Nash : des avancées thérapeutiques attendues

27/12/2022 Par Didier Rodde
Hépato-gastro-entérologie
Les médecins généralistes peuvent largement concourir au dépistage de cette pathologie dont les conséquences à terme peuvent être très sévères. Interview du Pr Lawrence Serfaty, hépato-gastroentérologue qui dirige la plateforme NASH au sein de du Nouvel Hôpital Civil à Strasbourg (Hôpitaux Universitaires de Strasbourg).

  Egora : Quel est l’enjeu du diagnostic de Nash ? Pr Lawrence Serfaty : La Nash, ou stéatohépatite non alcoolique, est actuellement plutôt un diagnostic d’élimination, concernant des patients ayant une stéatose hépatique associée à un ou plusieurs facteurs de risque métaboliques, sans consommation excessive d’alcool ni hépatite virale chronique. Tout l’enjeu devant une stéatose est de déterminer s’il s’agit d’une stéatose simple, avec un pronostic plutôt bon à moyen terme ou une stéatohépatite qui expose à un risque d’évolution délétère. La sévérité, quant à elle, dépend du temps d’exposition (âge, mais une Nash peut aussi commencer très jeune), de l’importance des facteurs de risque métaboliques (notamment le diabète de type 2) et du polymorphisme génétique. La morbi-mortalité est liée à la fibrose. La première cause de décès est cardiovasculaire (40%), puis viennent le cancer (20%), la maladie rénale (10%) et le foie (cirrhose, cancer ; 5%).   Que sait-on de son épidémiologie ? Grâce à la cohorte française Constances, dans laquelle sont mis à profit ders marqueurs indirects de fibrose (le diagnostic formel de Nash exige une biopsie du foie), on estime à environ 8 millions le nombre de personnes présentant une stéatose en France ; dont 220 000 ayant une Nash avec une fibrose avancée, voire au stade de la cirrhose, dont l’état justifierait un traitement.   Comment le médecin généraliste peut-il aider au dépistage? D’abord en sachant y penser devant des facteurs évocateurs, comme une obésité (80% des obèses ont une stéatose), un diabète de type 2 (60%), un syndrome métabolique avec hypertension artérielle et/ou une hypercholestérolémie ou encore une cytolyse inexpliquée. Mais attention, la Nash est une pathologie très hétérogène, avec des phénotypes différents (si certains patients sont certes obèses et diabétiques, d’autres minces et non diabétiques ont pourtant une Nash sévère). Un premier tri des patients peut mettre à profit le score FIB 4 qui intègre l’âge du patient, son taux de plaquettes et celui de ses transaminases. Un score inférieur à 1,3 (70% des patients) a une bonne valeur prédictive négative, avec un risque faible. Un score entre 1,3 et 2,67 (environ 25% des patients) correspond à un risque intermédiaire – mais dont les sujets sont déjà exposés à un risque de maladie avancée - tandis qu’au-delà se situent les 5% les plus à risque.   Quelles sont les bases actuelles de la prise en charge ? La perte de poids a fait la preuve de son efficacité. Une... perte de 10% entraîne une régression de la stéatohépatite et une amélioration de la fibrose chez une majorité de patients. Mais peu de patients y parviennent. Dans une cohorte à Lille, la chirurgie bariatrique a montré une efficacité très élevée avec une régression de la Nash chez 80% des patients, une amélioration de la fibrose chez un tiers et même des régressions de cirrhose. Bien sûr, il est essentiel aussi de contrôler au mieux les comorbidités éventuellement présentes. Depuis le retrait des glitazones, nous ne disposons plus, pour l’instant, de traitements pharmacologiques. Néanmoins, de nombreuses études – mais pas d’essais cliniques proprement dits – ont objectivé des effets favorables de la vitamine E (500 mg/j) sur l’inflammation, mais sans impact sur la stéatose et la fibrose. A signaler un essai de phase 3 en cours avec le sémaglutide (un agoniste du GLP-1). La phase 2b a montré qu’un patient sur deux avait une amélioration histologique au bout de 72 semaines.   Quels progrès identifiez-vous à court et moyen terme ? Une centaine de molécules étant en cours d’évaluation, il y a de grandes probabilités que certaines soient bientôt mises à disposition. Des cibles très différentes sont explorées, parmi lesquelles des inhibiteurs de gènes (ARN interférents), des inhibiteurs de la lipogénèse, des anti-inflammatoires, des anti-fibrosants. Une dizaine de phase 3 est en cours, dont un agoniste FXR (acide obéticholique), un agoniste des récepteurs thyroïdiens hépatiques (Resmetiron) et un agoniste pan PPAR (lanifibranor). A plus longue échéance, il faudrait arriver à pouvoir se passer de biopsies hépatiques. Une autre problématique sera de pouvoir développer des combinaisons thérapeutiques afin de répondre à l’hétérogénéité de la Nash. Enfin, un enjeu important pour l’avenir sera, selon moi, de contrôler les facteurs métaboliques chez les enfants.   *Le Pr Serfaty déclare avoir des liens d’intérêt avec : BMS, GILEAD, NOVONORDISK, PFIZER

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