Thrombophilie : la durée du traitement est une décision thérapeutique complexe
La prise en charge d’un patient après un épisode de thrombose veineuse ou d’embolie pulmonaire implique de définir au mieux l’étiologie de la maladie pour mettre en place un traitement personnalisé.
Après que le diagnostic de thrombose veineuse ou d’embolie pulmonaire a été posé, souvent aux urgences, et un traitement d’attaque initié, « les malades sans gravité et avec un bon environnement peuvent être pris en charge en ambulatoire », a rappelé le Pr Olivier Sanchez, PU-PH au service pneumologie et soins intensifs de l’Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP, Paris). « Le premier mois est une période cruciale car à haut risque de récidive et d’hémorragie. » Deux consultations devront être programmées par le médecin traitant, dans les soixante-douze heures et dans le mois suivant l’événement. Elles visent à déterminer l’étiologie de la maladie (contexte de survenue, signes de gravité, antécédents personnels et familiaux…), à réaliser le suivi clinique et thérapeutique (tolérance et efficacité du traitement, observance) et à mettre en place un plan de soins et une éducation thérapeutique du patient.
« La maladie veineuse thromboembolique (MVTE) est multifactorielle, avec des facteurs de risque génétiques (déficit en antithrombine, protéines C et S, facteur V Leiden, facteur II G20210A), acquis (âge, antécédents de MVTE, cancer, syndrome des anticorps antiphospholipides, syndrome myéloprolifératif, hémoglobinurie paroxystique nocturne) et des facteurs déclenchants (immobilisation, chirurgie, œstrogènes, grossesse, post-partum, maladie inflammatoire) », a décrit le Pr Dominique Helley, PU-PH au service d’hématologie biologique à l’HEGP. Au vu de la pluralité des causes possibles, « la réalisation d’un bilan de thrombophilie ne doit pas être systématique. Son impact décisionnel n’est pas majeur », a indiqué le Pr Sanchez.
AOD, stop ou encore ?
Les anticoagulants oraux d’action directe (AOD) constituent le traitement de première intention et présentent la « même efficacité que la stratégie conventionnelle (héparine + AVK) mais une meilleure tolérance (moins d’hémorragie graves). » Chacun a un schéma thérapeutique spécifique. La durée de traitement sera fonction des conditions de survenue de la thrombose. Un cancer actif et une thrombophilie sévère (déficit en antithrombine, syndrome des anticorps antiphospholipides) sont des facteurs de risque majeurs et persistants nécessitant un traitement long. Une chirurgie avec anesthésie générale, une fracture des membres inférieurs ou une immobilisation de plus de trois jours dans les trois derniers mois, ou des facteurs hormonaux chez la femme constituent des facteurs de risque majeurs et transitoires, traités sur le court terme. Pour les MVTE non provoquées, comme la thrombophilie non sévère ou une maladie inflammatoire chronique digestive ou articulaire (facteurs de risque mineurs et persistants), la prise de décision est complexe, entre arrêt du traitement à six mois ou poursuite à vie. « La balance se joue entre risque de récidive de MVTE en cas d’arrêt, risque de saignements sous anticoagulant, et préférence du patient », a exposé le Pr Sanchez. Les scores VTE-Bleed ou Herdoo2 permettent d’estimer les probabilités de récidive.
Le médecin traitant verra le patient une fois par an pour assurer le suivi et réévaluer le rapport bénéfices/risques du traitement.
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Références :
Journées nationales de médecine générale (JNMG, 10 et 11 octobre 2024, Cnit Forest de Paris-La Défense)
D’après les présentations des Prs Dominique Helley (HEGP, Paris) et Olivier Sanchez (HEGP, Paris) lors de la session « Bilan de thrombophilie : pour qui et comment ? ».
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