Acte à 45 euros, disparition de la Rosp… Le SML défend son programme 100% libéral pour les URPS

09/02/2021 Par Louise Claereboudt
Syndicalisme
Lors d’une conférence de presse organisée ce mardi 9 février, le Syndicat des médecins libéraux (SML) a défendu un programme en cinq points pour les élections professionnelles qui se tiendront du 31 mars au 5 avril. Le SML entend porter les valeurs libérales mises à mal par la crise du Covid. 

  “L’avenir de la profession est difficile puisque la crise sanitaire est passée par là, les pouvoirs publics, sous prétexte de déserts médicaux, affirment que la médecine libérale n’a plus les capacités de répondre aux nouveaux défis”, a dénoncé d’emblée le président du SML, le Dr Philippe Vermesch, lors d’une conférence de presse dédiée à la présentation de son programme en vue des élections professionnelles. Fort de ses 565 colistiers (68% d’hommes pour 32% de femmes), le syndicat entend défendre les valeurs libérales de la médecine aujourd’hui “menacées par le Gouvernement qui a entrepris de démanteler les compétences des médecins libéraux pour les confier à d’autres professions”.  Le syndicat, qui espère obtenir une nouvelle convention afin de renégocier les tarifs et les façons d’exercer, dénonce également la division de la profession. “Certains syndicats se sont perdus en devenant courtisans du pouvoir. Ils ont oublié qu’ils étaient des libéraux.” Le Dr Vermesch n’a pas épargné les autres syndicats médicaux, notamment la CSMF et MG France, à qui il reproche d’avoir modifié leur discours à l’approche des élections. "Ce scrutin a une grande portée nationale car les prochaines politiques de santé qui seront amenées à être mises en œuvre au niveau des régions seront conditionnées par le poids des acteurs en capacité de négocier avec le Gouvernement et les ARS'', a déclaré le stomatologue. Il n’est pas dans l’intérêt de la profession que le pouvoir tombe entre de mauvaises mains.”  Ce mardi 9 février, il a décliné un programme 100% libéral en cinq points.    Un acte à 45 euros  Fidèle au maintien du paiement à l’acte, le SML défend la revalorisation des actes de la NGAP comme de la CCAM. “Nous voulons porter les actes de tous les spécialistes et médecins généralistes au niveau européen”, a martelé le Dr Vermesch, qui déplore que la France soit l’avant-dernier pays. Le syndicat s’est fixé comme pour objectif une rémunération constituée à 80% par le paiement à l’acte et à 20% par les forfaits. Le SML souhaite en effet que ces forfaits restent une exception. “Il ne peut se concevoir que dans quelques cas très limités et ne doit pas devenir une part majoritaire dans la rémunération des médecins. On voit bien les difficultés techniques et politiques qu’il y a dès que le Gouvernement veut rémunérer une coordination ou des épisodes de soins par un forfait collectif qui reviendrait aux professionnels de se partager.” Le syndicat s’oppose formellement à tout partage entre professionnels. “C’est un piège dangereux qui mène à l’ubérisation des uns et des autres”, a estimé le Dr Vermesch.  

