Un médecin, même remplaçant, doit-il établir un dossier médical pour chaque patient ?

19/12/2022
Comme vient de le rappeler un arrêt de la Cour de Cassation du 26 octobre 2022, un médecin, même remplaçant, doit établir, pour chaque patient qui le consulte, une fiche d’observation qui lui est personnelle et qui comporte les éléments actualisés, nécessaires aux décisions diagnostiques et thérapeutiques. 

 

Cette disposition est prévue par l’article R.4127-45 du Code de la santé publique. Comme le rappelle l’Ordre dans ses commentaires de cet article, "pour le suivi de chaque patient, le médecin élabore un dossier professionnel ou fiche d’observation dont la rédaction n’est soumise à aucun formalisme. Il comporte des éléments objectifs cliniques et paracliniques nécessaires aux décisions diagnostiques et thérapeutiques…". Si ce document appartient au médecin qui l’a établi et peut être informatisé, un patient peut avoir accès aux informations qu’il contient. Le médecin doit donc protéger ses dossiers ou ses fiches d’observation contre toute indiscrétion, dans des conditions permettant d’assurer leur confidentialité et leur pérennité.

Si aucun texte ne fixe la durée de conservation de ces dossiers, il est conseillé, pour un médecin exerçant à titre libéral, de les conserver pendant la durée correspondant à la prescription des actions en responsabilité : cette prescription est aujourd’hui de 10 ans à compter de la consolidation du dommage. Une notion imprécise qui ne correspond pas à la réalisation du dommage : dans ces conditions, il peut être prudent de conserver ses dossiers pour une durée beaucoup plus longue : 30 ans, voire 48 ans lorsqu’il s’agit d’un patient mineur. La fiche d’observation ou le dossier médical est non seulement un outil de gestion pour un médecin mais également un outil juridique en cas de mise en cause de sa responsabilité. Il permettra de se justifier, par la fréquence et la qualité du suivi de son patient, par les informations et les prescriptions administrées. 

 

Historique du suivi médical 

Dans l’affaire jugée par la Cour de Cassation le 26 octobre dernier, un dermatologue remplaçant était mis en cause pour avoir pratiqué un peeling du visage sur une patiente qui invoquait avoir présenté, à la suite de cet acte, des sensations de brûlures et des lésions. Cette patiente reprochait notamment à ce remplaçant de ne pas avoir constitué un dossier la concernant et donc de ne pas lui avoir communiqué. Dans sa décision, la Cour de Cassation, après avoir rappelé que l’article R.4127-45 du Code de la santé publique s’appliquait aussi aux remplaçants, a tenu à préciser que le remplaçant mis en cause n’avait pas commis de faute car il avait consigné dans le dossier médical, tenu par le dermatologue remplacé, les informations essentielles relatives au suivi de cette patiente, sous la forme d’une lettre relatant l’historique du suivi médical ainsi que les ordonnances établies et reconstituant ainsi l’intégralité de son parcours thérapeutique.

Nicolas Loubry, juriste 
 
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