Certification périodique : on en sait plus sur les actions qui seront validantes pour les médecins généralistes
Officiellement entrée en vigueur au 1er janvier 2023, la procédure de certification périodique – obligatoire pour les sept professions de santé à ordre – a pris beaucoup de retard. De nombreux flous subsistent, tant sur la forme que sur le fond : quelles seront les actions de formation qui seront validantes ? Comment s'effectuera le contrôle ? Quelle sera l'articulation avec l'obligation de DPC ? Une table ronde était organisée, ce vendredi 22 mars, au congrès du Collège de médecine générale (CMGF) pour tenter de répondre à ces interrogations, sources de craintes pour les médecins libéraux.
Depuis le 1er janvier 2023, tous les professionnels de santé qui disposent d'un ordre (pharmaciens, masseurs-kinésithérapeutes, infirmières, médecins, pédicures-podologues, sages-femmes, chirurgiens-dentistes) doivent se plier à une nouvelle obligation de formation : la certification périodique. Cette procédure "vise à garantir le maintien des compétences et des connaissances des professionnels de santé dans un système en évolution", a rappelé Marie-Laure Bellengier, cheffe de projet certification périodique à la Direction générale de l'offre de soins (DGOS), ce vendredi, au congrès du Collège de médecine générale. Une conférence était organisée à cette occasion pour lever les inquiétudes autour de ce dispositif qui, bien qu'officiellement entré en vigueur, a pris un retard considérable. En effet, à ce jour, ni les référentiels, censés cadrer pour chaque profession et spécialité les actions éligibles à la certification, ni les comptes individuels, sur lesquels les soignants (libéraux et salariés) pourront tracer l'ensemble des actions qu'ils ont menées, ne sont prêts.
Bases de cette certification périodique, les référentiels sont en cours d'élaboration par les conseils nationaux professionnels (CNP). Ils ont vocation à être une sorte de "menu" dans lequel les professionnels de santé pourront piocher pour élaborer leur programme individuel d'actions afin de valider leur certification, a expliqué le Dr Olivier Goëau Brissonniere, président de la Fédération des spécialités médicales (FSPM), qui regroupe les CNP des spécialités hors médecine générale. Ce "menu" sera divisé en quatre blocs, qui constituent le socle de la certification périodique : l'amélioration des connaissances et des compétences ; le renforcement de la qualité des pratiques ; l'amélioration de la relation avec les patients ; et une meilleure prise en compte de sa propre santé. "A priori on part sur deux actions [à valider] par bloc, c'est ce qui est dans les tuyaux", a précisé le Pr Paul Frappé, président du CMG.
Un décret d'application "précisant le contenu des actions éligibles à la certification (actions de DPC, de formation continue, actions menées dans le cadre d'une procédure d'accréditation des spécialités à risque, mais également d'autres actions d'exercice coordonné, de propositions de démarche qualité)" doit paraître "dans les prochains" jours, a indiqué Marie-Laure Bellengier.
Le contenu des quatre blocs
Si certains n'ont pas encore rendu leur copie, le CNP de médecine générale a déjà transmis son référentiel aux autorités. Ce dernier est en cours de validation par la DGOS. "Si besoin, il est prévu que la Haute Autorité de santé puisse donner un avis pour compléter le référentiel, sinon [ce dernier] pourra faire l'objet d'un arrêt ministériel qui le rend opposable", a expliqué Marie-Laure Bellengier. Lors de la conférence, ce vendredi, Paul Frappé a présenté une version "officieuse" du référentiel médecine générale, qui, bien qu'encore soumis à validation, ne devrait "pas changer du tout au tout". Ce référentiel liste de façon non-exhaustive les actions qui devraient être éligibles, mais le professionnel pourra solliciter le CNP afin de "labelliser" une action non présente dans la liste en vue de la rendre validante. "Ces référentiels devront être plastiques, s'enrichir petit à petit", a martelé le Pr Frappé, ajoutant qu'il faudra être "le plus cohérent possible". Ont d'ores et déjà été exclues toutes les actions relatives à des pratiques non conventionnelles (naturopathie, magnétisme, homéopathie…). Le CMG entend par ailleurs lancer un questionnaire d'auto-évaluation afin d'aider les généralistes à identifier leurs besoins de formation.
S'agissant du bloc 1 (connaissances et compétences), le CNP de médecine générale intègre les actions DPC ou FAF en lien avec la problématique, celles délivrées par des organismes reconnus, ou des formations certifiantes (DU, DIU, etc.). Devrait aussi pouvoir être considérée comme validante la participation à une journée, un colloque ou une conférence scientifique, ainsi qu'une rencontre institutionnelle. Tutorat, maîtrise de stage, revue bibliographique, journal club et test de lecture d'une revue médicale font également partie des actions éligibles listées par le CNP de médecine générale.
Pour le bloc 2 (qualité des pratiques), outre les actions DPC et FAF ciblées, le CNP a identifié d'autres actions. Par exemple, la participation à une réunion de concertation pluridisciplinaire, un audit clinique, la contribution à un registre, un groupe d'analyse de pratiques, la publication en 1er auteur, la participation à un comité éditorial ou à comité de lecture d'une revue.