“Si l’acte était à une valeur normale, tous les médecins pourraient vivre décemment de leurs actes, sans être contraints d’avoir recours aux suppléments de rémunération que leur procurent les Rosp”, a-t-il repris, faisant le lien avec la politique sociale agricole : “des tarifs bloqués, des subventions et, du coup, une désertification”. “Le SML ne veut pas voir la médecine libérale subir le même sort que le monde agricole.”   Dans ce cadre-là, le syndicat veut porter la consultation de base à 45 euros, c’est-à-dire la moyenne européenne, assure son président. Entre contrepartie, le SML propose d’augmenter le temps médical réservé à chaque patient, voire une augmentation des patients sans médecin traitant. Il propose par ailleurs de favoriser la coordination avec les pharmaciens et infirmières sur la surveillance des patients en ALD, avec une pathologie stable, à domicile, “que le médecin verrait moins souvent”.  Concernant la rémunération, le SML souhaite par ailleurs simplifier la tarification, devenue trop complexe, supprimer les prérequis au forfait structure, développer les consultations longues et de prévention, et revoir la Rosp, jugée trop compliquée. “Un acte à 45 euros et des actes en CCAM augmentés permettraient de faire disparaître la Rosp”, a soutenu le Dr Vermesch qui a cependant défendu l’existence d’une Rosp pour la prévention.   Parmi les autres mesures défendues figurent aussi le paiement des actes en permanence des soins (PDS), “avec une majoration de 15 euros sur tout acte fait en journée sur demande de la régulation 116-117 ou du 15”, la rémunération de la coordination en équipe de soins ouverte “individuellement par professionnel”, la valorisation de l’expertise, la revalorisation de la visite pour tous les patients de plus de 75 ans. “Aujourd’hui les médecins, à 30 euros, ne se déplacent pas parce que ce n’est pas attractif et ils perdent beaucoup de temps”, a expliqué le président du SML.  Le syndicat a par ailleurs appelé à préserver le secteur 2.  

