La « prise de conscience » a été « tardive » puisque la France a mis en œuvre un premier Plan national santé-environnement (PNSE) seulement dix ans après que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini la santé environnementale à la conférence d’Helsinki de 1994. Le PNSE a été relancé en 2009-2013 et en 2015-2019, a rappelé le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) lors d’une conférence de presse sur ces 15 ans de politiques publiques en Santé-Environnement, organisée le 11 janvier au ministère de la santé. L’instance, saisie en mai 2020 par les ministères de la Santé et de la Transition écologique, a évalué les trois plans en se focalisant sur l’air intérieur et extérieur, les risques « émergents » – nanomatériaux, ondes électromagnétiques, téléphonie mobile, numérique et perturbateurs endocriniens – et les produits chimiques dans l’eau, l’alimentation et les produits de consommation. Des progrès insuffisants sur la qualité de l’air
« La pollution de l’air est responsable de 40 000 décès anticipés par an en France », a souligné le Dr Fabien Squinazi, médecin biologiste, président de la commission spécialisée "Risques liés à l’environnement" du HCSP. Dans son rapport publié en mars 2022, le HCSP note « une baisse régulière » depuis 2006 des concentrations en dioxyde de soufre (SO2), dioxyde d’azote (NO2) et particules fines, baisse cependant insuffisante, ce qui a conduit la Cour de justice européenne à engager deux contentieux contre la France. En outre, les concentrations en ozone sont restées « stables ». Les mesures visant à améliorer la qualité de l’air dans les établissements publics affichent là aussi des « résultats mitigés ». Risques émergents : des études nécessaires
Les risques émergents et les expositions multiples aux polluants devraient être mieux pris en compte, grâce au développement de la recherche et au rôle d’alerte des associations et des experts. Dans ce domaine, l’étude « Esteban représente une avancée significative », a salué Francelyne Marano, professeure émérite de biologie cellulaire et toxicologie à l’Université de Paris, membre du Comité de la prévention et de la précaution. Esteban – Étude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition – montre une imprégnation de la « quasi-totalité de la population française, notamment des enfants », aux produits chimiques. Cette meilleure connaissance des risques a conduit à l’interdiction de l’additif E171 (dioxyde de titane) dans les aliments transformés et à la création du dispositif de déclaration des substances nanoparticulaires "R-Nano". En attendant des réglementations plus strictes voire l’interdiction de certaines molécules…
Des risques sanitaires sont également causés par le dérèglement climatique, peu abordé par les PNSE précédents : canicules, particules engendrées des feux de forêt, augmentation de la diffusion de maladies vectorielles (dengue, chikungunya…), développement de l’exposition aux rayons UV et aux pollens allergisants… Pour une stratégie nationale interministérielle
Le HCSP émet seize recommandations regroupées en trois grands axes. Le premier porte sur la mise en place d’une stratégie nationale santé-environnement interministérielle, ayant une « valeur juridique » et un « financement dédié ». « Le PNSE doit être un plan chapeau. Cette démarche est amorcée mais ce n’est pas suffisant », a estimé Francelyne Marano.
Deuxième axe : accroître l’efficacité des actions en donnant une place plus importante aux territoires via un renforcement des modalités de gouvernance et des financements des plans régionaux santé environnement (PRSE) et leur mise en réseau.
Enfin, il s’agira de « développer la culture santé-environnement » à tous les niveaux. « Pour une mise en œuvre des actions, il faut connaître la perception des risques environnementaux par le public et ses comportements », a expliqué Daniel Bley, anthropologue biologiste, directeur de recherches émérite au CNRS. La sensibilisation des populations doit permettre une co-construction des actions.
Les professionnels de santé doivent être mieux formés à cette problématique. « La formation médicale est embryonnaire sur ce sujet. Il faut un cursus diplômant reconnu au niveau national », a poursuivi Daniel Bley. Un pas de plus vers l’approche "One Health", intégrée au PNSE 2021-2025, qui reconnaît les liens étroits entre état des écosystèmes, santé animale et santé humaine.
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