Contrôle intensif de la pression artérielle systolique chez les diabétiques : gare à la fonction rénale !

26/07/2018 Par Pr Philippe Chanson
Diabétologie
Les recommandations sur l’hypertension, en particulier de l’American College of Cardiology et de l’American Heart Association, préconisent un contrôle strict de la pression artérielle systolique chez les diabétiques de type 2, visant une pression artérielle systolique  (PAS) < 130 mmHg.

Une étude d’intervention, l’étude SPRINT, menée chez des sujets non diabétiques, a montré en cas de contrôle strict de la PAS visant une valeur < 120 mmHg en comparaison d’un contrôle standard de la PA, visant une PAS < 140 mmHg, certes une diminution du risque d’événement cardiovasculaire et de mortalité globale mais aussi une augmentation du risque de survenue d’une insuffisance rénale chronique. Qu’en est-il chez les diabétiques de type 2 ? Y-a-t-il aussi un risque d’insuffisance rénale ? Pour répondre à cette question, des investigateurs américains ont réanalysé les données de l’étude ACCORD (disponibles au NIH) en ce sens. En effet, dans l’étude ACCORD, une intervention intensive sur la PAS du même type que celle de l’étude SPRINT avait été menée chez des diabétiques de type 2. Chez les participants qui n’avaient pas d’insuffisance rénale chronique au début de l’étude (n = 4 311 dans l’étude ACCORD et n = 6 715 dans l’étude SPRINT), ils ont mis en relation l’intervention sur la PAS (intervention intensive avec un objectif < 120 vs intervention standard avec un objectif < 140 mmHg) et la survenue d’une insuffisance rénale chronique définie comme une diminution de plus de 30 % du taux de filtration glomérulaire. La différence moyenne de pression artérielle systolique entre les groupes intervention intensive et les groupes intervention standard était de 13.9 mmHg (IC 95 % = 13.4-14.4) dans l’essai ACCORD et de 15.2 mmHg (14.8-15.6) dans l’essai SPRINT. A 3 ans, l’incidence cumulée d’insuffisance rénale chronique dans l’essai ACCORD était de 10 % (8.8-11.4) dans le groupe intervention intensive et de 4.1 % (3.3-5.1) dans le groupe intervention standard, donnant une différence absolue de risque de 5.9 % (4.3-7.5). Dans l’étude SPRINT, l’incidence cumulée d’insuffisance rénale chronique était de 3.5 % (2.9-4.2) dans le groupe intervention intensive et de 1 % (0.7-1.4) dans le groupe intervention standard, avec une différence absolue de risque de 2.5 % (1.8-3.2). La différence absolue de risque était significativement supérieure dans l’essai ACCORD en comparaison de l’essai SPRINT. En conclusion, les données des 2 études convergent donc pour indiquer qu’une baisse intensive de la pression artérielle visant une pression artérielle < 120 mmHg augmente le risque de survenue d’une insuffisance rénale chronique chez les sujets ayant ou non un diabète de type 2. Cependant, le risque absolu est supérieur chez les diabétiques de type 2. Il faut donc être particulièrement vigilant quant à la fonction rénale en cas de traitement anti-hypertenseur intensif, particulièrement chez les diabétiques. Des études à plus long terme sont nécessaires pour connaître les implications cliniques de ces réductions du taux de filtration glomérulaire liées au traitement anti-hypertenseur.

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