La dégradation de la santé mentale s’accentue chez les jeunes salariés

08/07/2022 Par Marielle Ammouche
Psychiatrie

Les jeunes de moins de 30 ans, mais aussi les femmes, les télétravailleurs et les manageurs, font part d’un été de santé psychologique altéré, plus important que chez les autres salariés.   La santé mentale des travailleurs, loin de s’améliorer, semble se dégrader encore 2 ans et demi après le début de la pandémie liée au Covid. Les plus jeunes, les manageurs et les télétravailleurs sont particulièrement impactés, si l’on en croit le baromètre de la santé psychologique des salariés français, réalisé par OpinionWay. Plusieurs facteurs s’ajoutent à la crise du Covid pour peser sur le mental des travailleurs, au premier rang desquels, la guerre en Ukraine et les difficultés liés au pouvoir d’achat.   Ce baromètre a été réalisé sur un panel de plus de 2000 salariés, à l’initiative du cabinet Empreinte Humaine, un cabinet de conseil spécialisé dans la qualité de vie au travail et les risques psycho-sociaux. Il souligne l’importance des salariés qui considèrent que leur santé mentale est altérée. Globalement 41% des salariés se déclarent en détresse psychologique, dont 14% à un niveau élevé. Les populations les plus à risque demeurent les jeunes avec 59% des moins de 29 ans (+5 points par rapport à mars 2022) (...) et les managers à 43% (+10), indique cette étude, dont c’est la 10ème édition. « Les récentes publications sur l’absentéisme élevé des jeunes et des managers lié aux risques psychosociaux rejoignent nos indicateurs. Ce sont les populations les plus exposées aujourd’hui dans l’entreprise », précisent les auteurs de l’étude dans leur infographie. Les femmes, aussi, sont particulièrement touchées avec 46% se déclarant en situation de détresse psychologique, même si cette proportion est en légère diminution de 1,5 point par rapport à l’enquête précédente qui datait de mars 2022. En outre, 45% des télétravailleurs sont en situation de détresse psychologique (+5). Les taux de burn out restent aussi à des niveaux très inquiétants : 34% (et même 13% de burn out sévère) pour l’ensemble des salariés. « Depuis deux ans et demi, nous atteignons des niveaux de burn-out sévères qui sont trois fois plus importants comparativement à l'avant Covid-19 », s'alarment Christophe Nguyen et Jean-Pierre Brun, les dirigeants du cabinet Empreinte Humaine. « Les arrêts maladies pour motifs psychologiques risquent de continuer à augmenter dans les prochains mois », ajoutent-ils. Outre le Covid, la guerre en Ukraine, mais aussi les contraintes économiques et les difficultés de pouvoir d'achat sont devenues un facteur de risque pour la santé mentale des salariés. En particulier, 22% des salariés interrogés craignent de tomber dans la pauvreté. Et à ces difficultés s’ajoute un climat de travail compliqué depuis la crise sanitaire. Ainsi, 43% des salariés considèrent que leurs collègues sont plus individualistes qu’avant, 55% que les clients/ patients/ usagers sont plus agressifs, et 39% qu’on leur donne des objectifs sans donner le sens et l’utilité. Au final, les données de cette étude montrent que les salariés sont particulièrement sensibles aux conditions de travail, mais ils restent cependant d’accord, pour 8 sur 10, sur le fait qu’avoir un travail est bon pour la santé mentale.   Près d’un jeune salarié sur quatre Une autre étude constate aussi cette fragilité chez les jeunes salariés. Mené par le groupe de protection sociale Malakoff Humanis, cet autre baromètre, réalisé annuellement depuis plus de 10 ans, et complété par des études mensuelles auprès de 2 000 salariés du secteur privé, rapporte que les jeunes salariés font part d’une dégradation de leur santé mentale plus importante que les autres. Ainsi, 23% des moins de 30 ans jugent négativement leur santé mentale, une proportion bien au-dessus de celle de l’ensemble des salariés (16%). « 48% d’entre eux déclarent mal dormir (vs 32% de l’ensemble des salariés), 42% se disent stressés (vs 28% de l’ensemble des salariés), et 34% sont émotionnellement épuisés (vs 22% de l’ensemble des salariés), voire à bout de force (29% vs 19%) » précise Malakoff Humanis dans un communiqué. Pour une large proportion (44%), cette dégradation est liée au seul contexte professionnel : intensité et temps de travail (pour 67% d’entre eux), rapports sociaux au travail dégradés (47%). Les raisons personnelles comptent aussi (pour 28%) ainsi que la situation financière (56%) et des difficultés psychologiques personnelles (44%).   Plus d’arrêts maladie L’impact sur la vie professionnelle est majeur. Ainsi, 43% des salariés qui jugent leur santé mentale médiocre ont été arrêtés en mars 2022 (vs 18% pour l’ensemble des salariés). Et ce chiffre atteint 51% chez les moins de 30 ans. Les jeunes subissent aussi plus d’arrêts maladie que les autres (36% en mars 2022) contre 18% de l’ensemble des salariés. Et la tendance est à l’augmentation car, en mars 2021, l’enquête n’avait retrouvé que 21% d’arrêt maladie pour les moins de 30 ans. Les managers sont aussi plus impactés (23% en mars 2022 contre 17% un an plus tôt). Et si le Covid est à l’origine de plus de la moitié des arrêts (56% vs 45% en mars 2021), les troubles psychosociaux (dépression, anxiété, stress, épuisement professionnel…) arrivent en troisième position (14%), après les accidents ou traumatismes (29%), mais avant les troubles musculosquelettiques (13%). Chez les moins de 30 ans, 16% des arrêts maladie hors Covid sont dus à des motifs psychologiques.   Importance du renoncement aux soins Sur le plan physique, 18% des salariés de moins de 30 ans jugent leur santé mauvaise (vs 14% pour l’ensemble des salariés). Enfin, l’étude souligne l’importance du renoncement ou du report de soins, qui concerne encore près d’un quart des salariés au premier trimestre 2022, et même 37% chez les moins de 30 ans et 33% chez les managers. Parmi les raisons évoquées pour expliquer cette situation : le manque de temps (35%), les difficultés à obtenir un rendez-vous (29%) et les raisons financières (23%).   

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