Remplacements limités à 3 ans, exonération de cotisations… Comment le Sénat veut inciter les jeunes médecins à s'installer

24/05/2019 Par Aveline Marques
Le remplacement "ne doit pas devenir la règle à la sortie des études de médecine", estime le sénateur et rapporteur LR du projet de loi de santé au Sénat, Alain Milon, qui a porté un amendement restreignant à trois ans la "durée totale" des remplacements. Les jeunes généralistes sont vent debout.

"Qui veut la fin du remplacement en médecine générale ?" s'interrogent, dans un communiqué commun daté du 23 mai, les syndicats Réagjir et Isnar-IMG. Alors que l'affiliation à la Carmf sera obligatoire au 1er janvier prochain pour les remplaçants non thésés et que l'obtention d'une licence devient compliquée dans certaines facultés, les représentants des jeunes médecins dénoncent l'adoption, mercredi 22 mai en commission des Affaires sociales du Sénat, d'un nouvel amendement "défavorable aux remplaçants". "La durée totale des autorisations d'exercice de la médecine à titre de remplaçant délivrées aux médecins remplissant les conditions fixées à l'article L. 4111-1 ne peut excéder trois années", statue cet amendement au projet de loi de santé, porté par le rapporteur LR, Alain Milon. "Si le recours à la qualité de remplaçant peut être utile, de manière ponctuelle, dans le cadre d'un parcours professionnel ou pour un territoire spécifique, ce mode d'exercice dérogatoire ne doit pas devenir la règle à la sortie des études de médecine", estime ce sénateur, qui souhaite en parallèle "inciter" les jeunes à s'installer au plus vite. Un autre de ses amendements, également adopté, exonère de cotisations sociales les jeunes médecins qui s'installent dans les trois ans suivant l'obtention de leur diplôme, à condition qu'ils exercent durant au moins 5 ans en continu. "Il s'agit ainsi d'inciter les jeunes praticiens à s'ancrer dans un territoire et auprès d'une patientèle."   Une obligation d'installation "différée" "Le remplacement est une étape indispensable vers l’installation", rappellent les syndicats de jeunes. L'enquête sur l'installation des jeunes récemment publiée par l'Ordre montrait en effet que 81% des installés sont passés par une période de remplacement exclusif. Et accessoirement, rappellent les syndicats, "les remplaçants permettent aux installés de se former, de prendre des vacances, et d’assurer la continuité des soins pendant les arrêts maladies et congé maternité".

"Après les débats sur la fin de la liberté d’installation, voilà que l’on vient d’inventer l’obligation d’installation différée" , s'insurge le Dr. Yannick Schmitt, président de ReAGJIR. Une "fausse bonne idée" "qui aura pour conséquence de faire fuir toujours plus les jeunes médecins de l’exercice libéral". Et de rejeter l'idée qu'il y aurait des "remplaçants professionnels". Au 1er janvier 2017, l'Ordre recensait quelque 12 000 remplaçants inscrits, dont 8000 en médecine générale. Un chiffre (qui inclut aussi les retraités actifs) en hausse de 16.2% en 7 ans, à mettre en parallèle avec la hausse de 53% du nombre de premières inscriptions à l'Ordre sur la période. "Ce qui démontre que le remplacement n’est ni attractif ni en explosion", relèvent les syndicats. " Avec moins de remplaçants, comment pourra-t-on assurer une continuité des soins pour tous, alors même que nous n’y arrivons déjà plus ?", interpelle Yannick Schmitt. Les amendements instaurant une "régulation" de l'installation des médecins ont en revanche été retoqués. Le président de la commission de l'Aménagement du territoire souhaitait instaurer la règle d'une arrivée pour un départ en zones surdotées. Mais pour Alain Milon, tout ce qui s'apparente à des mesures de "coercition" ne peut pas entraîner de résultat positif. Le texte a été adopté mercredi, avec 132 amendements. Il sera examiné en séance plénière par le Sénat du 3 au 11 juin, en vue d'une adoption définitive d'ici fin juillet. Consulter le texte adopté par la commission des Affaires sociales. [avec AFP]

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