Pour le bloc 3 (relation patients), le CNP intègre les actions DPC et FAF entrant dans ce champ ainsi que les actions proposées, là encore, par un organisme reconnu et les formations certifiantes. Un généraliste pourra également valider ce bloc s'il réalise une action avec une association de patients agréée ou à un groupe d'analyse de pratiques. Tout comme la contribution à un registre, observatoire et base de données et la participation à un dispositif d'annonce.
Enfin, s'agissant du bloc 4 (santé du médecin), le généraliste devra – au choix – déclarer un médecin traitant, remplir un questionnaire d'autoévaluation ou participer à des actions de formation en lien avec la santé physique, mentale et sociale ("santé financière", "préparation de carrière", etc.). "Les médecins ont le nez dans le guidon, ils travaillent souvent sans filet et le jour où ils ont besoin, ils se rendent compte qu'ils n'ont pas d'assurance et ça provoque des situations dramatiques", a observé Paul Frappé. Pratiquer du sport au moins une fois par semaine pourrait aussi contribuer à valider votre certification.
"L'idée n'est pas de coincer ou de faire de la sélection de médecins […] mais de reconnaître ce qui se fait déjà pour beaucoup d'entre vous", a ajouté le président du CMG. Malgré le retard au démarrage, "les actions de formation réalisées depuis le 1er janvier 2023 par les professionnels de santé pourront être prises en compte dans cette première période de certification qui, pour les professionnels de santé en exercice, est de neuf ans [et de six ans pour les nouveaux diplômés]", a annoncé Marie-Laure Bellangier.
L'enjeu sera ensuite d'harmoniser ce référentiel médecine générale avec ceux élaborés par les CNP des autres spécialités médicales. C'est le rôle de la commission professionnelle médecins, présidée par Paul Frappé, qui appartient au Conseil national de la certification périodique à la tête duquel vient d'être nommée une nouvelle présidente, Nadiège Baille, ce qui permettra la reprise des travaux – qui ont été mis en pause avec la nomination du précédent président Lionel Collet à la tête de la HAS. Une harmonie devra aussi être trouvée avec les autres professionnels de santé, dans un souci de cohérence. "On a échangé notamment avec les pharmaciens, qui sont aussi très avancés dans leur référentiel, a indiqué Paul Frappé. C'est important qu'on parle le même langage."
Les "rebelles" devront répondre devant l'Ordre
La conférence a également permis d'aborder la question du contrôle de cette certification, autre source d'inquiétudes chez les médecins. La loi prévoit que ce contrôle soit fait par les ordres, tout comme la validation des actions réalisées par le professionnel de santé. Un décret à paraître viendra d'ailleurs préciser les modalités d'application de ce contrôle. Invitée à s'exprimer lors de cette table ronde, la Dre Elisabeth Gormand, conseillère nationale de l'Ordre des médecins et présidente du CDOM 69, souhaite que l'instance puisse "entrer en contact avec un médecin" dès "la 4e ou la 5e année" de la période de certification en cas de difficultés. "On ne va pas attendre qu'un médecin ait un compte en rouge pour lui dire qu'on ne peut pas le certifier et qu'il va aller en chambre disciplinaire."
"On va sûrement rencontrer des situations particulières pour lesquelles les difficultés ne sont pas qu'au niveau de la certification [mais d'ordre personnel]." L'Ordre devra dès lors embrasser "sa mission d'accompagnement", sans attendre le dernier moment, en convoquant "une formation restreinte avec des experts de la spécialité [pour] voir ce qu'on peut proposer à un médecin en difficulté", a poursuivi Elisabeth Gormand. Objectif : "normaliser" toutes les situations et faire en sorte que personne ne reste "sur le bord de la route". Pour "les rebelles", a précisé la conseillère ordinale, "on sera obligés de les envoyer en chambre disciplinaire car la loi demande qu'il y ait une sanction". Mais "le but c'est, en amont, de travailler ensemble", a-t-elle martelé. Si toutefois procédure il y a, la conseillère a indiqué que le médecin pourra faire un recours. "Ce sera le recours habituel."
Une nouvelle "usine à gaz" ?
La création des comptes individuels de certification, qui seront hébergés et gérés au sein d'un téléservice en cours de développement par l'Agence du numérique en santé (ANS), a également été abordée. Un décret à ce sujet doit également paraître. L'objectif est de faire en sorte que les professionnels de santé aient le moins d'actions à faire, et leur permettre de voir facilement où ils en sont dans la réalisation de leur programme d'actions. Les professionnels de santé devront néanmoins "s'astreindre à enregistrer ce qu[ils] font [pour que les actions soient validantes], ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent", a précisé la Dre Elisabeth Gormand. "On ne pourra pas éviter l'action personnelle du médecin", a ajouté le Pr Frappé, répondant aux craintes d'une jeune généraliste sur l'émergence d'une "nouvelle usine à gaz". Mais "le but n'est pas de rajouter de la charge mentale aux médecins", a conclu le président du Collège de médecine générale.
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