Journées européennes de la SFC : repérer les fibrillations atriales asymptomatiques

06/02/2018 Par Corinne Tutin
Cardio-vasculaire HTA

Des études viennent de confirmer l’intérêt d’un repérage précoce ainsi que les effets bénéfiques d’un traitement par ablation ou par occlusion de l’auricule gauche.

L’intérêt actuel accru pour les fibrillations atriales (FA) asymptomatiques est justifié par les données épidémiologiques. "30% des AVC ischémiques (85 % des AVC) sont en effet en rapport avec une FA. Et, la survenue de cet événement cérébrovasculaire est inaugural, dans 25 à 40 % des FA", a rappelé le Dr Jean-Marc Sellal (Hôpitaux Brabois de Nancy). La nouveauté est que, comme l’a précisé le Pr Eloi Marijon (Hôpital européen Georges Pompidou, Paris), on dispose aujourd’hui de nombreux dispositifs non invasifs d’enregistrement du rythme cardiaque (patchs, holters sous-cutanés) pour repérer ces FA asymptomatiques. Récemment, une étude prospective entreprise chez plus de 400 patients a d’ailleurs montré que l’enregistreur sous-cutané miniaturisé Reveal Linq peut être mis en place (sous anesthésie locale), dans les mêmes conditions de sécurité, en cabinet cardiologique de ville ou à l’hôpital, le taux d’événements secondaires étant faible et de l’ordre de 2,5 % à 4,4 % (1). L’étude prospective Reveal-AF (2), ayant inclus 446 patients porteurs de FA avec un score de risque embolique CHADS2 égal ou supérieur à 2, a détecté la présence d’un épisode de FA durant 6 minutes ou plus chez 29,3 % de ces malades sur une période de 18 mois, "ce qui est un chiffre élevé", a estimé le Pr Marijon.  "La difficulté est que si on suspecte que le niveau du score CHADS2 et la durée des épisodes de FA influencent le risque d’AVC, il n’existe pas encore de recommandations formelles pour proposer une anti-coagulation à ces patients", a expliqué ce cardiologue.   Fermeture de l’auricule gauche ou ablation des veines pulmonaires   Les cardiologues s’intéressent aussi aux traitements non pharmacologiques de la FA, comme l’ablation des veines pulmonaires ou, chez les patients ne pouvant être anti-coagulés, la fermeture de l’auricule gauche. L’étude Castle AF, qui a été présentée en avant-première par le Dr Nassir Marrouche (Hôpital universitaire de l’Utah, Salt Lake City) fin août 2017, lors du congrès de la Société européenne de cardiologie, a rapporté une mortalité cardiovasculaire abaissée de près de moitié en 5 ans après ablation chez des malades présentant une FA associée à une insuffisance cardiaque à FE abaissée. Ces données pourraient plaider pour une plus grande utilisation de ce traitement, car cette association pathologique est fréquente. "Mais, elles devront être confirmées, car l’essai demeure toujours non publié", a insisté le Dr Sellal. Les cardiologues français viennent, de plus, de proposer à partir de la série de 2506 patients avec une FA de l’étude Extralucid-d, un nouveau score ATE (pour Atrial Thrombus Exclusion score) qui permet de mieux évaluer le risque de thrombus atrial, "lequel persiste sous traitement anticoagulant, et contre-indique formellement la pratique d’une ablation", a expliqué le Dr Antoine Milhem (Hôpital Saint-Louis, La Rochelle). Le score ATE prend en compte les résultats des D-dimères, avec une valeur seuil de 270 ng/ml, les antécédents d’hypertension artérielle, d’insuffisance cardiaque et d’accident vasculaire cérébral ischémique (score allant de 0 à 4 ; 1 point par critère). Pour un score de 0, la valeur prédictive négative est de 100 % et les patients n’ont donc pas besoin de subir une échographie transœsophagienne pour repérer un thrombus atrial, "un examen parfois désagréable pour les patients". Ceci pourrait permettre d’éviter de pratiquer cet examen chez plus d’un patient sur trois. "Une étude européenne va débuter en 2018 pour confirmer les performances du score ATE sur 3000 patients", a indiqué le Dr Milhem. L’étude de registre Ewolution a, par ailleurs, confirmé sur une série de 1025 patients, et après un an de suivi, l’intérêt du dispositif d’occlusion de l’auricule gauche Watchman, "qui est réservé en France aux malades atteints de FA non valvulaire avec une contre-indication permanente aux anticoagulants oraux et présentant un score CHA2DS2-VASC (une version actualisée du score CHADS2) d’au moins 4", a rappelé le Dr Sellal. Le taux d’implantation du dispositif a été de 98,5 %, et un thrombus à son niveau n’a été constaté que dans 3,7 % des cas. Le taux d’AVC ischémique a été de 1,1 %, celui des hémorragies majeures de 2,6 % et la mortalité à 1 an (9,8 %) correspond, pour les auteurs, L. V. Boersma et al., à ce qui est habituellement observé chez des sujets de cet âge (73,4 ans en moyenne) (3). Une méta-analyse des études Prevail et Protect AF (4343 patients-années) a également mis en évidence une différence statistiquement non significative après 5 ans entre occlusion par dispositif Watchman et warfarine en termes de prévention des AVC ischémiques, avec un nombre d’hémorragies majeures inférieur en cas d’occlusion (4).

  1. Rogers JD, et al. Heart Rhythm 2017 ; 14 : 218-224.
  2. Reiffel JA, et al. JAMA Cardiol 2017 ; 2 : 1120-1127. 
  3. Boersma LV, et al. Heart Rhythm 2017 ; 14 : 1302-1308.
  4. Reddy VY, et al. J Am Coll Cardiol 2017 ; 70 : 2964-2975.

   

Défibrillateurs : les drones à la rescousse
Ce n’est plus de la science-fiction: “les drones peuvent transporter à distance des défibrillateurs externes”, a signalé le Dr Jean-Philiippe Empana (Inserm-USMR-S970, Paris). Et, ils arrivent, sur “leur lieu de travail”, situé à environ 3,2 kilomètres de distance, en 5,21 minutes seulement contre 22 minutes pour l’équipe d’urgence, ainsi que vient de le montrer une équipe suédoise, qui a expérimenté 18 vols de drones équipés de défibrillateurs au Nord de Stockholm*. Seize minutes de difference précieuses, lorsqu’on sait que le taux de survie actuel d’un arrêt cardiaque est de moins de 10 %.
*Claesson A, et al. JAMA, 2017; 317: 2332-2334.

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