Revalorisation de la consultation : "C'est une augmentation de 7000 euros pour les généralistes" souligne le directeur de la Cnam

10/02/2023 Par Aveline Marques
Assurance maladie / Mutuelles
À quelques jours de la grève et de la manifestation du 14 février, et alors qu'un nouveau cycle de négociations bilatérales doit s'ouvrir la semaine prochaine, le directeur de la Cnam, Thomas Fatôme, a tenu à détailler, dans un point presse jeudi soir, les propositions "significatives" faites jusqu'ici par l'Assurance maladie aux médecins libéraux. La revalorisation "transversale" de 1.5 euro pour toutes les consultations représente en année pleine un coût de 500 millions d'euros pour la Cnam, a-t-il souligné. Pour les généralistes, c'est une augmentation moyenne des honoraires de 7000 euros.
 

"Les négociations se poursuivent, elles ne se sont pas interrompues", a précisé d'emblée Thomas Fatôme, directeur de la Cnam, lors d'un point presse organisé jeudi soir avec la presse médicale. Un exercice de pédagogie assumé, à quelques jours d'une grève et d'une manifestation des médecins qui s'annoncent importantes, au cours duquel le patron de l'Assurance maladie a détaillé et chiffré un certain nombre de propositions. S'il semble intransigeant sur le principe même du contrat d'engagement territorial individuel, conditionnant l'accès à des niveaux de rémunération supérieurs, les discussions restent ouvertes sur "sa forme et son contenu", ainsi que les tarifications associées. De nouvelles réunions bilatérales se tiendront les 15 et 16 février. Ensuite, les négociations entreront dans la dernière ligne droite. 

 

Sur le contrat d'engagement territorial et la question du samedi matin 

"Ce principe de reconnaître l'engagement individuel qu'ont les médecins sur la prise en charge des patients, sur la continuité des soins, c'est un élément important, un objectif central de la négociation. Après, la forme, le contenu, les éléments tarifaires, ce sont des choses sur lesquelles on a engagé la discussion et la négociation doit se poursuivre. On veut un dispositif simple, lisible, efficace, qui soit compréhensible pour les médecins." 

"Dans les propositions qu'on a faites dans le cadre du CET -et encore une fois la négociation continue- ils auront ce choix-là : faire de la PDSA, des soins non programmés ou ouvrir le samedi. Il n'est pas question d'obliger les médecins à ouvrir le samedi matin. Aujourd'hui, vous avez en moyenne 17 000 MG qui ouvrent le samedi matin, à peu près un tiers, très régulièrement voire quasi systématiquement. Proposer 35 samedis, ça correspond à la pratique de 17 000 médecins. Il y en a 25 000 qui font de la PDSA, aujourd'hui 5 000 qui cotent des SNP. Ce sont des choix qu'on propose aux autres médecins." 

"Le fait de participer à cet engagement territorial déclenche deux leviers : un forfait annuel de 3 000 euros et l'accès à ces niveaux de tarification qu'on est en train de définir." 

 

Sur la revalorisation "transversale" 

"On a posé avec les syndicats ce système à deux étages : une revalorisation transversale pour l'ensemble des médecins de 1.5 euro, puis des revalorisations qui sont liées à cet engagement territorial." 

"Cette augmentation transversale concerne toutes les consultations, sauf la téléconsultation [qui reste à 25 euros pour les MG, NDLR]. Pour les généralistes, ça fait passer la consultation à 26.5 euros, qu'ils rentrent ou pas dans un engagement territorial. La consultation des spécialistes passe à 31.5 euros, l'APC à 56.5 euros, etc. 

Pour les généralistes, j'ai bien mesuré l'accueil de la proposition qu'on a faite. C'est une augmentation de 6% de la lettre clé, qui se traduit pour un médecin avec une patientèle moyenne par une augmentation d'honoraires de l'ordre de 7000 euros par an. Ce n'est pas négligeable. Après, la négociation elle va se poursuivre." 

"Cette seule mesure-là représente un coût en année pleine de 500 millions d'euros, sachant que la précédente convention c'était 1 milliard d'euros. Ce qui témoigne d'un investissement qui est tout sauf anecdotique." 

 

Sur les rémunérations liées au CET 

"On a commencé à mettre du contenu dans ces différents niveaux, on présentera les tarifs la semaine prochaine. Il y a la téléconsultation, qui est un niveau O, et après il y a 3 niveaux de consultations cliniques. La discussion... conventionnelle va se poursuivre pour préciser le contenu de ces trois niveaux et y mettre en face des tarifs." 

 

Sur les assistants médicaux 

"Pour un ETP, on propose une aide de 21 000 euros par an, qui ne s'arrête pas au bout de 3 ans." 

"On a parlé historiquement d'aide à l'embauche mais il faudrait parler d'aide à l'emploi. L'aide elle est pérenne. On s'est fixé un objectif ambitieux de 10 000 assistants à la fin 2024 mais c'est un objectif plancher, si on fait 12 000, 15 000 on aura été au rendez-vous. On ne va pas fermer le robinet si on atteint 10 000. Objectif ambitieux car c'est allé nettement plus vite que ce qu'on a fait jusque-là. On déverrouille le dispositif : quelle que soit la zone territoriale, exercice coordonné ou pas, vous avez le droit à un ETP." 

