Les syndicats médicaux et la CNAM se sont réunis ce jeudi 18 janvier pour rédiger un avenant sur la télémédecine. Cette réunion a essentiellement permis de tracer le périmètre du terrain de jeu et exclure pour l'instant, le sort de la téléexpertise, en voie d'exploration par la Haute autorité de santé. Les négociateurs ont prévu de se retrouver tous les 15 jours, jusqu'à la fin du premier trimestre.
Dans un document de cadrage qu'Egora a pu consulter, reprenant les orientations données par la ministre de la Santé et celles votées par le conseil de l'Uncam (Union des caisses d'assurance maladie), la Cnam rappelle les axes de la discussion : 1) Définir le champ de l'acte de téléconsultation, ses modalités de prise en charge et de réalisation. 2) Permettre la prise en charge et le déploiement de la télémédecine. Enfin, 3) permettre de lever les freins et les contraintes et définir un accompagnement et une organisation adaptés pour assurer le déploiement de la télémédecine.
Il n'est pas encore temps de parler de télé expertise
Mais, le directeur l'a annoncé d'emblée, il n'est pas encore temps de parler de télé expertise, qui s'applique aux cas complexes, dont les contours justifient d'une exploration, en cours à la Haute autorité de santé. Celle-ci interviendra au fil de l'eau car le travail est considérable. Ce dont on parle maintenant, c'est le la téléconsultation, soit une consultation à distance entre un médecin et un patient, ce dernier pouvant être assisté par un autre professionnel de santé, qui ne sera pas forcément un médecin. Il pourra par exemple consulter dans un local aménagé en vidéotransmission sécurisée, à proximité d'une Maison de santé pluriprofessionnelle ou d'une pharmacie, dès lors que cette installation garantit sécurité et confidentialité. Le contraire eut été étonnant : pour cette révolution, le conseil de l'Uncam a été modeste puisqu'il propose de débuter auprès de deux publics prioritaires : les patients en ALD (ou atteints de maladies rares) et ceux résidant dans des zones en difficulté démographique. Le tout inscrit dans le cadre du parcours de soin, c’est-à-dire avec adressage par le médecin traitant "et pouvant s'articuler avec les nouvelles organisations territoriales de soins". Ces téléconsultations seraient ouvertes à toutes les spécialités (à l'exclusion du champ des consultations complexes et très complexes, qui nécessitent un examen clinique). Mais il faut au préalable définir dans quelles situations le patient doit être accompagné par un professionnel de santé. Et comment rémunérer cette personne.
Les cordons de la bourse
S'agissant de rémunération, la CNAM tient bien serré les cordons de la bourse. Elle pose que le prix de la téléconsultation (TLC) du médecin requis "ne pourra être supérieur à celui d'une consultation présentielle, soit C ou CS + majorations prévues par la nomenclature". Elle refuse pour l'instant de se prononcer sur la cotation d'une majoration consultation complexe ou très complexe ou d'un APC (ex 2 C consultant), car ces actes nécessitent une examen clinique approfondi en présence du patient. Pour le médecin requérant, à condition qu'il accompagne le patient : C + majoration télémédecine (TLM). La question est ouverte s'il s'agit d'un autre professionnel de santé. La CNAM est également ouverte pour une aide financière à l'équipement, dans le cadre du forfait structure. Et c'est là que les chemins divergent entre la CNAM et les syndicats médicaux. Car ils ne l'entendent pas de cette oreille. La FMF, qui se dit prête à engager sa centrale dans le processus, demande que le médecin traitant et celui consulté à distance, soient au minimum rémunérés chacun "une fois et demie le tarif de base". Et la CSMF rappelle qu'elle ne signera rien pour un acte sous-rémunéré, tout en constatant "des points d'accord qui devraient nous permettre d'arriver à construire quelque chose". Quant à MG France, son exigence est que les médecins traitants soient honorés à la même hauteur que les autres spécialistes. Les dents sont longues s'agissant de l'aide à l'équipement et la formation. Jean-Paul Ortiz, le président de la CSMF, l'imagine autour de 1 000 euros par mois. Alors que du côté de la FMF, on rappelle les données du parcours de soins et les conditions dans lesquelles le médecin expert peut côter APC, ex C2. Et le coût "très onéreux" de la location du matériel. "Nous demandons 1,5 C pour chacun, si les deux médecins sont présents", a martelé Jean-Paul Hamon, le président de la FMF, en rappelant que les ARS ont versé jusqu'à 28 000 euros par an aux Ehpad pour qu'ils s'équipent en télémédecine.
La négociation ne fait que commencer
S'agissant de la télé expertise, qui ne fait pas partie des discussions immédiates, la CNAM affirme que la rémunération (à l'acte ou par forfait, en cas de suivi dans la durée), doive être "nécessairement inférieur au tarif de d'une consultation". En outre, la rémunération du requérant, ne pourra intervenir "de manière systématique", et devra être différenciée, selon que l'acte est pratiqué en différé, ou de manière synchrone. Un dernier point, on s'en doute, qui ne convient pas du tout aux syndicats médicaux, qui exigent des tarifs de consultations complexes ou très complexes pour les experts sollicités. On le voit, la négociation ne fait que commencer.
La télémédecine s'est enfin engagée sur la voie royale du droit commun et est en train de quitter les zones expérimentales dans lesquelles elle végétait jusqu'alors dans des expérimentations régionales financée par le FIR (Fond action régionale), ou par l'assurance maladie. Tel fut le cas de la prise en charge du dépistage de la rétinopathie diabétique et des actes réalisés par des médecins libéraux pour les patients résidant en Ehpad (avenant N° 2 à la convention médicale). Ils peuvent avoir lieu soit à l'occasion du changement de médecin traitant du patient (télé expertise ou TDT), soit en urgence, entre l'Ehpad et le médecin traitant (TTE).
Volonté politique et véhicule législatif ad hoc aidant, il s'agit maintenant de faire entrer la télémédecine dans la pratique de tous les jours, pour qu'elle puisse irriguer les déserts médicaux et permettre des innovations organisationnelles autour de l'exercice collectif, la voie de demain.
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