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Syndrome coronaire chronique : un nouveau score de probabilité clinique

Les coronaropathies obstructives ne sont que la partie émergée de l’iceberg. En réintégrant les situations d’angor ou d’ischémie non obstructives, et en introduisant un score de probabilité clinique pré-test, les recommandations 2024 de l’ESC font la part belle à une démarche d’évaluation globale et progressive qui s’articule autour du patient.

23/09/2024 Par Caroline Guignot
ESC 2024
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L’European Society of Cardiology (ESC) vient d’actualiser ses recommandations concernant la prise en charge des syndromes coronaires chroniques (SCC). Les précédentes dataient de 2019. L’ESC insiste sur la nécessité de mettre en place une démarche d’évaluation progressive et centrée autour du patient. C’est dans ce contexte que le diagnostic des angors et ischémies sans obstruction coronarienne doit être envisagé, dès lors que la démarche diagnostique n’a pas mis en évidence de thrombose et que l’approche thérapeutique est infructueuse.

La première importante nouveauté de ce texte européen réside dans l’utilisation d’un score d’évaluation de la probabilité de Coronary Artery Disease (CAD) : ce score de probabilité clinique est fondé sur le profil des symptômes et le nombre de facteurs de risque (antécédents familiaux, tabagisme, dyslipidémie, hypertension et diabète). Le texte propose une table rapportant la valeur du score de probabilité en fonction de l’âge et du sexe du patient, ce qui permet d’adapter la conduite à tenir : en cas de probabilité faible (5 à 15 %), le calcul du score calcique peut être conduit pour écarter ceux dont le risque est suffisamment faible pour rendre d’autres explorations inutiles. Ensuite pour les patients à risque intermédiaire (15 à 50 %), élevé (50 à 85 %) ou très élevé (> 85 %), la stratification des investigations évolue plus volontiers vers l’angiographie coronarienne, l’échographie de stress et finalement la revascularisation… rétrogradant l’ECG d’effort à quelques contextes spécifiques, rapportés par le texte.

L’approche multidisciplinaire doit ensuite être adoptée une fois les investigations conduites et le diagnostic confirmé. Le traitement combine à la fois la prise en charge du risque thrombotique, des facteurs de risque (dyslipidémie, surpoids) et de l’inflammation. Concernant le traitement antithrombotique, le clopidogrel 75 mg peut désormais être utilisé en monothérapie au long cours après un infarctus ou une intervention percutanée, tandis que l’aspirine 75-100 mg peut également être utilisée chez ceux ayant eu un pontage. L’acide bempédoïque peut être utilisé en association à l’ézétimibe en cas d’intolérance aux statines, tandis que les inhibiteurs du SGLT2 chez les patients diabétiques et le sémaglutide chez les non-diabétiques ayant un IMC supérieur à 27 kg/m² peuvent être envisagés. Si le traitement anti-ischémique a connu des évolutions mineures, les recommandations sur les indications des approches interventionnelles ont également connu des modifications.

 

Anoca/Inoca : conduite à tenir pour les patients sans obstruction coronarienne

L’ESC s’est aussi adaptée aux progrès réalisés dans la compréhension de la pathophysiologie du SCC. La conception schématique d’un SCC découlant d’une maladie coronarienne obstructive est limitante. Les connaissances disponibles aujourd’hui confirment l’existence de signes d’angor ou d’ischémie chez des patients ayant des artères coronaires non obstruées, ce qu’on appelle les angina/ischaemia with non-obstructive coronary arteries (Anoca/Inoca). Ainsi, « les SCC liés à une obstruction ne sont que la partie émergée de l’iceberg, a résumé la Pre Vijay Kunadian (université de Newcastle, Royaume-Uni). Les Anoca/Inoca représentent 30 à 50 % des hommes et même jusqu’à 70 % des femmes qui sont soumises à une coronarographie pour explorer un angor ». En cause, des endotypes alternatifs liés au vasospasme, une dysfonction endothéliale, une vasodilatation coronarienne altérée… qui ne sont pas toujours diagnostiqués. En l’absence de thérapie adaptée, ces patients continuent à souffrir d’angine récurrente, avec une mauvaise qualité de vie, un risque d’hospitalisations répétées, des angiographies coronariennes inutiles et des complications cardiovasculaires à terme.

Cela veut dire qu’en cas de signes d’ischémie ou d’angor sans CAD obstructive claire selon les conclusions de l’imagerie fonctionnelle et anatomique (échographie de stress, coroscanner avec injection…), il faut suspecter une Anoca/Inoca. Le traitement est mis en œuvre et les symptômes évalués. S’ils sont persistants, de nouvelles explorations fonctionnelles invasives doivent être envisagées, qui permettent de le caractériser. Les différents endotypes qui sont décrits dans les recommandations relèvent d’une démarche diagnostique et thérapeutique adaptée.

1. Vrints C, et al. ESC Scientific Document Group, 2024 ESC Guidelines for the management of chronic coronary syndromes: Developed by the task force for the management of chronic coronary syndromes of the European Society of Cardiology (ESC) Endorsed by the European Association for Cardio-Thoracic Surgery (EACTS). European Heart Journal, 2024;, ehae177

 

Peut-on arrêter les bêtabloquants en post-infarctus du myocarde ?

Selon l’étude Abyss*, les patients en post-infarctus du myocarde, stables et sans insuffisance cardiaque ont une incidence d’événements cardiovasculaires majeurs non inférieure à trois ans lorsqu’ils arrêtent les bêtabloquants un an après l’événement aigu, comparativement à ceux qui les avaient poursuivis au-delà de la première année. Cependant, l’incidence des réhospitalisations et les valeurs de pression artérielle et du rythme cardiaque étaient toutefois légèrement accrues dans le groupe les ayant arrêtés. Sans amélioration sur la qualité de vie des patients à l’arrêt, l’ensemble de ces résultats plaide en faveur du maintien de la prescription.

* Silvain J, et al. The New England Journal of Medicine, 30 août 2024.

Références :

Congrès de l’European Society of Cardiology (ESC), Londres, du 30 août au 2 septembre. D’après les communications de la Pre Vijay Kunadian (Newcastle, Royaume-Uni), des Drs Francisco Javier Rossello (Palma de Mallorca, Espagne) et Konstantinos Koskinas (Berne, Suisse) lors de la session de présentation des recommandations européennes 2024 pour la prise en charge des syndromes coronariens chroniques.

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