Arthrose : le mode de vie, au cœur de la prise en charge

27/06/2023 Par R.L.
Rhumatologie
[EULAR 2023] Surpoids, alimentation, manque de sommeil, inactivité physique… lors du congrès, plusieurs experts ont rappelé l’importance d’agir sur ces facteurs comportementaux, impliqués aussi bien dans la survenue que dans l’évolution de l’arthrose.
 

En 2019, le nombre de personnes souffrant d’arthrose à travers le monde était estimé à près de 528 millions, soit une hausse de 113,25% depuis 1990. Si le vieillissement de la population, particulièrement dans les pays industrialisés, est en cause, une récente analyse de la Global Burden of Disease Study suggère que la prévalence croît indépendamment de l’âge. Depuis 1990 au niveau mondial, le taux standardisé sur l’âge a augmenté de 0,32% par an pour l’arthrose du genou, de 0,28% pour celle de la hanche*. Comment expliquer cette évolution ? Probablement par des facteurs comportementaux peu propices à la santé des cartilages. Parmi eux, l’inactivité physique, le surpoids et l’obésité, mais aussi le tabac, l’alimentation et le manque de sommeil. Or au-delà de leur impact sur le risque de développer une arthrose, ces facteurs sont très clairement impliqués dans la progression de la maladie, ainsi que dans le risque de mortalité. Ce dernier s’avère en effet surélevé chez les patients arthrosiques par rapport à la population générale, là aussi après prise en compte de l’âge. Lors d’une étude menée auprès de patients britanniques, suivis pendant une médiane de 14 ans, les personnes arthrosiques présentaient un risque de mortalité accru de 55%, voire de 71% pour les décès cardiovasculaires et de 99% pour ceux liés à une démence**. Lors d’une analyse présentée au congrès, portant sur plus de 104 000 patients arthrosiques inclus dans la cohorte britannique UK Biobank, une équipe de l’hôpital Zhujiang (Canton, Chine) a confirmé le poids des facteurs comportementaux dans le surrisque de mortalité. Chaque patient s’est vu assigner un score reflétant la qualité de son mode de vie, d’une valeur de 0 à 8. Chez ceux dont les habitudes sont jugées les plus saines (score 7 à 8), le risque de mortalité toutes causes confondues, sur une période de deux ans, est réduit de 71% par rapport à ceux dont le score est inférieur à 2. Il est diminué de 60% pour la mortalité cancéreuse, de 78% pour la mortalité cardiovasculaire, et de 88% pour celle liée à des causes respiratoires.   Aux Pays-Bas, les bons résultats d’une prise en charge intensive Au-delà de la mortalité, ces facteurs comportementaux ont un poids majeur dans la progression de l’arthrose, comme l’ont récemment rappelé des recommandations émises par l’European League Against Rheumatism (Eular)***.  D’où l’intérêt d’aller au-delà des... simples conseils d’hygiène de vie, pour adopter une approche plus offensive. Tel est le sens d’une étude interventionnelle menée aux Pays-Bas, dénommée "Plants for Joints", portant sur 64 patients atteints d’arthrose (hanche et/ou genou) et d’un syndrome métabolique. Lors de l’inclusion, les participants ont été répartis en deux groupes : dans celui d’intervention, les patients, très encadrés, devaient suivre un régime végan, assorti de séances d’activité physique par petits groupes, et de conseils en matière de sommeil. Après quatre mois, les patients du groupe intervention présentaient une nette amélioration du score de Womac, qui mesure la douleur, la raideur et la perte fonctionnelle liées à l’arthrose, sur une échelle de 0 à 96. Comparées au groupe contrôle, la baisse du score de Womac était d’environ 11 points (38,2 à l’inclusion, 26,9 à quatre mois), la perte de poids de 3,9 kg. Selon de nouvelles données présentées à Milan, portant sur une extension de l’étude, ces bénéfices sont maintenus à un an lorsque les patients conservent la même hygiène de vie.   Le tabac, facteur d’aggravation de l’arthrose Egalement mis en cause, le tabac accroît non seulement le risque de mortalité chez les patients arthrosiques, mais il favorise aussi la survenue et la progression de la maladie, confirme une étude australienne. Selon cette méta-analyse de trois grandes cohortes (deux américaines, une néerlandaise), les fumeurs (7% des 6 462 patients analysés) souffrant d’une arthrose de genou présentent un surrisque de 64% de voir leur douleur s’aggraver de manière significative au cours des cinq ans de suivi, par rapport aux non-fumeurs. De même, parmi les personnes dépourvues d’arthrose lors de l’inclusion, les fumeurs ont un surrisque de 50% de développer une arthrose du genou. L’évolution radiographique de la maladie semble aussi plus défavorable chez les fumeurs, avec un risque accru de 39% de pincement de l’interligne articulaire. Quant aux anciens fumeurs, les résultats sont similaires à ceux de patients n’ayant jamais fumé - à l’exception d’une légère hausse (13%) du risque d’aggravation du handicap.  Selon Zubeyir Salis, de l’université de Nouvelle-Galles du Sud (Sydney, Australie) et co-auteur de l’étude, "l’arrêt du tabac est important, aussi bien pour prévenir que pour retarder les symptômes et les dommages articulaires de l’arthrose du genou"l.   *Arthritis & Rheumatology, Long et al., 1er mars 2022 **British Medical Journal, Nüesch et al., 8 mars 2011 ***Annals of the Rheumatic Diseases, Gwinnutt et al., 8 mars 2022   Au sommaire de ce dossier :

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