FMC : 10 points clésGoutte : modalités de traitement de la crise et au long cours
La goutte est la plus fréquente des arthrites.
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01Point formation n°1
La goutte est un rhumatisme microcristallin inflammatoire intermittent.
C’est une maladie chronique, de surcharge en urate (sel d’acide urique), réversible. Sa prévalence est estimée à 0,9 % des adultes. -
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Elle est la conséquence d’une hyperuricémie chronique supérieure à 60 mg/l (360 μmol/l), qui correspond au seuil de saturation du plasma en urate de sodium. Cette valeur constitue l’uricémie cible à atteindre. La libération de ces cristaux dans les articulations entraîne des accès aigus et, progressivement, des dépôts tissulaires en amas (les tophus).
Dans les urines, en cas de pH inférieur à 6, l’hyperuricurie peut entraîner des coliques néphrétiques et une néphropathie urique. -
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De 10 à 15 % des patients hyperuricémiques développent la goutte.
On ne traite donc pas une hyperuricémie asymptomatique.
Les facteurs de risque de goutte sont : hyperuricémie, sexe masculin, âge, ménopause, antécédents familiaux de goutte (la goutte est habituellement primitive, familiale), syndrome métabolique, alimentation riche en purines (régime hyperprotéiné, boissons riches en fructose), alcool (bière avec ou sans alcool, alcools forts), insuffisance rénale chronique.
Il existe aussi une origine iatrogène (diurétiques de l’anse et thiazidiques notamment, antituberculeux…). -
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En mode aigu, la goutte se manifeste par une arthrite « classique », débutant habituellement aux membres inférieurs mais pouvant toucher toutes les articulations.
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Les manifestations cliniques chroniques peuvent associer :
- une arthropathie mécanique après plusieurs poussées aiguës avec des tophus visibles sous la peau en regard (géodes ou encoches épiphysaires avec conservation prolongée de l’interligne articulaire et ostéophytose marginale) ;
- des tophus : autour des articulations atteintes et sur certains sites électifs (hélix du pavillon de l’oreille, coudes, tendons patellaires et calcanéens, interphalangiennes distales) ;
- des lésions rénales : lithiase urique (radiotransparente) et néphropathie uratique. -
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Le diagnostic est anatomopathologique, par la mise en évidence des microcristaux dans le liquide articulaire ou dans un tophus clinique.
L’uricémie est le plus souvent supérieure à 60 mg/l, mais elle peut être normale en cas d’accès aigu (un tiers des cas). Il faut donc, dans ce cas, contrôler l’uricémie à distance. L’échographie articulaire montre un aspect en double contour. -
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Le traitement de l’accès goutteux repose sur quatre recommandations :
- l’initiation de la colchicine le plus tôt possible (1 mg, puis 0,5 mg une heure plus tard et ensuite 0,5 mg deux ou trois fois par jour). La diarrhée est un signe de toxicité et doit faire diminuer ou arrêter le traitement. La posologie doit être adaptée en cas d’insuffisance rénale ;
- la corticothérapie per os (30 mg/j équivalent prednisone) est mieux tolérée que les AINS (l’infiltration intra-articulaire est indiquée en cas d’arthrite réfractaire) ;
- les AINS sont une alternative, sur une durée de cinq jours au maximum ;
- les inhibiteurs de l’interleukine 1 sont réservés en cas d’échec des traitements cités plus haut : canakinumab et anakinra (hors AMM). -
08Point formation n°8
Le traitement hypo-uricémiant est prescrit en cas de goutte chronique, après dosage de l’uricémie et évaluation du débit de filtration glomérulaire (DFGe). Sa mise en place repose sur cinq recommandations :
- l’indication dès le diagnostic posé ;
- la cible thérapeutique : uricémie inférieure à 60 mg/l (idéalement 50 mg/l) avec maintien du traitement et contrôle de l’uricémie une ou deux fois par an ;
- le choix du traitement (allopurinol, fébuxostat) dépend de la fonction rénale ;
- le traitement est au long cours. Le protocole prévoit de débuter la colchicine pour une durée totale de six mois et de débuter le traitement hypo-uricémiant vingt et un jours après le début du traitement par colchicine ;
- en outre, il faut prendre en charge les facteurs de risque cardiovasculaires, le syndrome métabolique et faire le dépistage d’une insuffisance rénale. -
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L’allopurinol (inhibiteur de la xanthine- oxydase) peut entraîner des réactions cutanées allergiques (surtout les trois premiers mois) : éruption, toxidermie, syndromes de Lyell, de Dress. En cas de survenue (même minime), il faut un arrêt immédiat du traitement. Le fébuxostat nécessite une surveillance du bilan hépatique et thyroïdien. En cas d’hyperuricémie iatrogène, un avis cardiologique est nécessaire.
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Les règles hygiènodiététiques visent à réduire les alcools forts, bière et sodas sucrés, perdre du poids si nécessaire, diminuer la consommation de viande et de fruits de mer, et prendre en charge tous les facteurs de risque.
Références :
- Collège français des enseignants en rhumatologie. Les référentiels des collèges. Rhumatologie. Elsevier Masson. 7e édition.
- Pascart T, et al. Revue du Rhumatisme 2020;87(5):332-41.
Le Dr Nassim Guerroui déclare n’avoir aucun lien d’intérêts concernant les données de cet article.