L’ANSM donne son feu vert à une reprise des essais cliniques à l’IHU de Marseille, "sous certaines conditions"
L’ANSM va alléger les restrictions imposées en matière d'essais cliniques à l'IHU de Marseille, autrefois dirigé par le Pr Didier Raoult. Dans un communiqué diffusé ce vendredi, l’agence indique en effet que les recherches impliquant la personne humaine (RIPH) vont pouvoir reprendre à l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection de Marseille (IHU) mais "sous certaines conditions". En juin 2022, l’agence avait énoncé une série de sanctions après qu’un rapport avait pointé de "graves manquements et non-conformités" dans le cadre d’essais cliniques, notamment en matière de consentement des patients.
"La réglementation n’est pas respectée, notamment en ce qui concerne le champ des recherches impliquant la personne humaine, leurs modalités de mise en œuvre, les conditions de prélèvement et d’utilisation des échantillons des personnes incluses dans les recherches, les modalités de recueil du consentement et d’information des patients", détaillait la directrice générale de l’agence sanitaire, la Dre Christelle Ratignier-Carbonneil, dans un courrier destiné à la présidente de l’IHU, Yolande Obadia, et à son directeur de l’époque, le Pr Didier Raoult.
Ces multiples manquements – identifiés sur plusieurs années – avait conduit l’ANSM à restreindre fin 2022 les conditions des essais cliniques à l'institut, menant celui-ci à suspendre tous les essais en vigueur. L’ANSM avait enjoint l’IHU à mettre en œuvre un "plan d’actions pour se conformer à la réglementation", notamment un programme de formation du personnel concerné par la réglementation des RIPH. Elle avait également demandé un bilan intégral des recherches en cours et de celles ayant donné lieu à des publications depuis cinq ans.
L’IHU, désormais dirigé par le Pr Pierre-Edouard Fournier, de concert avec son autorité de tutelle – l’AP-HM, a fourni les éléments demandés, indique l’ANSM dans son communiqué, ce qui a poussé l’agence à lever ces injonctions en vigueur. Toutefois, "de nouveaux éléments ont également été portés à la connaissance de l’ANSM qui laissent apparaître que, malgré la mise en œuvre des mesures exigées, l'application de la réglementation des [recherches impliquant la personne humaine] au sein de l'IHU n’apparaît pas totalement satisfaisante", poursuit-elle dans son communiqué.
En cause : la mise en ligne en avril dernier d’un article en pré-publication cosigné par le Pr Raoult intitulé Early Treatment with Hydroxychloroquine and Azithromycin: A ‘Real-Life’ Monocentric Retrospective Cohort Study of 30,423 COVID-19 Patients, "qui fait état des résultats obtenus chez des patients atteints de Covid-19 ayant été traités à l'IHU entre le 2 mars 2020 et le 31 décembre 2021, et ayant reçu différents traitements", parmi lesquels l’association hydroxychloroquine-azithromycine. Si le Pr Raoult a déclaré que cette étude n’était qu’"observationnelle", ne constituant pas un essai clinique, l’ANSM porte un autre regard.
Dans son communiqué, l’ANSM rappelle qu’elle a saisi le procureur en juin dernier concernant cette étude portant sur plus de 30 000 patients. "Cette étude aurait ainsi dû bénéficier d’un avis favorable d’un comité de protection des personnes (CPP) et d’une autorisation de l’ANSM pour être mise en œuvre."
En conséquence, l’agence de sécurité du médicament enjoint l’IHU et l’AP-HM de lui transmettre "trimestriellement pendant un an" un bilan des projets d’essais cliniques ainsi que des prescriptions de traitements hors autorisation de mise sur le marché (AMM).
Dans un communiqué commun, l'AP-HM et la Fondation Méditerranée Infection (FMI), qui administre l'IHU, se sont félicitées de la reprise annoncée des essais, promettant "la plus grande vigilance" sur le "strict respect des règles, et des principes d'éthique et d'intégrité". L'AP-HM a aussi annoncé que son propre personnel devra valider toute étude future, avec une attention particulière notamment sur la "distinction" entre essais cliniques et études observationnelles. L'AP-HM et la FMI se sont dit "confiantes dans le fait que ces errements appartiennent au passé".
[avec AFP]
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