Après la manifestation historique des médecins libéraux, ce mardi 14 février, les syndicats espéraient être entendus par l’Assurance maladie. Ces jeudi 16 et vendredi 17 février se tiennent en effet des bilatérales, durant lesquelles chaque organisation peut échanger avec la Cnam. La séance avec l’UFML-S qui a eu lieu hier s’est déroulée dans un "climat tendu", rapporte le syndicat, contacté par Egora. "Les deux parties se sont rendues coup pour coup autour de l’organisation de la vie conventionnelle et des propositions de la Cnam." Le syndicat, qui organise des Assises du déconventionnement les 3 et 4 mars, attendait un effort financier supplémentaire et conséquent. Mais les nouvelles propositions énoncées hier sont "loin des attentes de la profession".
Selon les syndicats joints par Egora et Capital – qui a pu se procurer en exclusivité le détail des propositions – l’Assurance maladie n’a pas bougé sur le tarif de base de la consultation, qui reste à 26,50 euros, comme proposé début février lors des précédentes bilatérales. Un montant jugé "humiliant" par les représentants des médecins libéraux, qui demandent entre 30 et 50 euros. Le tarif de la consultation de base d’un généraliste sera donc de 26,50 euros, celle d’un gynécologue atteindra par exemple 33,50 euros (contre 32 euros aujourd’hui). Les autres augmentations tarifaires restent liées à la signature du contrat d’engagement territorial (CET), reflétant la politique de "donnant-donnant" de la Cnam, du ministère de la Santé et du Président de la République.
Ce CET – décrié par les syndicats – a été légèrement rénové par la Cnam. Au lieu de quatre thématiques, il n'y en a plus que trois. Il intègre la participation pour les médecins signataires à l’exercice coordonné (CPTS, équipe de soins primaires ou spécialisés…). Les autres critères d’amélioration de l’accès aux soins demeurent. A savoir, entre autres, la participation à la permanence des soins ambulatoires (PDSa), l’ouverture des cabinets le samedi matin, l’augmentation de la file active pour les généralistes, etc. Des mesures vécues comme des "contraintes" par les syndicats. Côté tarifs, le montant de la consultation de base du généraliste engagé dans le CET n’a pas été communiqué hier par l’Assurance maladie. Il a été "volontairement occulté", dénonce l’UFML-S.
Deux autres niveaux mieux rémunérés
En revanche, les montants des deux autres niveaux de consultation, auxquels pourront prétendre les médecins libéraux signataires du CET, ont été précisés par la Cnam. Ils atteindraient respectivement 40 et 60 euros. Dans le niveau 2 à 40 euros, sera notamment intégrée la consultation par un généraliste ou un pédiatre pour les enfants de 0 à 2 ans. "C'est mieux que ce que c'est aujourd'hui", reconnaît le Dr Duquesnel, président des Généralistes-CSMF, contacté par Egora. Dans ce niveau 3 à 60 euros, impliquant des consultations plus longues et complexes, seront notamment inclus l’inscription d’un patient en affection longue durée (ALD) dans sa patientèle, indique Capital, ou encore la consultation annuelle des patients de plus de 80 ans en ALD. La Cnam inclut l'APC des spécialistes (actuellement à 55 euros) dans le niveau 3.
De nombreux médecins qui ne souhaitent pas signer le contrat d’engagement territorial s’interrogent sur les réseaux sociaux sur le devenir des majorations actuelles comme pour la visite longue par exemple. Contactée par Egora, la présidente de MG France, Agnès Giannotti, a indiqué que les non-signataires du CET "pourront continuer à utiliser la même nomenclature". La généraliste du 18e arrondissement de Paris s’est dit déçue par les nouvelles propositions tarifaires. "Le message qui nous est envoyé est : vous ne travaillez pas assez", a-t-elle déclaré.
Ce CET est "humiliant" et "infantilisant", ajoute le Dr Duquesnel. "On a l'impression de devoir signer pour être salarié. Si j'ai envie d'être salarié, j'irais travailler dans un centre de santé !", lâche le président des Généralistes-CSMF. "Globalement, ça ne va pas donner envie aux praticiens de s'investir comme médecin traitant", déplore le généraliste de Mayenne, qui dénonce par ailleurs la levée de la limitation de la téléconsultation (moins de 20% de l'activité totale du médecin). "C'est de la folie ! A partir de ça, il ne faut pas nous dire que c'est une convention pour améliorer l'accès aux soins, très clairement."
Le praticien salue toutefois une avancée sur les soins non programmés, en particulier dans le cadre de la visite à domicile pour un patient envoyé par le Service d'accès aux soins (SAS). "On rajoute une majoration de 10 euros [en plus de la majoration SNP de 15 euros et de déplacement de 10 euros], indique-t-il. Ça répond à une problèmatique de terrain."
Des séances plénières réunissant l’ensemble des forces vives auront lieu les 22 et 23 février. La date de fin des négociations conventionnelles demeure quant à elle inchangée. Il s’agit du 28 février. Trop tôt pour le président des Généralistes-CSMF, selon qui la vraie ouverture des négociations a eu lieu hier, lorsque les tarifs ont été dévoilés. "Ça ne s'est jamais passé comme ça !", s'insurge le Dr Duquesnel. "Nous avons le sentiment que tout est téléguidé depuis l'Elysée depuis l'été dernier." En l’état, un règlement arbitral semble probable.
[avec Capital]
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