Vers un dépistage organisé du cancer du poumon : une expérimentation bientôt lancée
Une étude va être mise en place afin de comparer plusieurs modalités d’entrée dans le dépistage : incitation via des messages ciblés, sélection d’un professionnel de santé…
Le dépistage organisé du cancer du poumon devrait être le troisième à être déployé en France, après ceux du sein et du côlon. Ce cancer se situe, en effet, en troisième position en termes de fréquence dans notre pays, avec environ 53 000 nouveaux cas diagnostiqués en 2023 (33 500 hommes [- 0,5 % par an] et 19 000 femmes [+ 4,3 % par an]). Il est aussi en première position dans les causes de décès par cancer, avec 33 000 décès en 2018. Et il est aussi caractérisé par une survie moyenne particulièrement basse, de 20 % à cinq ans et moins de 10 % pour les stades avancés, rappelle ainsi le Dr Didier Duhot, médecin généraliste à Châtillon et secrétaire général adjoint de la Société française de médecine générale. En revanche, dans le cas des formes localisées (20 %), la survie est supérieure à 80 %. Le scanner faiblement dosé sans injection semble l’examen le mieux adapté au dépistage.
L’étude européenne Nelson (2020) a comparé un scanner faiblement dosé à l’absence d’intervention. Les participants, qui étaient âgés de 50 à 75 ans, avaient fumé plus de 10 cigarettes par jour pendant au moins trente ans ou 15 cigarettes par jour pendant au moins vingt-cinq ans. Et ils devaient avoir interrompu leur tabagisme depuis moins de dix ans. Le taux de tests positifs a été de 2,1 %, avec une proportion de faux positifs de 1,2 % et une baisse de mortalité par cancer du poumon de 24 % chez les hommes, et de 5 % pour la mortalité toutes causes.
Quels critères pour le dépistage ?
Plusieurs programmes de dépistage ont déjà été mis en place dans le monde, notamment aux États-Unis, en Pologne, en Croatie, en Chine, en Grande-Bretagne, en Corée du Sud et à Taïwan, mais avec des différences importantes au regard des critères et des modalités pratiques : âge, consommation de tabac, temps depuis un éventuel sevrage, nombre de « tours » de scanner…
Dans un premier temps, l’Institut national du cancer (INCa) souhaitait mettre en place une expérimentation dans plusieurs départements avant la généralisation, mais la Haute Autorité de santé, en 2021, tout en reconnaissant que la démonstration a été faite que le dépistage scanographique peut sauver des vies, a néanmoins décidé que son implémentation en France sur un mode organisé à l’échelle nationale nécessite d’autres études, y compris en ce qui concerne l’adhésion à ce nouveau dépistage.
Expérimenter avant de généraliser : de nombreuses questions en attente de réponses
L’INCa va ainsi financer une grande étude nationale de plusieurs années qui devrait démarrer d’ici un an. « De nombreux acteurs se mobilisent, parmi lesquels les institutionnels, associations, professionnels de santé, dont bien sûr les médecins généralistes, et aussi les tabacologues, pneumologues, oncologues chirurgiens thoraciques… », souligne le Dr Julien Le Breton, médecin généraliste à La Courneuve et vice-président de la Société française de médecine générale. Des comités stratégiques et des coordinations au niveau régional et national devraient bientôt se mettre en place.
Deux modes d’entrée dans le process de dépistage vont être comparés : l’initiative du patient lui-même (interpellé, par exemple, par une mention sur son paquet de cigarettes ou des spots télé l’incitant à aller sur un site internet pour remplir un questionnaire d’éligibilité au dépistage et d’orientation vers un centre d’investigation) et une procédure où ce sont les professionnels de santé qui sélectionneront les patients à adresser aux mêmes centres. Différentes modalités d’invitation et de repérage vont être explorées.
Il conviendra également de finaliser l’algorithme de prise en charge des nodules solides détectés au scanner initial et des autres éléments éventuellement identifiés à cette occasion, comme une ostéoporose ou une anomalie aortique. Ainsi que les scanners de suivi dans les différentes hypothèses. « On estime qu’en moyenne, chaque médecin généraliste investigateur aurait entre 50 et 70 patients méritant d’être dépistés, et nous espérons qu’au moins la moitié des personnes à dépister sera adressée par des équipes de soins primaires », conclut le Dr Le Breton.
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Références :
D’après les présentations des Drs Didier Duhot (médecin généraliste à Châtillon, secrétaire général adjoint de la SFMG) et Julien Le Breton (médecin généraliste à La Courneuve, vice-président de la SFMG) lors de la session « Vers un dépistage organisé du cancer du poumon » organisée par la SFMG.
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