Les enfants ayant une obésité sévère mériteraient un dépistage d’une mutation de GNAS

20/10/2021 Par Pr Philippe Chanson
Pédiatrie
Le gène GNAS code la sous-unité a de la protéine G. Cette protéine G est couplée aux récepteurs à 7 domaines transmembranaires (récepteurs couplés aux protéines G) et médie la signalisation cellulaire entre la liaison du ligand au récepteur et la stimulation de l’adénylate cyclase qui conduit à la production d’AMP cyclique. Des mutations inactivatrices de GNAS sont responsables de l’ostéodystrophie héréditaire d’Albright marquée par un retard de développement, une petite taille et des anomalies osseuses. Lorsque ces mutations inactivatrices surviennent sur l’allèle maternel, du fait du mécanisme de l’empreinte génétique, elles sont aussi responsables d’obésité (de mécanisme mal élucidé jusque-là) et de résistance aux hormones dont les récepteurs sont couplés aux protéines G : résistance à la PTH  à l’origine d’une pseudo-hypoparathyroïdie, résistance à la TSH à l’origine d’une hypothyroïdie et résistance à la GHRH responsable d’un déficit en hormone en hormone de croissance.

Ces mutations de GNAS pourraient-elles avoir aussi un rôle dans l’obésité de ce syndrome voire dans des obésités sévères plus « banales », c’est-à-dire non syndromiques ? L’équipe de Sadaf Farooqi a séquencé l’exome, puis reséquencé de manière ciblée 2548 enfants qui avaient une obésité sévère. Ils ont mis en évidence, dans 22 cas, des mutations de GNAS. Afin d’expliquer l’obésité, ils ont analysé si ces mutations de GNAS pouvaient être à l’origine d’une résistance à la mélanocortine 4 (ayant aussi un récepteur couplé aux protéines G) dont on connaît le rôle dans certaines obésités sévères. Pratiquement toutes les mutations de GNAS trouvées dans cette population, lorsque les mutants de GaS étaient exprimés de manière transitoire dans des modèles cellulaires type HEK293, avaient une altération du couplage aux récepteurs couplés aux protéines G ou une production d’AMP cyclique anormale, ou les deux. Six des 11 patients, qui avaient entre 12 et 18 ans, avaient aussi un retard de croissance. Chez ces patients, les mutations de GNAS altéraient la signalisation du récepteur de MC4 (expliquant l’obésité) mais également celle du récepteur à la GHRH. En revanche, la croissance n’était pas perturbée chez les porteurs d‘autres mutations qui n’altéraient pas cette voie de signalisation (SDS moyen pour la taille = -0.90 vs +0.75, p = 0.02). Seul 1 des 10 patients ayant atteint une taille finale avant ou au cours de l’étude avait une petite taille. Les mutations de GNAS qui altéraient la signalisation du récepteur de la TSH étaient associées à un retard de développement et à des concentrations de TSH supérieures (moyenne = 8.4 ± 4.7 mU/l) à celle de 340 enfants ayant une obésité sévère sans mutation de GNAS (3.9 ± 2.6 mU/l ; p = 0.004). Cette étude est intéressante à plusieurs égards. D’une part elle met en avant, même si cela est finalement rare, la possibilité d’explications moléculaires à l’apparition d’une obésité sévère chez l’enfant. D’autre part, dans la mesure où ces mutations pathogènes peuvent se manifester par une obésité isolée, le dépistage d’enfants ayant une obésité sévère à la recherche de mutations de GNAS devrait permettre un diagnostic plus précoce et donc une amélioration de l’évolution clinique (par exemple de la taille en substituant par de  l’hormone de croissance, ou du développement en substituant par les hormones thyroïdiennes quand cela est nécessaire) et surtout l’utilisation d’agonistes de la mélanocortine pourrait aider à la perte de poids. Les mutations de GNAS qui sont identifiées par test génétique affectent de manière différente les voies de signalisation des récepteurs à 7 domaines transmembranaires couplés aux protéines G, ce qui contribue à l’hétérogénéité clinique. Cela confirme donc aussi que les maladies monogéniques sont certainement plus variables d’un point de vue clinique que leur description classique ne le suggérait.

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