
Yannick Neuder (Capture écran France Inter)
Grève des médecins contre l'installation régulée : "Je comprends leur colère", lance Neuder
Au micro de France Inter, ce vendredi, le ministre chargé de la Santé et de l'Accès aux soins a dit "comprendre la colère" des médecins, dont les représentants ont annoncé une grève illimitée à partir du 28 avril pour s'opposer à la régulation de l'installation votée par les députés.

Yannick Neuder (Capture écran France Inter)
Fermeture des cabinets, grève des gardes et du service d'accès aux soins, manifestation à Paris… Dans les rangs des médecins, la mobilisation s'organise pour lutter contre la proposition de loi Garot dont la mesure phare – la régulation de l'installation – a été votée à l'Assemblée le 2 avril dernier. Alors que les débats autour de ce texte transpartisan doivent reprendre le 6 mai, les syndicats de carabins et de médecins appellent à l'union, tout en mettant en avant des stratégies différentes. Leur objectif, lui, est unique : faire entendre raison aux parlementaires et sauvegarder le principe de la liberté d'installation, gage de l'attractivité du métier selon eux.
Invité au micro de France Inter, ce vendredi 18 avril, le ministre chargé de la Santé et de l'Accès aux soins a réaffirmé son opposition à cette proposition de loi. Pourquoi ? "Parce que je pense que le remède est pire que le mal", a-t-il confié à l'antenne. "Mon objectif n'est pas de mettre [en place] une médecine à trois vitesses", a poursuivi Yannick Neuder. "Si un médecin ne veut pas s'installer dans telle zone", il pourrait décider "d'arrêter de pratiquer la médecine", d'opter pour "des honoraires libres" voire de "partir à l'étranger", a mis en garde le locataire de l'avenue de Ségur, soulignant la "concurrence internationale".
Médecins, serez-vous prêts à aller exercer jusqu'à 2 jours par mois dans un désert ?

Michael Finaud
Non
On comprend parfaitement que ce gouvernement et ce Ministre pourtant médecin et ses 8 prédécesseurs détestent la médecine libérale... Lire plus
Des craintes partagées par les syndicats de médecins – seniors comme jeunes – mais aussi par l'Ordre des médecins, qui a officiellement pris position par la voix de son président. Alors que la profession a annoncé une grève illimitée à compter du 28 avril prochain, le ministre de la Santé a dit "comprend[re] leur colère, notamment [celle] [d]es plus jeunes". "Les études de médecine restent des études sélectives, longues ; c'est un sacré engagement, c'est dix ans de sa vie. Donc, on ne peut pas forcément modifier les règles du jeu en cours", a estimé le cardiologue de profession.
Et de poursuivre : "Mais d'un autre côté, il faut aussi entendre la grande détresse, le grand désarroi, de notre population d'une façon générale – [en] ville ou [à la] campagne, qui a beaucoup de difficultés à se faire soigner." Pour améliorer la prise en charge des Français toutefois, la solution "n'est certainement pas de fracturer la communauté médicale", a affirmé le ministre pour qui "la communauté médicale, paramédicale, est la principale richesse de notre système de santé". "C'est ce qui [lui] permet de tenir… On l'a encore vu pendant la grippe."
Des propositions du Premier ministre "le 25 avril"
Mais alors face aux déserts médicaux, quelles solutions ? "On ne gère pas une pénurie en [la] régulant", a insisté Yannick Neuder, rappelant qu'"on forme actuellement le même nombre de médecins qu'en 1970", alors que "nous étions 15 millions d'habitants en moins, [que] la population a vieilli, et surtout, [qu'il y a désormais] un facteur important que personne ne remet en cause, c'est le rapport au travail". Pour le ministre, ce qu'il convient de faire, c'est de "former davantage de médecins, former plus et former mieux". Ce qui, a-t-il concédé, "prendra un peu de temps".
Au micro de France Inter, Yannick Neuder a également évoqué les jeunes Français qui partent faire leurs études à l'étranger, "en Espagne, en Roumanie, au Portugal", et qui constituent un contingent non négligeable. "On peut aussi engager une solidarité avec des médecins qui peuvent s'organiser, notamment dans des zones particulièrement désertiques", a-t-il poursuivi. En mettant par exemple en place une politique "d'aller vers" avec des "consultations spécialisées" et des "consultations de médecine générale qui puissent se délocaliser par rapport à un cabinet principal". Ce qui pourrait aussi susciter des projets d'installation, avance-t-il à demi-mot.
Cette politique, Yannick Neuder est en train de la travailler en "co-construction" avec les acteurs (professionnels de santé, élus locaux, patients, associations…), dans le cadre d'un cycle de concertations. "J'ai également réuni les préfets, les agences régionales de santé pour identifier territoire par territoire les zones particulièrement rouges", a-t-il précisé. Des propositions "seront faites le 25 avril par le Premier ministre", a-t-il ajouté. Face à la société civile (Cese), le 1er avril dernier, François Bayrou s'était montré favorable à "une régulation" pour lutter contre les déserts, provoquant l'inquiétude au sein de la communauté médicale.
[avec France Inter]
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