Téléconsultation : les recos de la Sécu

11/04/2022 Par Sandy Bonin
E-santé

Pour accompagner le développement de la pratique de la téléconsultation auprès des médecins et comme prévu par l’avenant 9, l’Assurance maladie et les syndicats représentatifs signataires de la convention médicale ont élaboré avec l’Ordre des médecins une charte de bonnes pratiques.   Ce document de 10 pages a pour objectif de faire connaître aux médecins les recommandations et obligations essentielles au regard de la pratique de l’activité à distance pour garantir la qualité, la sécurité et la continuité des soins aux patients. Cette charte rappelle les grands principes qui doivent régir l’activité de téléconsultation, quels que soient la spécialité et le statut des médecins. Les lois et règlements applicables aux conditions d’exercice, aux règles de déontologie et aux standards de pratique clinique s’appliquent à l’identique pour la consultation et la téléconsultation. La charte souligne tout d'abord que les enjeux de qualité et de sécurité des soins, spécifiques à la téléconsultation, sont liés à la capacité du professionnel médical à établir un diagnostic en l’absence d’examen physique direct. Si la téléconsultation peut constituer une aide à la prise en charge d’un patient, la consultation en présentiel reste l’acte de référence, précise l'Assurance maladie, qui souligne que l’examen clinique est le pilier de la prise en charge du patient. C'est au médecin de juger de la pertinence du recours à la téléconsultation.   Relation entre un patient et son médecin traitant La primo-consultation ne constitue pas un motif d’exclusion de la téléconsultation, mais la téléconsultation est d’autant plus pertinente que la relation patient-professionnel est déjà établie, indique la charte. Le recours à la téléconsultation doit ainsi prioritairement se faire dans le cadre d’une relation entre un patient et son médecin traitant. Toutes les situations médicales sont a priori potentiellement concernées par la téléconsultation et plus particulièrement les motifs de consultation courants (ex : renouvellement d’ordonnance).

La prise en charge de patients exclusivement en téléconsultation n'est pas possible car elle porte atteinte aux exigences déontologiques de qualité, de sécurité, de continuité et de permanence des soins. Par ailleurs, la pratique exclusive de la téléconsultation génère, si elle est durable, une perte d’expérience clinique susceptible de placer le médecin en situation d’insuffisance professionnelle, estime la charte.   Seuil d'activité Conformément à la position du Conseil national de l’Ordre des médecins après interrogation des conseils nationaux professionnels, un médecin ne peut ainsi pas réaliser plus de 20% de son volume d’activité globale conventionnée à distance (téléconsultations et télé-expertises cumulées) sur une année civile. Le taux est calculé en faisant le rapport entre le nombre d’actes de téléconsultations et de télé-expertises et le nombre total d’actes cliniques et techniques réalisés pris en charge par l’Assurance maladie. Un affichage du taux d’activité à distance est prévu sur amelipro pour le suivi du taux d’activité individuel du médecin. Ce seuil a également vocation à être transposé à d'autres professions de santé et structures de santé. La charte recommande que le médecin souhaitant réaliser une activité de téléconsultation se forme à cette pratique dédiée dans le cadre de formations de développement professionnel continu (savoir communiquer à distance avec ses patients et réaliser un examen clinique à distance, savoir utiliser le matériel, les équipements de communication à distance, les dispositifs connectés, la transmission et le stockage des données…).     Sécurité des données de santé La protection et la sécurité des données personnelles de santé est impérative, rappelle le document, qui détaille les différents prérequis technologiques nécessaires à la réalisation de la téléconsultation. Ainsi, le recours à la vidéotransmission dans des conditions garantissant la qualité, la confidentialité et la sécurité des échanges ou encore l’identification et la vérification de l’identité du patient sont obligatoires. Le médecin téléconsultant doit pouvoir s’authentifier auprès du patient, préalablement à la téléconsultation. Les locaux du praticien doivent être adaptés pour permettre de respecter la confidentialité des échanges.

