En 2019, la pollution de l’air (extérieur et intérieur) a tué 6,7 millions de personnes dans le monde. Parmi ses méfaits, les maladies cardiovasculaires et pulmonaires, dont l’asthme, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), le cancer du poumon et les infections respiratoires. A quoi s’ajoute un risque accru de maladies neurodégénératives, de diabète, d’autisme, de faible poids de naissance. Si l’air s’est assaini en Europe au cours des dernières décennies, les seules particules PM2,5 (taille inférieure à 2,5 µm) sont responsables de 40 000 décès prématurés par an en France. Face à une nocivité sans effet de seuil, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a revu à la baisse en 2021 ses valeurs guides de teneurs atmosphériques de divers polluants. Ces chiffres n’ont qu’une valeur sanitaire, sans obligation pour les Etats de les appliquer. Ainsi, les valeurs réglementaires de l’UE sont plus élevées. Exemple pour les particules de moins de 10 µm (PM10) : la limite est de 40 µg/m3 (moyenne annuelle), contre 15 µg/m3 pour la valeur guide de l’OMS. Fixées en 2008, les limites européennes seront réactualisées en 2030, en vue d’un alignement sur les valeurs guides de l’OMS… du moins celles de l’édition de 2005, indique la Pre Isabella Annesi-Maesano, professeure d’épidémiologie environnementale à Montpellier. Nombre de polluants atmosphériques ne font l’objet d’aucune réglementation. Parmi eux, les particules PM1 (taille inférieure à 1 µm) et les particules ultrafines (PUF, inférieures à 0,1 µm). Or ces polluants, qui du fait de leur petite taille pénètrent plus profondément dans le poumon, auraient un impact sanitaire supérieur aux PM2,5 et aux PM10, seules particules réglementées. Réchauffement : l’impact sanitaire des feux de forêt va croître Si le trafic routier, l’industrie et le chauffage au bois constituent les principales sources de pollution de l’air, d’autres ont localement un effet majeur. C’est le cas des feux de forêt, voués à augmenter du fait du changement climatique. L’été 2022 en a donné un avant-goût amer : sur l’ensemble de l’année, la surface incendiée en France a été 7,5 fois supérieure à la moyenne des 15 années précédentes. Cette pollution liée aux incendies consiste surtout en particules, avec une surreprésentation de PM1 et de PUF par rapport au milieu urbain. « Elles ont un potentiel oxydatif important, avec une quantité élevée d’hydrocarbures aromatiques polycycliques [HAP] et de composés inflammatoires. Leur profil toxicologique est particulièrement agressif », rappelle le Pr Denis Charpin, président de l’Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA). Plusieurs travaux ont confirmé un risque accru d’infections pulmonaires, mais aussi d’exacerbations de BPCO et d’asthme, du fait des émanations d’incendies. L’air extérieur n’est pas le seul à être vicié par la pollution. L’air intérieur recèle aussi divers polluants, de nature biologique (acariens, moisissures, etc…) ou chimique, tels ceux issus des produits d’entretien, peintures, moquettes, etc. Une ‘soupe’ dont l’effet sur la santé reste à creuser : « chaque foyer est un cas particulier, ce qui explique que les études soient beaucoup plus parcellaires [que celles menées sur l’air extérieur]. Du fait qu’il s’agit d’espaces privés, il est plus difficile d’y effectuer des mesures », explique Denis Charpin. Les purificateurs d’air, un intérêt qui fait débat Si l’aération des logements est cruciale, quelques études ont évalué l’intérêt des purificateurs d’air chez les personnes souffrant de maladies pulmonaires. Il en existe deux grands types, ceux équipés de filtres HEPA (High-Efficiency Particulate Air, actifs contre les particules) et ceux permettant d’adsorber les polluants gazeux, tels les filtres à charbon actif. Dans l’asthme, un effet modeste a été observé sur la qualité de vie et la fraction d’oxyde nitrique dans l’air exhalé (FENO), mais sans effet notable sur la consommation médicamenteuse ou le volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) (1). Les résultats sont plus concluants pour la BPCO, selon l’étude américaine CLEAN AIR (2). Ses résultats révèlent une baisse de 68% du risque d’exacerbations modérées chez d’ex-fumeurs atteints d’une BPCO sévère à modérée, dotés des deux types de purificateurs. Leurs chercheurs ont aussi observé une diminution des symptômes (dyspnée, expectorations) et de la consommation de bronchodilatateurs (-46%), ainsi que de meilleurs résultats au test de la marche. Si ces résultats paraissent prometteurs, Denis Charpin se montre prudent : « dans l’étude, plus les personnes restaient à domicile, plus leur état s’améliorait. Or on incite les patients atteints de BPCO à marcher. Il peut être utile d’avoir un purificateur chez soi, mais il est encore plus crucial de faire chaque jour une marche un peu rapide ».
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(1) Van Boven et al. International Archives of Allergy and Immunology, 18 mars 2020 (2) Hansel et al. American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine, 15 février 2022
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