Un "régime santé planétaire" pour nourrir 10 milliards d’individus en 2050

18/01/2019 Par Marielle Ammouche
Nutrition
Les estimations démographiques, qui font état d’une population de 10 milliards d’individus à l’horizon 2050, nous mettent face à un défi majeur : comment fournir à cette population en constante croissance une alimentation saine et qui, dans le même temps, préserve la planète.

C’est à cette question qu’a cherché à répondre une commission de 37 experts scientifiques internationaux (16 pays) dont les constats et conclusions ont été rassemblés dans un rapport, "Alimentation Planète Santé", qui vient d’être publié dans The Lancet, et qui a été réalisé à l’initiative de la Fondation EAT, une fondation internationale qui a pour objectif de catalyser une transformation du système alimentaire mondial, en encourageant l’action et en créant des partenariats novateurs. Pour ces auteurs, "aucun levier n’est plus puissant que l’alimentation afin d’optimiser la santé humaine et la durabilité de notre environnement". Or, le système agro-alimentaire tel qu’il est aujourd’hui "menace à la fois la santé humaine et la stabilité de notre planète". En outre, les déséquilibres sont flagrants, entre les 820 millions de personnes qui n’ont toujours pas accès à suffisamment de nourriture, et les 2,4 milliards qui surconsomment. Au total, environ la moitié de la population mondiale consommerait un régime alimentaire en carence de nutriments. "Il est ainsi urgent de transformer radicalement le système alimentaire mondial. Sans action, le monde risque de ne pas atteindre les objectifs de développement durable (ODD) et l’Accord de Paris pour le climat. Les enfants d’aujourd’hui hériteraient alors d’une planète gravement dégradée où une grande partie de la population souffrirait de plus en plus de malnutrition et de maladies évitables", affirment les auteurs. La commission rappelle ainsi que les régimes alimentaires sains se caractérisent par un apport calorique optimal et se composent principalement d’une diversité d’aliments d'origine végétale, de faibles quantités d'aliments d'origine animale, de graisses insaturées plutôt que saturées et de quantités limitées de céréales raffinées, d'aliments hautement transformés et de sucres ajoutés. Pour les auteurs du rapport, ce type de régime est "gagnant-gagnant" c’est-à-dire bénéfique à la fois pour la santé et pour l’environnement. Ils estiment donc que pour obtenir une alimentation saine d’ici 2050 d’importants changements des régimes alimentaires sont nécessaires. Cela comprend principalement un doublement de la consommation d’aliments sains d’origine végétale, tels que les fruits, les légumes, les légumineuses et les noix, ainsi qu’une réduction de plus de 50% de la consommation d’aliments moins sains, tels que les sucres ajoutés et la viande rouge. En pratique, les experts préconisent, pour un apport de 2500 kcal par jour, de manger chaque jour en moyenne 300 g de légumes, 200 g de fruits, 230 g de graines complètes, 50 g de légumineuses, et 250 g de produits laitiers. La consommation de viande rouge ne devrait pas dépasser 14 g par jour ; les autres sources de protéines étant les volailles (29 g), les poissons (28 g), les œufs (13 g), les haricots secs, lentilles, et pois (75 g), ainsi que les noix (50 g). Selon les experts, ces changements diététiques pourraient permettre d’éviter environ 11 millions de décès prématurés par an, soit entre 19 et 24% du nombre total des décès chez les adultes. Les auteurs précisent que ce régime doit bien entendu être adapté aux spécificités locales, et refléter "la culture, la géographie et la démographie de la population et des individus". Il s’agit par ailleurs de réorienter les priorités agricoles d’une production de quantité à une production de qualité, via une "nouvelle révolution agricole", d’adopter une stratégie visant à préserver la moitié de la terre intacte pour la conservation de la biodiversité, et enfin, de réduire au moins de moitié les pertes et les déchets alimentaires.

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