Si près de 7 femmes sur 10 se sentent suffisamment informées des risques que l’alcool ou le tabac fait courir à l’enfant à naître, elles ne sont que 3 sur 10 à déclarer, de manière affirmée, connaître les risques liés à la prise de médicaments… C’est pour répondre à ce manifeste défaut d’informations que l’Agence de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) lance en avril 2021 une campagne à destination des 800 000 femmes (ou plutôt 800 000 couples !) qui, chaque année en France, ont un projet de naissance. Il ne s’agit pas de discréditer ou d’interdire, ni de culpabiliser les femmes, simplement de les encourager à peser les bénéfices et les risques des médicaments, et notamment le temps de la grossesse. La campagne vise aussi à sensibiliser les femmes sur les risques liés à l’interruption sans avis médical d’un traitement pour une pathologie chronique ou à la prise d’un nouveau médicament. L’espoir affiché est de déclencher un réflexe équivalent à celui qui précède la décision de boire ou non de l’alcool, de fumer en une période déterminante pour la bonne santé de l’enfant… Et que ces bons réflexes, d’appréciation des bénéfices et des risques du médicament, qui n’est certes pas un produit de consommation comme un autre, perdurent au-delà de la naissance.
Les médicaments font l’objet d’une analyse continue de leurs effets indésirables, et leur balance bénéfices/risques doit rester positive, y compris et surtout pendant la grossesse. Or 9 femmes enceintes sur 10 ont une prescription d’au moins un médicament. « En tout, 9 médicaments en moyenne sont pris au cours de la grossesse en France, contre 2-3 en Europe du Nord, en Italie ou aux États-Unis… », rapporte Céline Mounier, directrice de la surveillance (ANSM).
Des risques malformatifs mais aussi néonataux et à distance Les risques sont de plusieurs types. Malformatifs quand ils concernent la formation des organes du fœtus (cœur, bec-de-lièvre, etc.), un risque du 1er trimestre, avec des médicaments comme l’isotrétinoïne ou le valproate, alors que la grossesse n’est pas toujours sue… Un médicament, anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) ou sartan par exemple, peut être fœtotoxique. Pris lors des 2è et 3è trimestres, il affecte la croissance et la maturité des organes (reins, poids, etc.). Autre famille de risque...
les effets néonataux. Ils s’observent à la naissance qui marque le moment de la privation de médicaments auxquels l’enfant était exposé in utero (antidépresseurs ou antalgiques), provoquant ici un syndrome de sevrage. Enfin, les effets à distance sont détectés lors des différentes phases du développement (hyperactivité ou autisme) pour des expositions à tous les stades de la grossesse. « Si le risque n’est jamais à 100 % heureusement, des effets délétères peuvent survenir après une seule prise, d’AINS ou d’aspirine par exemple, prévient la spécialiste. Et les conséquences peuvent être dramatiques : interruption involontaire de grossesse, fermeture prématurée du canal artériel et décès in utero, etc. ».
Anticiper des adaptations nécessaires A apprécier différemment, les risques pour les traitements pris en raison de pathologies chroniques que l’on doit interrompre ou modifier pour ne pas mettre en danger la mère ou l’enfant à naître. Une “patiente“ ne peut bien sûr pas décider seule de ces adaptations qui doivent être anticipées. « Par ailleurs, la grande majorité de ces médicaments “chroniques“ ont des effets durables, parfois sur des périodes longues qui se comptent en semaines ou années. Ce qui n’est pas forcément le cas des maladies les plus graves », note-t-elle. Ainsi, un anticoagulant à l‘image de Sintrom (un AVK à l’origine de fausse couche quand il est pris pendant la grossesse) disparaît en quelques jours après l’arrêt du traitement ; on ne voit plus de traces du fengolimod, un médicament de la sclérose en plaques responsables d’anomalies rénales du fœtus, après deux mois d’interruption. Et, à l’extrême, le soriatane, un rétinoïde indiqué pour le psoriasis sévère...
oblige à 3 ans de contraception. Enfin, « certains médicaments ont un pictogramme de mise en garde, contre l’asthme par exemple : il s’agit d’une mesure de précaution voulue par le laboratoire, rappelle Céline Mounier, alors que d’autres n’en ont pas, à l’instar de Lévothyrox, qui pourtant oblige à des ajustements de traitement pendant la grossesse si le statut thyroïdien le justifie ».
« Dernière réserve, vis-à-vis des nausées, lombalgies, troubles du sommeil, etc., “petits“ maux qui émaillent la grossesse, les solutions naturelles sont parfois très, trop efficaces, et non dénuées d’effets indésirables, prévient Chantal Hunda, sage-femme, qu’il s’agisse des souches homéopathiques, des huiles essentielles ou de la phytothérapie ».
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