Fièvre de l’enfant : vers un algorithme d’aide à la décision
Antibios ou pas antibios ? Aux urgences, face à un enfant fiévreux, les pratiques diffèrent. L’algorithme DIAFEVER, élaboré au CHU de Nantes, en cours d’évaluation, semble un outil décisionnel très efficace.
Aux urgences, quelle décision prendre face à un jeune enfant souffrant d’une fièvre, sans point d’appel ? Le choix s’avère souvent cornélien : d’une part, en raison de la nécessité d’une rapide antibiothérapie en cas d’infection bactérienne sévère dans 10% à 15% des cas, invasive dans 1% à 3% des cas (méningite, bactériémie). D’autre part, du fait de l’importance d’éviter tout geste invasif (prise de sang, ponction lombaire) et prise inutile d’antibiotiques, si l’enfant n’est atteint que d’une bénigne infection virale.
Face à ce dilemme courant (la fièvre de l’enfant représente 10% à 15% des consultations aux urgences), "les pratiques et les protocoles sont très hétérogènes d’un centre à l’autre", rappelle le Dr David Malorey, chef de clinique au service des urgences pédiatriques du CHU de Nantes. Selon une comparaison de 11 pays publiée en 2019, la France serait l’un des pays les plus parcimonieux en la matière (1). Dans les services étudiés, seuls 22% des jeunes patients français se voient prescrire une antibiothérapie, contre 33% en Italie et 39% au Royaume-Uni.
Examen clinique, test urinaire, procalcitonine
Diverses études ont tenté d’identifier des marqueurs prédictifs, cliniques ou biologiques, d’une infection sévère, sans résultat pleinement satisfaisant à ce jour. En quête d’outils décisionnels, l’équipe du service d’urgences pédiatriques du CHU de Nantes a mis au point un algorithme, dénommé DIAFEVER, permettant de définir, selon l’âge et les résultats des examens, un niveau de risque (2).
Premier élément de cet arbre décisionnel, l’avis clinique tient compte de divers critères, tels que niveau de fièvre, déshydratation, pleurs inconsolables, mais aussi niveau d’inquiétude des parents et intuition du médecin. L’algorithme fait ensuite place à l’examen urinaire, puis à un éventuel dosage de la procalcitonine, marqueur d’infection bactérienne s’élevant rapidement lors d’un épisode de fièvre. En fonction du résultat obtenu lors de ces différentes étapes, le soignant pourra décider s’il y a lieu de traiter et/ou d’hospitaliser l’enfant, voire de pratiquer une ponction lombaire chez les moins d’un mois.
Lors d’une étude pilote menée au CHU de Nantes, portant sur 1 060 enfants, la sensibilité était de 100% : chacun des 11 patients atteints d’une infection bactérienne invasive (IBI) ont été identifiés comme devant bénéficier d’une antibiothérapie (3). La spécificité, à savoir le taux d’enfants non atteints d’une IBI et identifiés comme tels, était de 73,9%. Non publiés à ce jour, les résultats d’une grande étude, menée dans 26 centres français et suisses, seraient très encourageants, notamment en termes d’épargne antibiotique et de ponctions lombaires.
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Références :
Congrès annuel de la Société française de pédiatrie (SFP, Nantes,15 -17 mai). D’après la présentation du Dr David Malorey (CHU de Nantes) lors de la mise au point « Fièvre de l’enfant : vers une (r)évolution de la prise en charge ? ».
(1) Van de Maat J et al., Lancet Infectious Diseases, 28 février 2019
(2) Hubert G et al., BMJ Open, 13 août 2020
(3) Feildel-Fournial C et al., Acta paediatrica, 31 janvier 2023
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