ADA 2024 : ces études qui pourraient faire évoluer la prise en charge du diabète
Que cela concerne la rétinopathie, la néphropathie, ou la prévention du diabète, plusieurs études en vie réelle ont été présentées lors des 84èmes sessions scientifiques de l’American diabetes association (ADA), qui se sont tenues à Orlando du 21 au 24 juin 2024. Elles invitent à faire évoluer certaines prises en charge. Le point avec le Pr Jean-Pierre Riveline, diabétologue à l’hôpital Lariboisière (AP-HP).
Egora : Quel bilan tirez-vous de l’édition 2024 du congrès de l’ADA ?
Pr Jean-Pierre Riveline : Nous n’avons pas assisté à des études révolutionnaires en matière d’innovations thérapeutiques. Cependant, certaines études pourraient modifier nos pratiques. C’est notamment le cas concernant la prévention de la rétinopathie par le fénofibrate. Il y a quelques années, l’étude Field avait comparé cette molécule à une statine en prévention cardiovasculaire primaire et secondaire chez le sujet dyslipidémique : le fénofibrate s’était avéré moins efficace. Toutefois, un effet favorable sur l’évolution de la rétinopathie diabétique avait été observé, résultat inattendu qui méritait d’être confirmé. C’est maintenant la cas grâce à l’étude Lens qui a été présentée cette année, et qui a été simultanément publiée dans le Nejm. Son objectif principal était d’évaluer les effets du fénofibrate sur l’évolution de la rétinopathie diabétique dans une population de patients diabétiques de type 1 ou 2. Les participants de la cohorte avaient un profil comparable à ceux que nous suivons habituellement. Et les résultats montrent une diminution de la progression de la rétinopathie, de 27% à quatre ans.
Par ailleurs, dans un autre domaine, l’étude de phase 3 Surmount-OSA est aussi très importante puisqu’elle a montré comment, grâce à la réduction du poids corporel, le tirzépatide permet de réduire la sévérité du syndrome d’apnée du sommeil.
Que retenez-vous concernant les études dédiées au diabète de type 1 ?
L’étude multicentrique Attempt est intéressante : elle a cherché à évaluer si les effets néphroprotecteurs des inhibiteurs de SGLT2, observés dans le diabète de type 2, étaient aussi constatés dans une population de personnes vivant avec un diabète de type 1, particulièrement parmi des adolescents et jeunes adultes, une période de vie durant laquelle le déséquilibre glycémique est fréquent. Les résultats qui ont été présentés confirment que l’association d’une gliflozine améliore le contrôle de l’HbA1c, et limite l’évolution du déclin de la fonction rénale. Ces médicaments ne sont pas autorisés dans ces indications, mais de tels résultats permettent d’entrevoir des perspectives intéressantes dans la trajectoire au long cours de ces patients.
Par ailleurs, plusieurs sessions ont été dédiées à la prévention du diabète de type 1, qui ont notamment évoqué l’immunothérapie, avec le téplizumab, anticorps anti-CD3, qui pourrait retarder l’apparition du diabète de type 1 pendant une durée variable entre un et cinq ans (deux ans en moyenne) selon les patients. Ce traitement devrait être prochainement indiqué et proposé aux personnes qui ont des auto-anticorps marqueurs du diabète de type 1, mais n’ont pas encore développé la maladie. D’autres travaux ont cherché à trouver des paramètres de mesure continue du glucose pour détecter précocement le diabète de type 1 débutant chez les apparentés d’un patient déjà diagnostiqué. Des recommandations françaises sur la prévention du diabète de type 1 seront d’ailleurs prochainement publiées dans la revue Médecine des Maladies métaboliques, et font écho aux progrès réalisés ces dernières années dans ce domaine.
Dans le diabète de type 1, vous avez d’ailleurs présenté les données de suivi à 1 an des boucles fermées hybrides dans un registre en vie réelle. Que nous apprennent vos résultats ?
Dans cette étude, nous avons inclus les patients qui avaient initié un traitement par boucle fermée hybride dans l’un des 48 centres participants en 2022. Dans 70 à 80% des cas, l'instauration a été faite en ambulatoire. Le suivi se fait à trois, six et 12 mois et est souvent fait en ville ou par téléconsultation. Ce travail montre que les objectifs de glycémie et d’hémoglobine glyquée étaient en moyenne atteints, mais que le temps passé dans la plage cible de glycémie était hétérogène d’un patient à l’autre. Les plus jeunes, et ceux avec un équilibre glycémique à l’inclusion moins satisfaisant, avaient des résultats moins bons. Cela doit inciter à avoir une attention particulière pour ces patients, auprès de qui l’éducation et le suivi doivent être plus intensif. Des futurs algorithmes plus puissants et donc plus efficaces sont attendus. En pratique, ce registre national nommé OB2F (pour Observatoire de la boucle fermée en France) note que les équipes, notamment paramédicales, se sont fortement mobilisées lors de l’initiation et du suivi des patients.
Enfin, plusieurs résultats tirés du registre français SFDT1, qui rassemble environ 4000 patients suivis pendant 30 ans, ont été présentés : le premier concerne l’augmentation importante du risque cardiovasculaire à cinq et dix ans chez les sujets DT1 en situation d’obésité par rapport aux non-obèses. Nous avons aussi constaté que les hommes avec DT1 ont un risque cardiovasculaire supérieur à celui des femmes. Et enfin, nous avons rapporté l’importance de la détresse liée au diabète, y compris chez ceux qui sont sous boucle fermée. Ce qui doit nous inciter à adapter notre accompagnement et notre suivi.
Le Pr Jean Pierre Riveline déclare être consultant, orateur et/ou avoir des partenariats scientifiques avec Sanofi, MSD, Eli Lilly, Novo-Nordisk, AstraZeneca, Abbott, Dexcom, Alphadiab, Insulet, Air liquide, Medtronic, Medtrum, Boehringer-Ingelheim, et Abbott.
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