La protection et la sécurité des données personnelles de santé doivent être garanties par le médecin. Le versement des comptes rendus des actes de téléconsultation dans le dossier médical partagé du patient est effectué en conformité avec le cadre d’interopérabilité des systèmes d’information de santé (CI-SIS). Les médecins doivent mettre en place des mesures de sécurité adaptées (ex. : utilisation de la carte professionnelle de santé, mot de passe personnel et conforme aux recommandations de sécurité, utilisation d’un système de chiffrement fort en cas d’utilisation d’internet, etc.). L’hébergement des données de santé à caractère personnel issues de la téléconsultation peut être réalisé par le médecin dans son logiciel en local ou stocké par un hébergeur certifié ou agréé afin d’assurer l’obligation de respect du secret médical. Enfin, le médecin devra être équipé d’une solution de paiement en ligne, pouvant être intermédiée par la plateforme de téléconsultation. La facturation et le paiement doivent avoir lieu après la réalisation de la téléconsultation. Les médecin est encouragé à recourir à la e-prescription et à l’appli carte Vitale pour sécuriser la facturation et faciliter le tiers payant.   Parcours de soin Avant toute téléconsultation, le médecin doit s’assurer de la bonne information du patient sur l’acte de téléconsultation. L'acte pourra être suspendu à tout moment à l’initiative du médecin ou du patient.

La téléconsultation s’inscrit toujours dans le respect du parcours de soins coordonné, ce qui suppose, si le médecin téléconsultant n’est pas le médecin traitant, une orientation initiale du patient par ce dernier. A l’instar de la consultation en cabinet, l’orientation initiale par le médecin ne s’applique pas si le patient ne dispose pas d’un médecin traitant ou encore si le médecin traitant n’est pas disponible dans un délai compatible avec l’état de santé du patient.   Proximité géographique Le suivi régulier du patient doit s’effectuer par une alternance de consultations en présentiel et en téléconsultations au regard des besoins du patient et de l’appréciation du médecin. Par exception, cette alternance ne peut s’imposer, dans le cadre du recours à une téléconsultation via le service d’accès aux soins (SAS), ce dernier visant à répondre à une demande ponctuelle de soins urgents. Le médecin téléconsultant doit se situer à proximité du domicile du patient. Cette proximité géographique permet d’assurer un suivi régulier de l’état de santé de ce dernier et d’organiser une consultation en présentiel si celle-ci s’avère nécessaire. L’exigence du respect du principe de territorialité ne s’applique pas pour les patients résidant dans les territoires les plus fragiles dits « zones d’intervention prioritaire » (ZIP), n’ayant pas de médecin traitant ou en l’absence d’organisation territoriale coordonnée de télémédecine. Les sociétés d’offre de téléconsultation sont tenues d’orienter prioritairement les patients qui les consultent vers des praticiens pouvant les recevoir dans des délais adaptés en proximité de leur résidence.  

Et pour les sociétés de téléconsultation ?
Les offreurs de solutions de télésanté doivent respecter l’ensemble des conditions de la charte et tenir compte des préconisations du Cnom établies dans son rapport sur le mésusage de la télémédecine. Ils doivent organiser leur activité pour veiller au respect du seuil maximal d’activité de télésanté par professionnel de 20%. Dès lors, les dérogations au principe de territorialité supposent que le patient réside en zone sous-dense (dans les zones classées par les ARS comme « zones d’intervention prioritaires »), n’a pas de médecin traitant, et qu’il n’existe pas d’organisation territoriale coordonnée de télémédecine sur son territoire. Dans le cadre de la prise en charge des soins non programmés, les offreurs de télésanté peuvent également prendre en charge des patients en téléconsultation après régulation par le SAS, sur l’ensemble du territoire, dès lors que le régulateur n’a pas trouvé de solution à proximité du patient. Les téléconsultations ne respectant pas ce cadre ne peuvent donner lieu à prise en charge par l’Assurance maladie. Les médecins sollicités pour réaliser des téléconsultations sur des plateformes sont invités à faire preuve de vigilance sur le respect de ces règles et la bonne information du patient sur la prise en charge de sa téléconsultation.
La réalisation de téléconsultations par le biais de plateformes commerciales de télémédecine n’exonère en aucun cas le médecin de ses obligations déontologiques. Il en est de même s’agissant des télécabines/bornes de téléconsultation, auxquelles recourent des patients pour bénéficier d’une téléconsultation. Toute installation d’une télécabine dans un territoire donné doit être régulée, selon le Cnom.  

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