Encadrement des centres de soins non programmés, ticket modérateur, tests Covid... Les députés amendent le PLFSS
La partie recettes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 a été approuvée ce lundi 4 novembre par les députés, grâce aux voix de la gauche. Le texte a été profondément remanié par rapport à la version initiale présentée début octobre par le Gouvernement. Les députés doivent finir d'examiner la partie dépenses ce mardi. Le point sur ce qui a été voté.
Contre toute attente, la partie recettes du PLFSS 2025 a reçu le feu vert de l'Assemblée nationale. Le texte, profondément remanié, a été adopté en première lecture, ce lundi 4 novembre, par 126 voix contre 98. Dix jours plus tôt, il avait essuyé un revers en commission des Affaires sociales de l'Assemblée, qui l'avait rejeté à l'unanimité.
Ce sont les députés de la gauche qui ont permis à la partie recettes d'être approuvée dans l'hémicycle, les députés macronistes et de droite ont, eux, voté contre, dénonçant un texte "dénaturé". Les élus du Rassemblement national se sont quant à eux abstenus, malgré les "dingueries fiscales" qui ont été "imposées" par la gauche, afin de pouvoir débattre des dépenses.
Le texte remanié prévoit entre 17 et 20 milliards d'euros de cotisations supplémentaires pour financer la Sécurité sociale. La gauche compte y parvenir en augmentant les cotisations sur les revenus du capital ou les dividendes. "La débâcle est complète pour le Gouvernement !, a réagi la députée LFI Clémence Guetté, qui présidait la séance. Nous avons transformé la partie recettes du budget de la Sécurité sociale au service de la redistribution et du partage des richesses."
La partie recettes ayant été approuvée, l'examen de la partie dépenses a pu démarrer lundi soir avec le vote de quelques amendements. Mais le temps est compté pour les députés. Les délais fixés par la Constitution imposent que l'examen du PLFSS s'achève ce mardi 5 novembre à minuit. Or, plus de 500 amendements attendent encore d'être débattus. S'ils n'en viennent pas à bout, le texte sera transmis au Sénat dans sa version déposée par le Gouvernement le 10 octobre, qui pourra être complétée d'amendements gouvernementaux.
Egora fait le point sur ce qui a déjà été voté par les députés.
Simplification du cumul emploi-retraite
Parmi les amendements votés dans la partie recettes du PLFSS, certains visent à simplifier le cumul emploi-retraite des médecins libéraux. L'un d'eux prévoit une exonération fiscale à 100% pour les médecins installés en zone sous-dotée qui, "en même temps qu'ils font valoir leur droit à la retraite", décident "de poursuivre leur activité en cumul emploi-retraite pendant un délai de cinq ans". L'exonération doit courir pendant toute la durée de ces cinq ans.
Les députés ont également voté un amendement qui permet plus largement aux médecins libéraux en cumul emploi-retraite de bénéficier du régime simplifié des professions médicales. Un régime qui est "réservé à des activités limitativement énumérées" et est "plafonné à des niveaux de rémunération assez réduits" – 19 000 euros par an. Ainsi, seuls 7% des médecins en cumul-emploi y sont éligibles. L'amendement prévoit que cette évolution soit mise en place progressivement entre 2025 et 2026.
Il a également été voté un élargissement des dispositifs d'exonération de cotisations pour les médecins en cumul emploi-retraite aux praticiens exerçant en centres de santé à but non lucratifs.
Suppression de la hausse du ticket modérateur
Dans la partie dépenses, les députés ont souhaité mettre un coup d'arrêt à la hausse du ticket modérateur pour les consultations chez le médecin et la sage-femme. Le Gouvernement comptait, par ce biais, dégager 1,1 milliard d'euros d'économies par un transfert de charges vers les complémentaires santé. Les syndicats de médecins s'étaient inquiétés de cette "dérive", qui remet en cause selon eux l'existence même de la Sécurité sociale.
"Alors que l'accès aux soins est toujours difficile, avec notamment la désertification médicale qui progresse, cette mesure serait un nouveau coup porté à la santé de la population", ont jugé les députés à l'origine de cet amendement, soulignant que 3 millions de Français n’ont pas d’assurance maladie complémentaire.
Non à la baisse unilatérale des tarifs des biologistes et radiologues
Plusieurs amendements suppriment, en outre, le très controversé article 15 du PLFSS, qui autorisait l'Assurance maladie à baisser de façon unilatérale les tarifs des forfaits techniques et des actes des biologistes et des radiologues en l'absence d'accord conclu au 30 avril 2025, "permettant de réaliser 300 millions d'euros d'économies entre 2025 et 2027".
