« La plupart des fumeurs sont dépendants du tabac, principalement de la nicotine, et chez eux les chances de rester abstinent après avoir arrêté seuls ne dépassent pas 5 % à un an », explique le Dr Jean Perriot, pneumologue et spécialiste en sevrage tabagique au sein du dispensaire Émile-Roux de Clermont-Ferrand. Il est donc essentiel que les praticiens accompagnent leurs patients pour les aider à ce sevrage en leur expliquant que « la première semaine peut être difficile avec des envies plus ou moins marquées ou répétées de fumer avec sensation d’irritabilité ». « La motivation du fumeur à arrêter, sa conviction que c’est important pour lui et qu’il a des chances de réussir influencent le taux de succès.» Le praticien appréciera aussi le degré de dépendance du fumeur au tabac, grâce au test de Fagerström, ou plus simplement en prenant en compte deux paramètres évalués dans ce test : le délai pour fumer une première cigarette au réveil, le nombre de cigarettes fumées dans la journée. Un autre élément important à considérer pour apprécier le niveau de dépendance est le « craving », soit le désir impérieux de fumer par moments dans la journée.
« Le praticien mettra en avant les effets positifs de l’arrêt du tabac, de façon adaptée à chaque fumeur, et expliquera qu’à l’inverse d’une croyance répandue le tabac ne réduit pas le stress et n’est pas un antidépresseur mais, qu’au contraire, il augmente comme l’ont mis en évidence certaines études; le niveau d’anxiété et le risque de dépression et même de suicide, lequel diminue après son arrêt », précise le Dr Perriot. Des conseils seront aussi donnés pour limiter la prise de poids grâce à une alimentation moins riche en lipides, en calories et en alcool, et à une activité physique de 30 minutes par jour qui a également l’avantage de diminuer le « craving ». Des aides médicamenteuses La prescription de substituts nicotiniques (patchs, pastilles, gommes) à des doses adaptées au niveau de dépendance, et/ou de varénicline, qui est bien tolérée, est un outil important. On expliquera au patient que « l’utilisation de ces produits multiplie par 3 le taux de réussite à 6 ou 12 mois, qu’elle permet de passer un cap difficile, en réduisant la sensation de manque, laquelle s’atténue en général après la première semaine de sevrage ». Cette aide médicamenteuse pourra être complétée par d’autres stratégies thérapeutiques : hypnose, sophrologie, selon les besoins du patient fumeur car « le sevrage tabagique n’est pas du prêt à porter mais du surmesure », insiste le Dr Perriot. « Le soutien du praticien est indispensable. Associé au traitement médicamenteux, il permet de doubler l’efficacité de ce dernier.» Les fumeurs qui souhaitent arrêter grâce à la cigarette électronique ne doivent pas être découragés. Cependant, « ils devront viser un arrêt total du tabac et non une réduction de la consommation de cigarettes classiques, car il n’existe pas de valeur seuil en dessous de laquelle les risques associés au tabac disparaissent ». « De préférence, ils achèteront dans des magasins sérieux, et non sur internet, des cigarettes électroniques de 2e ou 3e génération, avec des liquides répondant à la norme Afnor avec des teneurs en nicotine répondant à leurs besoins et qui permettent d’obtenir une sensation pharyngée leur convenant.» Les ex-fumeurs seront revus régulièrement, et en cas de reprise du tabac, il faudra en comprendre les circonstances (moment de convivialité...) afin de tirer parti de cette expérience lors d’une seconde tentative de sevrage. Il ne faut pas hésiter souvent à maintenir ou reprendre les doses de substituts nicotiniques ou de varénicline après quelques mois. Individualiser la prise en charge Chez les femmes non ménopausées, qui peuvent souffrir d’irritabilité avant les règles, prendre un peu de poids, le sevrage est souvent un peu plus difficile. « Mais, on y arrive avec un soutien individualisé de type cognitivo-comportemental et les aides médicamenteuses », indique le Dr Perriot. Gros fumeurs, fortement dépendants, les patients avec une BPCO sont souvent peu conscients de leur addiction au tabac, laquelle peut s’associer à d’autres usages de substances psychoactives (alcool, cannabis) et se développer sur un terrain de précarité sociale, d’isolement. Il faudra rechercher chez ces malades la présence de troubles anxiodépressifs, de consommation de substances psychoactives pour assurer leur prise en charge, et prescrire des patchs nicotiniques combinés à des gommes ou pastilles, ou de la varénicline. Très vigilant au cours du 1er mois, le praticien adoptera une attitude empathique en mettant en avant les bénéfices en termes de qualité de vie de l’arrêt total du tabac qui seul peut stopper la dégradation de la fonction respiratoire. Une stratégie du même type sera suivie chez les fumeurs avec une AOMI, qui partagent des similarités avec les patients BPCO (polyaddictions, dépendance au tabac, troubles anxiodépressifs associés).
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