C’est un peu comme si on rembobinait le film. Et qu’on le réenclenche, disons, dans l’année suivant l’arrivée au pouvoir de François Hollande et l’installation du premier gouvernement Ayrault. À l’époque, aux manettes Avenue de Ségur, Marisol Touraine a vite fait d’imposer et étendre le filet de ses certitudes dogmatiques sur le système de santé : réforme à la hussarde des honoraires libres, tentative d’extension des réseaux de soins aux médecins, prééminence du pouvoir de l’administration sur les initiatives de terrain, tiers payant généralisé, blocage des honoraires… Dehors, la révolte des libéraux gronde, mais qu’importe. La ministre fonce, contre un électorat qui ne sera jamais de son bord, se dit-elle. Stop. On efface et on reprend. À la place de Marisol Touraine, installons Agnès Buzyn au ministère et découvrons sous sa nouvelle gouvernance un nouveau plan de lutte contre les déserts, addendum de sa stratégie de santé présentée à la mi-octobre. Et qu’en a dit la ministre de la Santé à la rédaction d’egora reçue la veille de son déplacement à Châlus, en Haute-Vienne ? Que "contrairement à avant" [sourire]…, elle n’avait pas d’idées préconçues sur les meilleures solutions à mettre en place face à l’accès aux soins. On n’impose plus une voie dogmatique, mais on propose un panel de solutions, on offre des outils pour faciliter les initiatives nouvelles émanant du terrain. On réfléchit en termes de "responsabilité territoriale des médecins", à qui le ministère offre un trousseau de clés. À eux de savoir comment s’en servir et où, avec l’appui des ARS. Là est aussi le véritable changement de paradigme : le pari de la confiance, après la vacuité de cinq années de dialogue de sourds entre le corps médical libéral et son ministre de tutelle. Expression du nouveau monde face au monde d’avant ? On a en tout cas l’impression que les médecins ont dit "chiche !" parce qu’ils sont épuisés. Et veulent tout simplement, prosaïquement, que cela marche.
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