"Il est injuste de vouloir faire payer ceux qui réalisent des actes qu’ils ne prescrivent pas et qui correspondent aux besoins de la population suite au vieillissement et à la prévalence croissante des maladies chroniques", soutiennent les députés du groupe Liot Stéphane Lenormand et Max Mathiasin, dans leur amendement, travaillé avec le Mouvement intersyndical des biologistes médicaux.
Suppression de l'élargissement du dispositif d'accompagnement à la prescription
Les députés ont également supprimé l'article 16 du PLFSS, qui prévoyait d'étendre le dispositif d'accompagnement à la prescription, instauré par la précédente loi de financement de la Sécu. Cet article visait à contraindre les médecins à motiver, en remplissant un formulaire spécifique, leurs prescriptions d'analyses biologiques, d'imagerie médicale et de transports sanitaires, afin qu'elles soient prises en charge par l'Assurance maladie.
Ces dispositions font "peser sur les patients le risque d'une non prise en charge par la Sécurité de soins prescrits, ce qui ne peut que nourrir le renoncement aux soins ou le retard de prise en charge de certains besoins", peut-on lire dans l'un des multiples amendements de suppression déposés. Elles "contribuent par ailleurs à renforcer la surcharge administrative des médecins, à l'heure où l'urgence est de dégager du temps médical disponible", pointe un autre amendement.
La France insoumise et le Nouveau Front populaire ont quant à eux taclé une mesure "absurde" et "nuisible".
Encadrement des centres de soins non programmés
Les députés ont également souhaité reconnaître et encadrer les structures de soins non programmés qui "se sont développées ces dernières années sur un modèle de cabinets médicaux accessibles sans rendez-vous" et sont parfois implantées "au détriment de l’accès à un médecin traitant pour les assurés du territoire" ou puisent "dans les ressources des services d’urgences alors même que ces derniers peinent à recruter".
Un amendement veut leur réserver le bénéfice de certains financements, à condition que ces centres respectent "un cahier des charges régulant leur organisation et leurs modes de fonctionnement, sur la base de critères préétablis (horaires d’ouverture, pratique du tiers payant…)".
Pérenniser la possibilité pour les infirmières de rédiger des certificats de décès
Alors qu'au moins 3 000 certificats de décès ont été rédigés par les infirmières depuis le lancement de l'expérimentation en janvier 2024 - avril 2024, pour ce qui est de l'expérimentation nationale, les députés ont souhaité aller plus loin et pérenniser cette mesure. Une demande formulée par l'Ordre infirmier, qui précise que cette expérimentation doit prendre fin en avril prochain et qu'il y a, de fait, urgence.
Vers un mécanisme d'indexation du tarif des actes infirmiers sur l'inflation ?
Si le budget de la Sécu pour 2025 doit financer la hausse du tarif de la consultation de base des médecins à 30 euros, les députés ont demandé un rapport sur la prise en compte de l'inflation dans l’augmentation des tarifs des actes des infirmières. Il devra étudier l'opportunité d'un "mécanisme d'indexation automatique du tarif des actes infirmiers sur l'inflation ainsi que des pistes de financement de cette mesure", indique un amendement, travaillé avec le collectif des Infirmiers libéraux en colère.
Fin de la prise en charge des tests Covid sans prescription
Quatre ans et demi après le début de l'épidémie de Covid sur notre sol, les députés ont également approuvé un amendement visant à supprimer la prise en charge par l'Assurance maladie des tests de dépistage et de détection du Covid réalisés sans prescription médicale.
Une taxe sur les publicités de prothèses auditives
Pour générer des recettes, les députés ont proposé d'instaurer une nouvelle taxe sur la publicité pour les prothèses auditives. La mesure doit prévenir "les dérives commerciales et publicitaires agressives qui progressent" depuis la mise en place de la réforme du 100% Santé, dont le succès "n'est plus à démontrer".
Rendre obligatoire l'affichage du Nutri-Score
Côté santé publique, les députés ont souhaité rendre obligatoire l'affichage du Nutri-Score sur les denrées alimentaires et dans les publicités de ces produits. "Une récente étude confirme que la consommation d'aliments présentant un mauvais Nutri-Score est directement associée à un risque accru de maladies cardiovasculaires, notamment les infarctus et les AVC", écrit le député Modem et médecin Cyrille Isaac-Sibille, à l'origine de cet amendement.
Une taxe sur les sucres ajoutés
Les députés ont aussi voté une taxe sur les sucres ajoutés dans les produits alimentaires transformés. Une mesure qui "a pour objectif de pousser les industriels à changer leurs recettes et à tendre vers des produits moins sucrés". Cette taxe serait "proportionnelle à la teneur en sucre" de ces produits.
Si ces mesures ont été approuvées par les députés, le Gouvernement peut toujours décider de recourir à l'article 49.3 de la Constitution pour faire adopter sa version du texte sans vote.
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