Diabète gestationnel : les effets préventifs de la perte pondérale et du contrôle glycémique
Pour la mère comme pour son enfant, un diabète gestationnel peut par la suite engendrer diabète de type 2 chez la première, obésité infantile chez le second. Selon des travaux présentés au congrès de l’EASD, agir sur le poids et en faveur d’un contrôle glycémique rapide peut nettement diminuer ces risques.
Chez la femme enceinte, la survenue d’un diabète gestationnel est liée à un risque accru de développer un diabète de type 2 au cours des années suivantes. Or selon une étude présentée par la Pre Claire Meek, diabétologue au Leicester Biomedical Research Center (Royaume-Uni), il est possible d’atténuer ce risque par une perte de poids au cours de la grossesse.
Lors de ces travaux, les chercheurs ont fourni des paniers repas à 425 femmes diagnostiquées avec un diabète gestationnel, dès la 29e semaine de grossesse. Dans le groupe d’intervention, ces repas, nutritionnellement équilibrés, équivalaient à 1 200 kcal/j (régime allégé), tandis que ceux du groupe contrôle, de même composition, s’élevaient à 2 000 kcal/j.
Perdre du poids pour éviter le diabète de type 2
À l’exception d’une baisse d’environ un tiers du nombre de femmes mises sous insuline à la 36e semaine de grossesse, la différence entre les deux régimes s’avérait peu significative. Toutefois, les chercheurs montrent que, indépendamment du régime consommé par les participantes, celles ayant perdu du poids au cours de la grossesse (3 kg en moyenne) présentaient un meilleur contrôle glycémique, avec une baisse du taux d’HbA1c avant et après l’accouchement.
Selon Claire Meek, « ces résultats sont très encourageants, car à ce jour nous disposons de peu de moyens, au cours de la grossesse, afin de réduire le risque ultérieur de diabète de type 2 ». La perte de poids maternel était aussi bénéfique pour le nouveau-né, dont le risque d’être grand pour l’âge gestationnel était réduit de 65 %, sans impact sur le taux de faible poids de naissance – qui était même en baisse.
Une fois la grossesse terminée, le risque de diabète de type 2 peut être atténué par la mise en place d’un suivi nutritionnel des jeunes mères. Lors de l’étude menée par le Pr Jaakko Tuomilehto, du département de santé publique de l’université de Helsinki (Finlande), sur 1 180 jeunes mères chinoises, ce suivi, prodigué pendant quatre ans, a permis de réduire de 40 % le risque de diabète de type 2 au cours des dix ans suivant la naissance.
Autre leçon de l’étude, l’allaitement maternel prévenait le risque de DT2, avec une baisse de 58 % chez les femmes ayant allaité leur enfant de 6 à 12 mois, par rapport à celles n’ayant pas allaité.
Importance de la trajectoire glycémique chez la mère
Facteur de risque de diabète de type 2 pour la mère, le diabète gestationnel est aussi délétère pour la santé de l’enfant qui y a été exposé in utero, notamment en termes d’obésité. Jusqu’alors, l’intérêt du traitement du diabète gestationnel était bien établi quant au risque de complications périnatales, beaucoup moins quant à celui d’obésité infantile(1,2).
Or selon l’étude présentée par la Dre Assiamira Ferrara, chercheuse auprès du réseau de soins Kaiser Permanente (Oakland, Californie), la trajectoire glycémique en début de grossesse, et donc la durée d’exposition de l’enfant à un diabète gestationnel non contrôlé, semble cruciale. Pour montrer cela, les chercheurs ont évalué le taux d’obésité infantile aux âges de 2-4 ans et de 5-7 ans, en fonction de la trajectoire glycémique suivie par la mère lors des trente premières semaines de grossesse.
Parmi celles dont la prise en charge était optimale, avec une glycémie rapidement normalisée, le risque d’obésité de l’enfant ne différait pas de ceux nés de mères épargnées par le diabète gestationnel. À l’inverse, chez les femmes dont la glycémie se normalisait plus lentement, voire pas du tout, le risque demeurait, avec un sur-risque allant jusqu’à +20 % à l’âge de 5-7 ans. Selon Assiamira Ferrara, « le traitement du diabète gestationnel, y compris via l’alimentation et l’exercice physique, devrait être débuté aussitôt après le diagnostic, si besoin à l’aide de traitements hypoglycémiants lorsque la glycémie n’est pas normalisée en quelques semaines ».
Le contrôle glycémique est aussi crucial chez les femmes enceintes atteintes de diabète de type 1, notamment pour éviter les malformations congénitales (spina bifida, fente labiale, gastroschisis, etc.), dont le risque est accru de 2 à 4 fois. Menée sur 1 908 femmes et leurs enfants, une étude danoise présentée au congrès confirme que ce risque est étroitement lié au taux d’HbA1C mesuré en début de grossesse, indépendamment de l’indice de masse corporelle. Lorsque ce taux est de 9,5 %, le risque de malformation congénitale s’élève à 17,3 %, alors qu’il n’est que de 6,9 % pour un taux d’HbA1C de 5,5 %. La relation entre taux d’HbA1C et risque de malformation congénitale est linéaire, sans effet seuil : toute hausse de 1 % du taux accroît le risque de 29 %, voire de 57 % pour les malformations majeures.
- Poolsup N, et al. PLoS ONE, 21 mars 2014.
- Guillemette L, et al. International Journal of Obesity, 13 mars 2017.
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Références :
Congrès annuel de l’European Association for the Study of Diabetes (EASD 2024), du 10 au 13 septembre 2024, Madrid. D’après les présentations des Prs Claire Meek (Leicester, Royaume-Uni), Jaakko Tuomilehto (Helsinki, Finlande) et des Dres Assiamira Ferrara (Oakland, États-Unis) et lIda Thorius (Copenhague, Danemark) lors des sessions « Causes and consequences of gestational diabetes », et « Pregnancy : taking care of the future ».
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