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Troubles psychiatriques : alerte sur les risques liés à la rupture en quétiapine
De fortes tensions d’approvisionnement concernent actuellement les médicaments à base de quétiapine (Xeroquel LP et génériques), indiquée dans la prise en charge de certaines dépressions, des troubles bipolaires et de la schizophrénie. Tous les dosages sont concernés : 50 mg LP, 300 mg LP et 400 mg LP.
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Ceci est dû à "un problème de production rencontré par le fabricant Pharmathen International", a précisé jeudi 30 janvier l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
Dans un contexte de fréquentes tensions d’approvisionnement, cette situation pose des problèmes particuliers, souligne le Pr Antoine Pelissolo (chef de service au sein du GHU Henri-Mondor/Albert-Chenevier, Créteil) qui tire la sonnette d’alarme. En effet, "en psychiatrie, les médicaments sont rarement interchangeables car, même dans la même catégorie, ils ont chacun leurs propriétés pharmacologiques spécifiques. Pour un patient donné, les effets thérapeutiques ou les effets secondaires de deux médicaments proches sont souvent différents ; parfois l’un fonctionne très bien et l’autre pas du tout".
En outre, il existe assez peu de médicaments en psychiatrie pour chaque situation clinique ; et la quétiapine fait partie des traitements largement prescrits. Son manque crée donc "une situation inédite et vraiment très problématique", insiste le Pr Pelissolo. Avec à la clé, un risque de déstabilisation de pathologies "potentiellement graves, qui peuvent altérer fortement la qualité de vie et le « fonctionnement » de la personne dans sa vie quotidienne", voire un risque suicidaire. Tout changement thérapeutique dans ces pathologies ne doit jamais être brutal, mais doit être anticipé très longtemps à l’avance.
Or actuellement "l’approvisionnement en quétiapine est complètement à l’arrêt dans tout l’hexagone, et les stocks dans les pharmacies sont partout épuisés ou en voie de l’être", affirme le psychiatre, qui considère qu’il y a "mise en danger réelle des patients". Il dénonce, par ailleurs, un manque d’information de la part des laboratoires sur ce sujet, alors que les autorités de santé ne sont pas en mesure de préciser une date de retour à la normal.
Arrêt des initiations de traitement
Dans l’attente, l’ANSM demande aux médecins de ne plus initier de traitements par quétiapine LP, sauf pour les patients présentant un épisode dépressif caractérisé dans le cadre d’un trouble bipolaire, et de prescrire des alternatives dès que cela est possible. Problème : les médicaments contenant de la rispéridone, de la palipéridone, de l’amisulpride et ceux à base de dérivés du valproate (divalproate de sodium et valpromide) font déjà l’objet eux aussi de tensions ; et ils ne doivent pas être prescrits en alternative. Les alternatives possibles sont donc : aripiprazole (per os) ou olanzapine (per os) ; sels de lithium LI, carbamazépine, olanzapine, aripiprazole (per os) ; carbamazépines, lamotrigine…, en fonction des différentes indications et de la situation du patient.
L’agence française du médicament a aussi demandé aux laboratoires d’identifier des alternatives : quétiapine à libération immédiate (LI, non commercialisés en France) ou à libération prolongée, préparations magistrales à libération immédiate. Et elle a fait appel au mécanisme européen de solidarité volontaire, qui fonctionne depuis 2023.
Le Pr Pelissolo en appelle aux autorités de santé : "Il est donc urgent que le ministère de la Santé réagisse, aussi bien pour trouver des solutions à ces problèmes de pénurie, en particulier pour les molécules essentielles en psychiatrie, que pour obliger les laboratoires à informer le public sur les ruptures et leurs durées prévisibles."
Références :
D’après un communiqué de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (30 janvier) et un communiqué d’Antoine Pélissolo (28 janvier)
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