Le Collège de la Haute Autorité de santé (HAS) a rendu publique une lettre ouverte le 31 mars dans laquelle il alerte sur l’état déplorable du système de santé, et appelle à mettre en place des réponses urgentes pour redresser le navire. Alerté sur le naufrage du système de santé, le Collège de la HAS a adressé ce jeudi une lettre ouverte "à tous ceux qui ont à cœur de se mobiliser pour une meilleure qualité des soins et des accompagnements". "Les professionnels, notamment de l’hôpital public et des établissements sociaux et médico-sociaux, nous alertent sur leur incapacité à délivrer des soins ou des accompagnements de qualité", écrit-il. De fait, l’instance créée en 2004 déplore que "les recommandations de bonne pratique professionnelles et organisationnelles […] se heurte régulièrement à la question de leur applicabilité". Face à l’urgence, le Collège de la HAS a tenu à lancer une bouteille à la mer. Il soulève d’abord le problème des pénuries de personnel qui "s’accentuent" dans les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, avec, entre autres, 5 à 10% des postes d’infirmières vacants. "Plus d’un tiers des postes de praticiens hospitaliers ne sont pas pourvus à l’hôpital public et un tiers des Ehpad n’ont pas de médecin coordinateur", note également le Collège. Conséquence évidente de ces pénuries, la qualité des soins et des accompagnements se trouve largement compromise. Même chose en ville, du fait de l’inégale répartition des soignants sur le territoire, engendrant des difficultés d’accès aux soins.
Le Collège de la HAS cible ensuite l’organisation du système de santé et les modes de financement. "Le fonctionnement du système de santé ne garantit pas toujours la pertinence et la qualité des soins. Certains patients ne reçoivent pas tous les soins nécessaires. […] Seulement une minorité des parcours de soins des patients atteints de BPCO sont conformes aux recommandations pour la prise en charge de cette pathologie." "À l’opposé, les diagnostics et traitements non pertinents ne sont pas rares", ajoute le Collège, qui indique par exemple que "deux tiers des thyroïdectomies sont réalisées sans cytoponction préalable et ont conduit à une supplémentation en hormones thyroïdiennes chez plus de la moitié des patients opérés pour un nodule bénin". Des difficultés qui, selon le Collège de la Haute Autorité de santé, ont de "multiples causes" : manque de coopération et de coordination entre la ville et l’hôpital notamment, "mais aussi les modes de financement qui rémunèrent l’activité plutôt que la qualité ou la pertinence des soins". Le Collège appelle de fait à mettre en place des mesures au plus vite, "nécessaires au maintien et à l’amélioration de la qualité de ces soins et accompagnements". Il détaille ces mesures dans son texte, adopté par consensus par Isabelle Adenot, Élisabeth Bouvet, Pierre Cochat, Catherine Geindre, Cédric Grouchka, Valérie Paris, Christian Saout et Dominique Le Guludec, nommée fin mars en tant que directrice générale de l’instance. Elargir les compétences des paramédicaux, renforcer les ARS, consolider la PDSA En priorité, la HAS invite à rendre les métiers du social et du médico-social plus attractifs, en poursuivant entre autres les efforts en termes de rémunérations engagés lors du Ségur de la santé, avec une attention particulière sur les infirmières et aides-soignantes. Il plaide pour une meilleure utilisation des ressources humaines, "en faisant intervenir chaque professionnel là où sa plus-value est optimale". Cela passe par un élargissement des compétences des paramédicaux "et une reconnaissance des nouveaux rôles". Il soutient l’intégration des infirmières en pratique avancée dans de nouveaux domaines, dont la gériatrie. Les assistants médicaux doivent continuer à être déployés. Pour délivrer des soins de qualité, la Haute Autorité de santé soutient le "renforcement des formations actuelles, initiale et continue, ainsi que de la possibilité d’évaluer leurs pratiques de façon simple et efficiente". "Ceci suppose la mise au point d’indicateurs de pertinence et de qualité des soins et des parcours, le suivi de ces indicateurs à partir des bases de données et le retour aux professionnels, aux établissements et aux décideurs." Autres mesures défendues dans sa lettre : le renforcement des moyens des ARS, la consolidation de la permanence des soins sur les territoires, le développement de la téléconsultation – notamment la création d’espaces dédiés dans des pharmacies ou Ehpad, la création de nouvelles antennes Smur… "Au sein des services d’urgence hospitaliers, une consultation de médecine générale pourrait prendre en charge les 10 à 20 % de personnes venant aux urgences et qui n’ont finalement pas besoin d’examens d’imagerie ou de biologie. Le déploiement de gestionnaires de lits pourrait aussi être envisagé." Comme certains candidats à l’élection présidentielle, le Collège de la HAS appelle à donner plus d’autonomie aux chefs de service et de pôle dans les hôpitaux, mais aussi à la mise en place de partenariats usagers, professionnels de santé et établissements. "Les modes de financement des professionnels et établissements nécessitent une attention particulière et des ajustements réguliers pour corriger au plus vite les incitations ayant un effet délétère sur la pertinence et la qualité des soins", ajoute-il. Et la santé publique et la prévention doivent attirer davantage l’attention des pouvoirs publics.
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