"Il y a quelques jours de cela, j’ai pu prendre connaissance, grâce au site Egora qui avait relayé les piges d’un journal local, d’un fait concernant le CHU de Brest tout à fait perturbant. Ce CHU s’était fait remarqué pour les mauvaises conditions de restauration des internes il y a quelques années. Un externe s’est quelque peu rebellé vis-à-vis de ses conditions de travail au sein du service des urgences. Il a posté sur les réseaux sociaux des images à l’origine de son courroux. Ce dernier assure les gardes en dormant sur le sol du service des urgences à proximité des régulateurs du Samu. Cela m’a quelque peu interloqué car je suis un médecin généraliste de 51 ans qui a connu des conditions de travail difficiles en tant qu’externe (l’externe est une main d’œuvre facile à utiliser et peu onéreuse). Cependant, lorsque j’ai travaillé aux urgences, en 1988, il nous était possible de nous reposer dans une chambre en assurant un roulement à plusieurs. Comment en 2019, peut-on accepter un tel esclavagisme, et un manque de considération vis-à-vis de ces jeunes générations ? Alors que notre secrétaire d’Etat en charge de la condition féminine souhaite poursuivre les hommes qui regardent de manière soutenue les postérieurs des femmes, on accepte que des jeunes adultes dorment dans des conditions précaires. On comprend, dans ce contexte, la volonté des jeunes générations de ne pas travailler dans de tels services. D’autre part, il est également facile de concevoir que de telles pratiques puissent être responsables de burn out. Travaillant en libéral, j’accueille régulièrement des externes en stage et je les loge dans des studios ; tout cela de manière bénévole. Jamais l’idée de les parquer dans un garage ou un bureau les soirs (après les consultations) ne m’a traversé l’esprit car je suis avant tout un être humain. Je n’accepterais jamais que mes enfants travaillent dans ces conditions, c’est pour cela que les enfants des autres doivent être également respectés. Il ne faut pas oublier que les externes ont travaillé très dur pour réussir un concours difficile. Ils ont vécu durant une ou deux années comme des moines ; situation qu’ils vont revivre dès la 4ème année avec la préparation des ECN. Aussi, se permettre de les humilier de la sorte est quelque peu déplacé compte tenu de leur investissement énorme. Le plus triste dans cette histoire, c’est que les administratifs à l’origine de cette décision assurent probablement les gardes (ou plutôt les astreintes) dans de meilleures conditions, et avec des conditions financières bien meilleures. Je reste également stupéfait par le manque de réactivité du personnel travaillant à proximité. Comment ne sont-ils pas intervenus pour éviter cette pratique irresponsable ? Pourquoi notre ministre de la Santé ne tenterait-elle pas de se coucher sur une couverture dans un service des urgences pour connaître les affres de ces jeunes ? Pourquoi la famille du directeur ne viendrait-elle pas le soir se coucher régulièrement à même le sol dans une salle bruyante pour vivre cette situation infamante ? Au-delà de ces propos, il semble indispensable de prendre (si les données exposées se révèlent exactes) des sanctions à l’égard des responsables de ce fait Le plus inique, c’est le comportement des administratifs :
- Ils refusent de commenter cette situation
- Ils ont décidé de ne plus donner la possibilité, du fait de réactions multiples engendrées par la diffusion de photos, de travailler la nuit pour ces étudiants.
En aucun cas, le journal ne parle de mails ou de lettres d’excuses ni de sentiments de regrets vis-à-vis de cette situation émanant des responsables administratifs. Nous ne pouvons que féliciter le jeune externe qui a su nous interpeller grâce aux réseaux sociaux, et remercions-le au nom de tous les autres qui ont vécu la même situation (si ces faits se révèlent bien entendu exacts). « Lorsque l’homme s’habitue à voir les autres porter les chaînes de l’esclavage, c’est qu’il accepte lui-même un jour de les porter ». Lincoln A. "
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