enregistrées à une période où cette salariée ne rencontrait pas encore de problème sur son ordinateur. Comme devait le rappeler son employeur, mais aussi la Cour de Cassation, en sa qualité de coordinatrice, elle avait pour mission de veiller à ce que l’ensemble des informations relatives au suivi des résidents soit enregistré.
D’autres griefs vont être invoqués par l’employeur : plans de soins des résidents non tenus à jour, absence de contrôle des pesées de plusieurs résidents en vue de dépister des problèmes de dénutrition, avoir laissé les aides-soignantes installer des barrières de lit à certains résidents, en dépit de toute prescription médicale, entravant leur liberté d’aller et venir…. Autant d’éléments justifiant, pour la Cour de Cassation, le licenciement pour faute grave de cette infirmière alors que les manquements relevés par cette procédure rendaient impossible son maintien dans cette maison de retraite. Pour sa défense, cette infirmière considérait que son licenciement était fondé sur une violation, par son employeur, du principe fondamental du secret médical, et qu’il devait ainsi être dépourvu de cause réelle et sérieuse en ce qu’il reposait sur les dossiers médicaux de plusieurs résidents.
Mais pour la Cour de Cassation, "il résulte des articles L.1110-4 et R.4127-4 du Code de la santé publique que le secret professionnel est institué dans l’intérêt des patients. Il s’agit d’un droit propre au patient instauré dans le but de protéger sa vie privée et le secret des informations le concernant". Et la Cour d’en conclure "qu’un salarié professionnel de santé, participant à la transmission de données couvertes par le secret, ne peut donc se prévaloir, à l’égard de son employeur, d’une violation du secret médical pour contester le licenciement fondé sur des manquements à ses obligations ayant des conséquences sur la santé des patients".
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