  “Bloquer le mercato des compétences médicales”  Le Dr Vermesch a appelé à arrêter le “démantèlement des compétences du médecin”, appelant les pouvoirs publics à faire confiance aux médecins, “en tous les cas, à ne pas les entraver dans leurs pratiques et leur liberté d’exercice”. “Les pouvoirs publics dépouillent la pratique médicale d’une série de tâches, sans s’interroger sur la qualité, voire la dangerosité de cette délégation de tâches à des professionnels moins qualifiés”, a déploré le président du SML, prenant pour exemple les sage-femmes qui, selon lui, “ont tendance à devenir les médecins traitants de la femme”.  Dénonçant une volonté de “distribuer des soins aux moindres coûts”, le SML prône quant à lui la valorisation de la coordination entre professionnels libéraux, “chacun dans son petit champ de compétences”. Il appelle ainsi à “bloquer le mercato des compétences médicales qui ne se distribuent pas comme des bons points ou des bonbons”, et donc à “bloquer les transferts de tâches non consentis et freiner l’émancipation des professions non médicales au profit d’une coopération renforcée”. Pour le Dr Vermesch, il faut replacer le médecin aux commandes de l’organisation des soins.  Autre point que le SML veut défendre : le numérique au service du médecin. Il alerte entre autres sur les dérives de la téléconsultation et des téléservices, et souhaite que le DMP devienne bien plus accessible.    Débureaucratiser les CPTS  Estimant que la crise Covid a montré l’importance de la médecine de ville, le SML appelle à lui donner les moyens nécessaires. Le syndicat milite en ce sens pour la reconnaissance et le développement des équipes de soins ouvertes, “plus agiles que les structures plombées par leur lourdeur administrative”. Le syndicat redoute en effet que les CPTS “soient plombées par la bureaucratie que les ARS leur infligent et qu’elles génèrent par elles-mêmes”. Craignant qu’elles ne soient finalement inutiles, le syndicat inscrit dans son programme la volonté de simplifier et débureaucratiser ces structures.  Au-delà des équipes de soins ouvertes, le syndicat prône la coordination entre généralistes et spécialistes libéraux et hospitaliers, mais aussi entre médecins et paramédicaux, en développant par exemple les annuaires partagés ou encore en permettant aux généralistes “d’accéder aux plages de rendez-vous disponibles des spécialistes et des hospitaliers”. Toujours dans cette volonté d’améliorer la coopération, le SML entend mettre en place “un statut mixte libéral-hôpital permettant aux médecins libéraux de s’investir à l’hôpital local et faciliter les coopérations public/privé”.  Constatant que les médecins libéraux n’ont pas attendu pour répondre à la demande de soins non programmés, le syndicat souhaite leur redonner la main pour organiser la permanence des soins, mais aussi développer la PDS numérique en téléconsultation ou encore “fonder la prise en charge des soins non programmés sur la régulation libérale”.    Réhabiliter le métier  Alors que la Carmf a annoncé la disparition liée au Covid de 74 médecins, le SML appelle à renforcer leur protection sociale, notamment en matière de maternité, perte d’autonomie, etc. Il insiste par ailleurs sur l’importance de compenser le surcoût des mesures sanitaires, nombre de praticiens ayant en effet subi une importante perte de revenus avec l’épidémie. Le Dr Vermesch demande également à ce que l’on poursuive et intensifie les aides économiques pour reconstituer des soldes de trésorerie positifs. “Le SML avait demandé à Nicolas Revel [ancien directeur général de la Cnam, NDLR] à l’époque qu’on se base sur le chiffre d’affaires global de 2019, ce qui a été fait pour les établissements de soins privés. Nous, il a fallu qu’on se contente des charges fixes de 2019, dénonce le président du SML. Les chirurgiens qui ont été empêchés de travailler pendant deux mois n'ont pas récupéré de quoi faire vivre leurs cabinets et ont été obligés de piquer dans leurs réserves.” De même, les médecins de montagne ont été véritablement frappés par la crise, perdant pour certains jusqu’à 80, 90% de leur chiffre d’affaires.  Enfin, dans sa volonté de réhabiliter le métier, le syndicat appelle à mettre en place un outil de suivi en temps réel de l’activité épidémiologique des médecins libéraux, comme une application type WhatsApp.   Cheval de bataille depuis des années du syndicat des médecins libéraux, l’entreprise libérale doit être protégée. Ainsi, il appelle à favoriser l’installation des cabinets libéraux de proximité dans les villes et zones sous denses en incitant les élus locaux à développer un environnement propice (avantages fiscaux et sociaux, accès facilité aux locaux et équipements professionnels). Alors que les maires ruraux ont alerté sur la dégradation des déserts médicaux, le SML demande à ce que soient déverrouillées les aides conventionnelles à l’installation dans les zones sous-dotées, en supprimant notamment les restrictions à l’éligibilité, et en apportant des aides aux médecins déjà installés, comme les assistants médicaux.  Le SML souhaite également faciliter les regroupements mono et pluridisciplinaires “avec une participation de l’Assurance maladie aux frais structurels, des incitations fiscales et sociales, en simplifiant les formalités”. Afin d’attirer les jeunes vers le libéral, le syndicat veut faciliter la patrimonialisation de l’entreprise médicale, mais aussi créer le statut de médecin successeur, ce qui permettrait à un médecin fraîchement installé de faire appel au médecin auquel il a succédé pour le remplacer lorsqu’il en éprouve le besoin.  Conscient de l’importance de susciter les vocations, le syndicat propose de généraliser la mise en œuvre d’un “compagnonnage des étudiants par les médecins libéraux, toutes spécialités confondues, dès la deuxième année des études de médecine, avec plusieurs stages obligatoires de courte durée pour découvrir l’exercice libéral et ses spécificités”. Pour les jeunes médecins, il entend mettre en place un parrainage libéral pour les accompagner vers ce mode d’exercice. 

  Protéger le médecin face à l’insécurité   Pendant l’épidémie de Covid, les professionnels de santé ont été particulièrement ciblés par des violences. Selon les résultats d’un sondage mené la semaine dernière par le syndicat auprès de 1.213 médecins,  27% d’entre eux indiquent qu’ils constatent une recrudescence des attitudes de violence de la part des patients, et 8% d’entre eux avaient déjà été victimes récemment d’une agression. Afin de mettre fin à ce flot de violences, le SML prône l'impunité zéro pour les auteurs de violences, crimes et délits sur des médecins, la possibilité pour le médecin de se désengager des soins en cas d’incivilité sans obligation d’assurer la continuité de ces soins et sans que cela ne puisse être requalifié en refus de soins, ou encore la généralisation des dispositifs permettant d’alerter les secours en cas de besoin. 

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