« Près de 4 millions de personnes en France qui vivent avec ou après un cancer, 382 000 nouveaux patients par an… Chacun dans son premier cercle est ainsi concerné », observe le Pr Norbert Ifrah, président de l’Institut National du Cancer (INCa). Et chacun peut avoir une opinion, aussi surprenante qu’elle soit au fil des enquêtes… En témoigne le 4ème Baromètre cancer, publié par l’INCa, en partenariat avec Santé publique France(SPF), qui analyse, tous les cinq ans, les comportements de prévention de la population française de 15 à 85 ans - dont on sait qu’en les modifiant modestement, au moins 40 % des cancers seraient évitables - . Les données recueillies pour cette 4ème édition l’ont été en 2021. Premier enseignement du Baromètre, les Français se sentent toujours vulnérables vis-à-vis du cancer (2/3 pensent courir un risque). Par ailleurs, les facteurs non avérés de cancer (psychologiques par exemple) sont perçus en hausse entre les deux enquêtes. A l’inverse, le lien entre alcool (même à faible dose) et cancer l’est moins… Or l’alcool est responsable de 41 000 décès par an, dont 16 000 par cancer. Seuils de dangerosité estimés trop élevés
Pour ce qui est du tabac, premier facteur de risque de cancer (70 000 nouveaux cas et 40 000 décès par an, 17 localisations de cancer), son seuil de dangerosité est perçu pour des “doses“ nettement plus élevées que sa propre consommation : 9 cigarettes par jour, et plus de 13 ans de tabagisme. Un Français sur cinq estimant même que le risque est présent seulement au-delà de 20 cigarettes par jour. Alors qu’une exposition prolongée est en soi plus délétère que le nombre de cigarettes. Certains estiment que le sport “nettoie“ les poumons, une sorte de mise à distance du risque et du caractère addictogène du tabac pour rationaliser...
Les personnes moins diplômées ont moins conscience de l’échelle des risques. Ainsi, l’alimentation vient pour eux en deuxième position sur la liste des facteurs de risque de cancer évitable (5,4 %), avant l’alcool (8 %). Si l’excès de charcuterie ou de viande rouge est bien identifié comme cancérigène, les aliments protecteurs restent peu connus. En ce qui concerne le dépistage, les marges de progression sont significatives, les hauts revenus (plus de 1 800 euros par mois) ayant davantage tendance à être à jour de leurs dépistages, des cancers du col et colorectal notamment. Enfin les idées fausses sont nombreuses chez les personnes non diplômées et dont les revenus sont bas (moins de 1 100 €/mois), comme celle-ci : les cancers sont héréditaires… Pourquoi alors se protéger si le risque est déjà là, déterminé génétiquement. L’alcool aussi est sujet d’“infaux“, il ne serait dangereux que si l’on boit longtemps et beaucoup. La cigarette électronique souvent considérée comme plus nocive Le Baromètre, reflet de l’évolution des pratiques, inclut pour cette 4ème édition le vapotage. Un tiers des Français ont essayé la cigarette électronique, plutôt des hommes, jeunes, urbains, à plus de 80 % des fumeurs. Au moins 10 % toutefois s’y sont mis alors qu’ils n’avaient jamais fumé… 7,5 % l’utilisent régulièrement, 48 % d’entre eux pour arrêter de fumer et 16,7 % en ont un usage combiné. Curieusement (la littérature scientifique étant en faveur d’une moindre nocivité du vapotage versus la cigarette “traditionnelle“), plus d’un Français sur deux la considèrent comme aussi ou plus nocive que la cigarette. Ils sont très majoritairement convaincus que la nicotine qu’elle contient est cancérigène… Des idées reçues qui affectent plus volontiers les plus jeunes, moins diplômés de surcroît. Pour lutter contre le tabagisme, ennemi public numéro un, la dénormalisation, à l’instar de ce que vivent les Britanniques ou les Canadiens par exemple, où l’environnement devient progressivement défavorable à la cigarette et aux fumeurs, où chacun s’acclimate à un environnement sans tabac, paraît une piste plus sûre.
Appel aux professionnels de santé pour systématiser les informations
Les deux établissements, Institut National du Cancer (INCa) et Santé Publique France (SPF), souhaitent vivement que les professionnels de santé délivrent plus systématiquement des messages de prévention. L’information bénéficie alors d’un capital confiance élevé et les consignes données facilitent les changements de comportement. L’INCa et SPF plaident pour l’élaboration d’outils à intégrer dans une consultation (bornée dans le temps) qui seraient des amorces de dialogue. Pour engager la conversation sur les sujets de prévention, les consultations dédiées préconisées à l’âge de 20-25, 40-45 et 60-65 ans, annoncées à l’automne 2022, pourraient être d’excellents points d’entrée.
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