 

Les mesures qui s'appliqueraient immédiatement, sans le délai de 6 mois 

"Les dérogations posées par la LFSS 2023 concernent les mesures liées aux assistants médicaux, aux soins non programmés (avec la pérennisation de la majoration de 15 euros par acte régulé et 100 euros de régulation de l'heure) et les mesures liées à la démographie médicale, par exemple la revalorisation du forfait patientèle médecin traitant de 30% pour ceux qui exercent en ZIP. Cela représente +6000 euros par an." 

 

Sur les menaces de déconventionnement 

"Le déconventionnement, c'est un acte qui a une forme de gravité qui aboutit en réalité à empêcher la prise en charge des consultations pour les patients par l'Assurance maladie et conduit le professionnel à s'affranchir des règles d'une sécurité sociale universelle. C'est aussi un geste qui peut pénaliser les confrères qui exercent dans les zones territoriales du médecin concerné. On invite chacun à bien mesurer ce que ça peut vouloir dire. On a vu ce que c'était pendant la crise du Covid d'avoir un système d'assurance maladie universel public. Vouloir en sortir, vouloir d'autres financeurs, est-ce que c'est vouloir relier l'accès aux soins aux capacités financières des assurés ? Ce n'est évidemment pas le choix de l'Assurance maladie ni, je crois, celui des Français qui sont extrêmement attachés à notre système. 

Je souligne par ailleurs que le médecin qui se déconventionne perd toutes les rémunérations forfaitaires, la prise en charge des cotisations sociales que l'Assurance maladie assume et qui représente des montants importants. Je fais confiance à l'esprit de responsabilité des médecins libéraux qui je le sais, sont dans leur immense majorité attachés à ce système d'assurance maladie car ils sont attachés à pouvoir soigner leurs patients et à ce que ces patients soient pris en charge." 

 

Sur la perspective d'un règlement arbitral 

"On va tout faire dans les 15 jours, trois semaines qui restent pour obtenir un accord qui soit conforme au mandat qui a été fixé, à la fois par l'Union des caisses d'Assurance maladie et par les ministres dans leurs lignes directrices. On ne joue pas l'échec, on ne cherche pas à avoir un règlement arbitral. On essaiera tout pour aboutir à un accord. Après, si le 28 février au soir on relève qu'il n'y a pas de convergence possible sur la signature d'une convention, l'arbitre rentrera en fonction. On a beaucoup travaillé, on a mis beaucoup de propositions sur la table. On savait que ces négociations seraient difficiles, et elles le sont parce que les attentes des deux côtés de la table sont très elevées. Mais nous, on fera tout pour essayer de proposer des dispositifs qui rencontrent l'adhésion des syndicats dans le cadre d'un mandat très clair qui est de renforcer l'accès aux soins des assurés, en accompagnant les médecins libéraux." 

 

Sur la proposition de loi Rist 

"Cette négociation a été impactée par l'actualité parlementaire, qui est indépendante de la volonté de l'Assurance maladie. Il est important de faire la part des choses. Nous, on est concentrés sur les paramètres de cette négociation. 

S'agissant de l'amendement relatif à l'engagement territorial, il fait simplement un renvoi à la convention médicale. Quelque part, il vient apporter une forme de crédit politique à cette négociation. Juridiquement, on n'en avait pas besoin. Mais que ce soit dans la PPL Rist ou pas, nous on va continuer à négocier sur ce sujet-là. C'est aussi un signal de confiance que voulaient donner les ministres et les parlementaires, de ne pas déterminer par la loi la forme de cet engagement, mais de renvoyer à la négociation conventionnelle son contenu, y compris les leviers tarifaires afférent à cet engagement." 

 

Sur les mesures de simplification administrative 

"On souhaite confirmer à la sortie de ces négos conventionnelles le déploiement de ces mesures de simplification proposées dans le cadre de la mission menée par le Dr Jacques Franzoni et Pierre Albertini, pour ce qui relève de l'Assurance maladie. Rappel en 48h du médecin-conseil, suppression des justificatifs papiers pour les flux dégradés, amélioration du système d'ALD… On va mettre notre énergie pour mettre en œuvre ces mesures car c'est déterminant pour la qualité de vie au travail des médecins libéraux. 

Le rapport rappelle que les arrêts de courte durée, de moins de 3 jours, ne sont pas pris en charge par l'Assurance maladie donc en fait c'est un sujet qui ne relève pas de l'Assurance maladie, mais des relations entre assurés et employeurs. C'est une mesure que le rapport ne retient pas et que le ministre n'a pas retenue. Le fait qu'un médecin vérifie si l'état de santé d'une personne justifie un arrêt de travail, et par ailleurs justifie aussi une prise en charge, ça me semble tout de même à prendre au sérieux." 

 
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