Alors que dix millions de Français souffrent d’une maladie respiratoire chronique – asthme, bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), allergies, cancer du poumon… –, le grand public identifie mal les risques, selon le collectif des Etats généraux de la santé respiratoire*, réuni le 9 février à l’Assemblée nationale, pour la 2ème édition. "Un tiers des personnes concernées en a parlé à un professionnel de santé", a relevé la Pre Chantal Raherison-Semjen, pneumologue au CHU de Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) et représentante du collectif, qui pointe une "minimisation des risques" et une "méconnaissance des symptômes".
A l’occasion de ces Etats généraux, a été lancé l’Observatoire de la santé respiratoire, placé sous le patronage de François Braun, ministre de la Santé et de la Prévention. Il a pour objectif de suivre et d’évaluer l’état des politiques publiques en matière de santé respiratoire durant tout le quinquennat. "Améliorer l’information et la visibilité est primordial", a souligné François Braun.
Déplorant que cette problématique soit "absente des grands plans de santé récents du Gouvernement (Ma Santé 2022, Ségur de la santé…)", le collectif plaide en faveur d’un "grand plan pluriannuel et interministériel". La tenue d’une "conférence nationale de santé environnementale et respiratoire" permettrait de définir une "feuille de route" abordant les enjeux "environnementaux, sanitaires et sociaux".
La lutte contre les risques environnementaux – pollution, dérèglement climatique – passerait notamment par un durcissement des indicateurs de qualité de l’air, un renforcement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) des entreprises et le lancement, "dès à présent", d’une mission flash "prématurité et phtalates".
Une mesure du souffle lors des rendez-vous de prévention
Les médecins généralistes sont en première ligne pour sensibiliser, informer et dépister les patients. "Les rendez-vous de prévention, créés par la loi de financement de la Sécurité sociale 2023, sont une occasion majeure pour les professionnels de santé de faire un point sur le souffle, les modes de vie, les habitudes de consommation", a indiqué François Braun. Ces consultations à 25, 45 et 65 ans devraient intégrer une mesure du souffle par spirométrie, prône le collectif. Il souhaite aussi "des outils et des formations continues ciblées à destination des médecins généralistes pour créer des réflexes 'maladie respiratoire'" et un déploiement des conseillers médicaux en environnement intérieur (CMEI), aujourd’hui au nombre de 120 en France.
La lutte contre le tabagisme va s’intensifier alors que la France compte encore 15 millions de fumeurs. "Un nouveau plan national contre le tabac est en cours de concertation, dans le cadre de la stratégie décennale 2021-2030 contre le cancer", a annoncé François Braun qui vise une "première génération sans tabac en 2032". "Nous actualisons les recommandations pour les médecins de premier recours pour la prise en charge de l’arrêt du tabac et le maintien du sevrage", a ajouté la Pre Dominique Le Guludec, présidente de la Haute Autorité de santé (HAS).
Renforcer la place de l’APA et de la réhabilitation respiratoire
La prise en charge pourrait être améliorée avec la création de parcours de santé "pour tous les patients à tous les âges", et dès 2023, l’extension du remboursement de l’activité physique adaptée (APA) à toutes des maladies respiratoires, des recommandations de parcours comme celles définies pour la BPCO, l’amélioration de l’accès à la réhabilitation respiratoire de proximité, un cadre de télésurveillance "soutenable pour la collectivité et viable financièrement pour les acteurs " et une reconnaissance du handicap respiratoire, selon le collectif.
Enfin, la recherche doit être renforcée alors que la loi de programmation 2021-2030 prévoit 25 milliards d’euros d’investissements sans fléchage vers les maladies respiratoires. "Il y a un manque de priorité scientifique dans ce domaine", a regretté le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue au Pradet (Var) et président de Santé respiratoire France. Aussi, le collectif milite pour un fonds de recherche public-privé "associant l’Union européenne et les collectivités territoriales" et des outils statistiques nationaux afin de "documenter l’impact sanitaire, social et professionnel de ces maladies". En Europe, près d’un décès sur dix est dû à une infection respiratoire.
*Un regroupement de 27 organisations de patients d’usagers et de professionnels de santé impliqués dans la lutte contre les maladies respiratoires
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