Point levé

"Laissez-nous choisir notre avenir !" : futurs internes, ils réclament l'ouverture de nouveaux postes

Alors que la phase de simulation de la procédure d'appariement, devant permettre aux étudiants en 6e année de médecine ayant validé les EDN et les Ecos de se voir attribuer un poste d'internat, vient d'être lancée, certains dénoncent une forme d'"injustice". "Trop d’étudiants devront choisir une spécialité par dépit", écrit l'auteure d'une pétition, qui a déjà recueilli plus de 2000 signatures.

09/08/2024 Par Louise Claereboudt
Internat Externat
Point levé

"Nous, étudiants en sixième année de médecine, alertons de la profonde injustice dont nous sommes victimes : l'inaccessibilité à de nombreux postes de spécialité pour la rentrée 2024-2025", peut-on lire en introduction de cette pétition lancée jeudi 8 août. Samedi 3 août s'est ouverte la phase de simulation de la procédure nationale d'appariement pour ces étudiants ayant validé les EDN et les Ecos. Facultative, cette étape doit permettre aux carabins d'entrer leurs vœux pour les postes d'internat (spécialité et subdivision), et de les affiner si besoin en fonction des disponibilités. Pour l'heure, les résultats ne sont pas encore définitifs.

Cette année, 7 974 postes d'internat ont été ouverts aux internes, dont 285 pour les signataires d'un contrat d'engagement de service public (CESP). C'est plus de 1 500 postes de moins que l'an dernier : 9 484 places avaient alors été ouvertes. Cette baisse s'explique par le nombre important de carabins ayant préféré, courant 2023, redoubler leur cinquième année, afin d'éviter d'essuyer les plâtres de la R2C. 276 ont, en outre, échoué aux EDN et 62 ont invalidé les Ecos, les deux examens mis en place par la réforme du deuxième cycle des études de médecine (R2C) en remplacement des ECN. Selon Lucas Poittevin, président de l'Anemf, "environ 7300-7400 étudiants devraient être affectés au final".

"Devant ces désistements, les postes proposés pour l’internat ont été diminués en conséquence, sans toutefois prendre en compte la force des demandes pour certaines spécialités, déplore l'étudiante en 6e année de médecine qui a rédigé la pétition. À titre indicatif et non exhaustif, les postes de chirurgie plastique et reconstructrice ont été diminué de moitié, tandis que la médecine générale à Bordeaux l’a été de 20%. En revanche, et contre toute attente, le nombre de postes en chirurgie pédiatrique reste inchangé."

"Pour certaines spécialités, on a eu une diminution [du nombre de postes ouverts] plus importante que pour d'autres", confirme Lucas Poittevin, à Egora, comme la chirurgie plastique. A contrario, d'autres, comme la chirurgie pédiatrique, ont vu leur nombre de postes augmenter. Dans ce cas précis, "il y avait un besoin en interne plus important", précise l'étudiant. Mais globalement, la diminution "proportionnelle" qui avait été décrétée a été "plus ou moins respectée". "Si on avait maintenu le même nombre de postes" alors que le nombre d'internes est en baisse, "on risquait d'avoir certaines spécialités qui se seraient retrouvées sans interne l'année d'après", explique le carabin, citant par exemple la gériatrie, qui fait partie des spécialités les moins choisies.

"Les rangs limites pour accéder à la plupart des spécialités ont bondi de 1000 places au moins lors de nos premières simulations de choix. Par exemple, un étudiant qui souhaite faire un internat de chirurgie digestive à Paris doit être aujourd’hui classé parmi les premiers 23% de sa promotion, contre 35% l’année passée. Cette différence est inacceptable", dénonce par ailleurs la pétition. Et d'ajouter : "trop d’étudiants devront choisir une spécialité par dépit dans laquelle ils seront moins investis et la qualité de leurs soins en pâtira." L'Anemf a recueilli ces derniers jours plusieurs remontées allant dans ce sens, et a ainsi alerté le Centre national de gestion (CNG), qui supervise la procédure d'appariement.

S'il comprend la "détresse" des étudiants, Lucas Poittevin conseille néanmoins d'attendre la fin de la phase de simulation pour avoir un "équilibre des vœux" et une vision d'ensemble. Car plusieurs biais peuvent fausser les impressions. D'abord la phase de simulation est facultative – tous les étudiants n'y ont donc pas forcément entré leurs souhaits. Aussi, certains "ne vont pas forcément mettre les vœux pour lesquels ils aimeraient être affectés", tout simplement pour tester et affiner leurs choix par la suite. "Cela biaise un peu les résultats."

"Nous nous sentons totalement abandonnés à un cursus maltraitant"

"Après six ou sept ans d’études acharnées on ne nous permet pas choisir notre métier", dénonce l'auteure de la pétition, qui souligne que les récentes réformes (celle de la Paces et celle de la R2C) ont mis à mal la santé mentale de nombreux étudiants "entrainant dépressions, burn out et la disparition de certains". C'est pourquoi, elle demande en urgence, au nom de ses camarades, la réouverture de postes pour l'internat afin que les étudiants puissent choisir les spécialités qu'ils souhaitent exercer à l'avenir. Une demande qui n'a que peu de chance d'aboutir. "J'ai peur que ce soit compliqué alors que la procédure a déjà été entamée", estime Lucas Poittevin.

Au-delà des affectations, cette diminution du nombre d'internes inquiète, et fait craindre une dégradation des conditions d'exercice durant les études. "Dans les spécialités à garde cela va encore alourdir la répartition des gardes, la charge de travail et mettre en danger la santé mentale des internes", peut-on lire dans la pétition. "Laissez-nous choisir notre avenir !"

"Cette répartition de postes fermés ne prend pas en compte les souhaits des étudiants, ne reflète pas leur niveau ni leur travail acharné et multiplie les déceptions. Nous nous sentons totalement abandonnés à un cursus maltraitant, conclut la pétition. En ne réagissant pas à cette fermeture de postes, nous donnerions raison à tous ceux qui ont redoublé pour éviter de faire partie de notre promotion 'crash test', raison à ceux qui ont préféré faire médecine dans d’autres pays, raison à tous les jeunes qui renoncent à ces études pour leur difficulté et le manque de considération envers nos projets professionnels."

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9 commentaires
3 débatteurs en ligne3 en ligne
il y a 4 mois
Dur, dur, de ne ne pas pouvoir faire chirurgie esthétique alors que la France à besoin de de médecins spécialistes en médecine générale. Quelle est la véritable " vocation" de ces futurs soignants
Photo de profil de Michael Fararik
405 points
Débatteur Renommé
Autre
il y a 4 mois
On peut comprendre la frustration, mais les places doivent être adaptées aux besoins de la population. Du moins, elles devraient l'être...
Photo de profil de Henri Baspeyre
12,2 k points
Débatteur Passionné
Chirurgie générale
il y a 4 mois
bof dans 10 ans,s'il manque des spécialistes dans certains secteurs,on importera de médecins cubains chic et pas cher c'est bien la philosophie macronienne! les anywheres et les somewheres comme
 
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