Polypose nasosinusienne : quelle prise en charge actuellement ?
La polypose nasosinusienne se caractérise par la présence bilatérale de polypes dans les fosses nasales et les sinus et d’un trouble de l’odorat important et prolongé. Les dernières recommandations précisent la stratégie thérapeutique.
La polypose nasosinusienne (PNS) est une maladie diffuse inflammatoire du nez et des sinus qui apparaît entre 40 et 50 ans. Les hommes sont plus concernés (60 %) que les femmes, mais chez ces dernières, elle est plus sévère et s’accompagne plus souvent d’un syndrome de Widal (aussi commue sous l’appellation de « triade de Samter », qui associe asthme, PNS et intolérance à l’aspirine). Ainsi, la PNS est soit isolée soit associée à l’asthme (40 % des cas) ou encore à une intolérance aux AINS et à l’aspirine (20 % des cas). En Europe, la PNS est considérée comme une inflammation de type 2 (87 % des cas).
« L’étiologie résulterait d’une agression de l’épithélium par des bactéries, champignons, virus, allergènes, polluants, toxiques. Cette agression déclenche une sécrétion de molécules entraînant une réaction inflammatoire emballée. L’épithélium libère des alarmines (TSLP notamment). Les lymphocytes Th2 recrutés produisent des IgE, IL-5, IL-4 et IL-13 qui activent les éosinophiles, les faisant proliférer et affluer dans la muqueuse nasale. Ceux-ci déchargent des médiateurs toxiques agressant l’épithélium, qui, en retour, resécréte. Un cercle vicieux se met alors en place et s’auto-entretient. Des phénomènes de réparation excessive forment des polypes », explique le Pr André Coste, chef de service ORL stomatologie et chirurgie cervico-faciale, CHI de Créteil.
La symptomatologie de la PNS ressemble à celle d’une rhinite allergique, mais ce qui la caractérise est l’apparition d’un trouble de l’odorat important et prolongé.
L’interrogatoire recherche les associations comorbides qui conditionnent la stratégie thérapeutique (asthme, otite séromuqueuse, intolérances médicamenteuses et aux sulfites, terrain allergique, etc.). La rhinoscopie au spéculum (polypes de grande taille) ou la nasofibroscopie réalisée par l’ORL (polypes modérés) confirment le diagnostic. Celui-ci peut être complété par un bilan d’imagerie dont l’examen clé est le scanner des sinus sans injection en coupe axiale, coronale et sagittale. « La PNS se définit par la présence de polypes dans les fosses nasales et les sinus de façon bilatérale (et pas forcément symétrique). La présence de polypes d’un seul côté est un signal d’alarme nécessitant une biopsie pour rechercher une tumeur bénigne ou maligne. C’est un message important », alerte le spécialiste.
En première intention, le traitement est médical
Les recommandations de 2023 insistent sur l’hygiène nasale. Les lavages au sérum physiologique associés à une corticothérapie locale, traitement de référence, doivent être réalisés au long cours. « De courtes cures de corticoïdes oraux (1 mg/kg/j) peuvent être prescrites, à condition de ne pas dépasser deux cures par an pendant sept jours au maximum », insiste la Dre Émilie Béquignon, service ORL et chirurgie cervico-faciale, CHI de Créteil. En présence d’une surinfection (70 % des patients sont colonisés au staphylocoque doré), l’antibiothérapie est proposée. L’évaluation s’effectue à quatre mois. En cas d’échec du traitement médical bien conduit, deux types de chirurgie sont discutés avec le patient : l’ethmoïdectomie radicale et l’ethmoïdectomie fonctionnelle. Dans les deux cas, les corticoïdes locaux sont poursuivis. « Après une chirurgie, les patients sont contrôlés en moyenne sept ans, parfois vingt ans. Ceux ayant un syndrome de Widal peuvent avoir une récidive précoce après deux à trois ans », précise le Pr Coste.
En cas de récidive d’une PNS sévère après chirurgie, deux possibilités (en soutien du traitement local) existent : réopérer (surtout si la récidive est tardive) ou entrer dans un programme de biothérapies.
Plusieurs biothérapies sont disponibles : le dupilumab (anticorps dirigé contre l’IL-4 et l’IL-13), le mépolizumab (contre l’IL-5) et l’omalizumab (contre les IgE). Les études de phase III ont montré que les patients sont répondeurs dans 40 à 70 % des cas (scores d’obstruction nasale, d’odorat et de polypes). Certains sont en rémission sans symptôme. « Aucune étude n’ayant comparé directement une molécule par rapport à une autre, je ne suis pas en mesure de conseiller une biothérapie en particulier. Les effets indésirables sont peu nombreux, mais le recul reste très différent entre les molécules. Attention toutefois au risque d’hyperéosinophilie (transitoire) induit par le dupilumab, précise la spécialiste, qui poursuit : Il faut rester humble, la chirurgie ne guérit pas, mais la biothérapie non plus. Ce traitement est au long cours. Si les anticorps sont arrêtés, les symptômes et les polypes reviennent. »
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Références :
Journées nationales de médecine générale (JNMG, 10 et 11 octobre 2024, Cnit Forest de Paris-La Défense)
D’après les présentations du Pr André Coste (CHI de Créteil) et de la Dre Émilie Béquignon (CHI de Créteil) lors de la session « Prise en charge actuelle de la polypose nasosinusienne ».
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