Aptitude à la conduite : que faire face à patient qui vient d'être victime d'un AVC?

Si le médecin traitant d’un patient, suite à un AVC récent, ne peut pas lui interdire de conduire et n’est pas autorisé à alerter les autorités administratives, « il n’a pas le droit non plus de le laisser partir sans rien dire, en espérant que tout se passe bien pour son patient et pour ceux qu’il croisera sur sa route » (1). Comme le rappelle le Dr Garnier, président du conseil médical de l’association Prévention routière, « si le patient souhaite continuer à conduire, le médecin est censé lui indiquer qu’il lui revient de prendre rendez-vous avec un médecin agréé pour l’aptitude médicale à la conduite ». Le médecin doit également indiquer dans le dossier médical de son patient qu’il l’a bien informé des risques potentiels à reprendre la conduite sans avoir pris préalablement l’avis d’un médecin agréé par la préfecture de son département. Comme le précise le Dr Richter, président du SMACMAC (syndicat des médecins du permis de conduire), « le contrôle médical d’aptitude à la conduite est obligatoire pour les patients concernés alors qu’ils doivent s’y soumettre de leur propre initiative, ce qui se traduit par une faible adhésion ». Or, après un AVC, même mineur, les capacités motrices, sensitives et visuelles, mais aussi cognitives et comportementales d’un patient peuvent être affaiblies et constituer un obstacle à la reprise de la conduite automobile. Il appartient donc à toute personne victime d’un AIT ou d’un AVC de prendre l’initiative de se soumettre à un contrôle médical auprès d’un médecin agréé après avoir, si besoin, bénéficié d’une évaluation de ses capacités de conduite automobile prescrite par son médecin traitant, son neurologue, son cardiologue…

Un patient concerné par une pathologie pouvant se révéler incompatible avec le maintien de son permis de conduire encourt des sanctions judiciaires s’il provoque un accident à charge (2 ans d’emprisonnement et 4500 euros d’amende) et un refus de prise en charge de son assureur auto. Le médecin agréé, chargé du contrôle médical d’aptitude à la conduite, émet un avis médical portant sur l’aptitude à la conduite, la durée de cette aptitude (ou inaptitude) et éventuellement les restrictions qui s’y appliquent. Le médecin agréé peut aussi demander au préfet de convoquer la personne examinée devant la commission médicale primaire du département ou encore demander des examens complémentaires et conditionner sa décision à l’avis d’un spécialiste. Toutefois, comme le rappelle le Dr Siret, présidente de la section Santé publique du CNOM, « le médecin agréé n’a pas toujours les moyens de remplir sa mission. Actuellement, le patient est le seul à pouvoir transmettre au médecin agréé ses données médicales. Cette situation est inconfortable pour le praticien car la personne qui vient se faire contrôler pourrait être tentée de lui dissimuler les données qui risqueraient de le priver d’un avis favorable ».

Devenir médecin agréé

Selon le Dr Richter, avec environ 4 000 médecins agréés, la France peine à couvrir ses besoins en matière de contrôle médical de l’aptitude à la conduite, au motif notamment « que nos honoraires n’ont pas été réévalués depuis 7 ans, se limitent à 36 euros au cabinet et à 50 euros à se partager entre deux médecins en commission ». Pour devenir médecin agréé pour le permis de conduire, il faut avoir moins de 75 ans et ne pas avoir été sanctionné par l’Ordre dans les 5 ans précédant sa demande d’agrément. Une formation initiale d’une durée de 9 heures doit être accomplie, alors que l’agrément préfectoral devra être renouvelé tous les 5 ans et conditionné à la réalisation d’une formation continue d’une durée de 3 heures visant à actualiser ses connaissances.

1. La santé au volant / Bulletin Ordre des médecins n°93 septembre – octobre 2024