Il appelle cinq fois le Samu avant de décéder : trois médecins jugés pour non-assistance à personne en danger
Trois médecins vendéens viennent d'être jugés pour non-assistance à personne en danger. Avant de décéder, Claudio Guidi, tétraplégique, avait sollicité à cinq reprises le Samu du centre hospitalier départemental de La Roche-sur-Yon. Le 6 avril 2016, ce patient de 48 ans regagne son domicile de La Roche-sur-Yon (Vendée) après avoir subi une intervention au CHU de Nantes. L’homme, tétraplégique, vient de se faire poser une nouvelle pompe à Baclofène. A son retour, il ressent des picotements et des contractures. Inquiète, son aide à domicile contacte le Samu du CHD à 18 h 30. "Le médecin lui conseille de joindre l’interne spécialisé du CHU de Nantes, ou de se rapprocher du neurochirurgien qui a installé la pompe", relate la présidente du tribunal, citée par Ouest France. Mais les symptômes s’accentuent. Elle renouvelle son appel à 0 h 10. Le discours du deuxième médecin régulateur est identique au premier : "La pompe à Baclofène, c’est quelque chose d’hyperspécialisé. On ne peut pas vous aider aux urgences de La Roche-sur-Yon", lui indique-t-il.
Nouvel appel à 4 h 30, puis un quatrième un peu plus tard. "J’ai le cœur qui s’emballe", souffle Claudio Guidi en sueur. "Votre pompe ne joue pas son rôle, mais il n’y a pas de détresse vitale dans ce que vous me décrivez ", constate le médecin. "Laissez tomber", lâche le patient à bout. Cinquième et dernier appel : "Il a les yeux grands ouverts, et ne parle plus du tout !", explique, paniquée, l'aide à domicile. Cette fois, Claudio Guidi est conduit aux urgences à 6 h 20, puis héliporté au CHU de Nantes, où il décède quelques heures plus tard d’une hémorragie cérébrale. Le rapport des médecins experts est accablant à l'encontre des urgentistes. L’un stipule que la crise d’hyperréflexie autonome, dont souffrent couramment les personnes tétraplégiques comme Claudio Guidi, aurait dû être prise en charge "au risque de provoquer des complications vasculaires, cardiaques, ou cérébrales. Le quatrième appel révèle des signes d’urgence vitale." Un expert note "l’absence d’action des médecins régulateurs. Une faute technique." Un autre expert affirme qu’une intervention aurait dû être déclenchée dès le troisième appel et pointe "un comportement inadapté des trois médecins qui ne sont pas donnés les moyens de rechercher un péril imminent". L'un des médecins a affirmé lors de l'audience avoir procédé à un long interrogatoire pour chercher des critères de gravité. En poste depuis seulement 15 mois, il a admis : "Je n’avais pas cette notion de crise d’hyperréflexie à l’époque". Ses deux consœurs, avec deux ans et demi d’expérience, font le même constat. "En médecine, on ne connaît pas tout sur tout…" "J’ai fait une erreur d’analyse en m’orientant vers une crise d’angoisse. Je n’ai pas perçu de détresse vitale", regrette l’un des médecins, qui a depuis changé de métier. Selon la procureure, "aucune recherche n’a été faite concernant la pompe à Baclofène et les conséquences de son dysfonctionnement. Les médecins n’ont pas été à l’écoute du patient qui appelait à l’aide." Pour le chef d’omission de porter secours à une personne en péril, le parquet a requis à l’encontre des trois médecins une interdiction d’exercer durant un an et huit mois de prison avec sursis. Selon l’un des avocats de la défense, "les trois médecins ont cherché à évaluer la situation de santé toute la nuit. Mais tous les professionnels de santé ne connaissent pas l’hyperréflexie autonome. Le degré d’exigence du procureur est démesuré !" Le tribunal rendra son délibéré le 14 décembre 2020. [Avec Ouest-France.fr]
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