IPA aux urgences : "la fin des médecins"? La réponse cinglante d'une infirmière en pratique avancée à Patrick Pelloux
Dans un communiqué du 25 novembre, l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), présidée par le médiatique Dr Pelloux, se dit "scandalisée" par la création du métier d'infirmière en pratique avancée (IPA) aux urgences, en cours de discussions au ministère. Interrogée par Egora, la présidente de la CNP des infirmiers en pratique avancée dénonce des "contre-vérités". "Quand vous irez aux urgences, vous ne verrez plus de médecin, vous verrez des infirmières de pratique avancée. Quand vous appellerez le Samu, ce sera plus des médecins que vous aurez dans les véhicules, ce sera des infirmières de pratique avancée." Face caméra, sur Instagram, le médiatique Dr Pelloux alerte sur les potentielles dérives de la création prochaine d'IPA aux urgences, signe selon lui de "l'ubérisation du monde médical" et de l'avènement d'une "médecine low cost".
"Au lieu d'avoir par exemple huit médecins urgentistes pour faire tourner une ligne de garde H24 dans un service d'urgence, on en mettra deux et les infirmières travailleront avec les fameux protocoles", illustre-t-il. "ça fait 35 ans que je fais ça, il n'y a pas un malade qui ressemble à un autre, c'est super compliqué", souligne-t-il. "Ils sont juste entrain de casser la médecine d'urgence", déplore-t-il. "Le drame absolu, c'est que les quartiers riches, vous aurez des médecins, les quartiers pauvres, vous aurez des infirmiers protocolisés de pratique avancée", achève-il, après avoir dénoncé pêle-mêle la casse du service public, le numerus clausus, mais aussi le maintien de la liberté d'installation. De quoi parle-t-il exactement ? Dans son communiqué du 25 novembre, l'Amuf évoque la reprise de négociations sur la mise en place des IPA aux urgences, mesure issue du Pacte de refondation aux urgences de septembre 2019. Suspendues au printemps avec la crise du Covid, les discussions ont bel et bien reprises, confirme Julie Devictor, présidente de la CNP des infirmiers en pratique avancée. Mais pour le reste, la soignante s'inscrit en faux contre les propos de Patrick Pelloux "Ce n'est pas quelque chose qui se fait dans l'urgence, souligne-t-elle à Egora. Les discussions ont commencé en 2018, puis après l'annonce de la création d'IPA aux urgences en 2019, des groupes de travail ont été constitués." Objectif : établir un référentiel d'activités en janvier, afin de former les premières IPA à la rentrée 2021. Les discussions avec les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur n'écartent pas les médecins : la CNP des médecins urgentistes est représentée, tout comme celles des IPA et des infirmières de soins généraux, détaille Julie Devictor. Dénonçant les "contre-vérités" du Dr Pelloux, qui "mélange tout" (profession intermédiaire, IPA, protocole de coopération), la présidente du CNP IPA assure qu'il n'est pas question de "remplacer" les médecins, ni les infirmières d'accueil et d'orientation, mais d'apporter "une plus-value, une complémentarité à ce qui existe déjà". Comme les IPA en cours de formation en néphrologie, oncologie et pathologies chroniques en soins primaires, les IPA d'urgences pourront logiquement prescrire. Elles souhaitent également pouvoir poser des diagnostics, dans certaines situations, pour des "cas simples". "Mais c'est en cours de discussion", insiste-t-elle. Enfin, pas question pour Julie Devictor d'enfermer l'IPA d'urgence dans les quatre murs du service hospitalier. La CNP des IPA souhaite aussi qu'elle puisse intervenir en soins primaires. Alors que rien n'est acté, Julie Devictor regrette amèrement l'intervention de Partrick Pelloux. "Il fait beaucoup de mal en disant que les riches seront soignés par un médecin et les pauvres par une infirmière. Il faudrait qu'il pèse ses mots", juge-t-elle.
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