Près d’un an après la fin des groupes de travail lancés dans le cadre du Ségur de la santé à propos des sanctions financières des hôpitaux qui ne respectent pas le temps de travail légal des internes, le ministère a publié un nouveau décret au Journal officiel pour permettre aux directeurs d’ARS de mettre en place des pénalités.
Désormais, les établissements recevant des internes en stage qui sont concernés par la suspension du stage d'un étudiant, une décision de suspension ou de retrait de l'agrément d'un terrain de stage ou une décision mettant fin aux fonctions de chef de service ou de responsable de structure interne, seront susceptibles de devoir payer des indemnités… après toutefois une longue procédure, s’étalant sur plusieurs mois. "Ce décret, qui est vendu par le Gouvernement comme un engagement tenu, va dans le bon sens. Mais ce qu’il y a dedans ne va pas assez loin. Aujourd’hui, c’est minimum 10 mois de procédure pour envisager la possibilité de sanctionner les hôpitaux", détaille Olivia Fraigneau, présidente de l’Intersyndicale nationale des internes (Isni).
En effet, selon le détail de ce décret, lorsque des problèmes concernant un carabin ou la gestion d’un service par son chef sont signalés, le directeur de l’établissement doit en informer le directeur de l’ARS sous 4 mois. Si le directeur de l’ARS constate "la persistance ou l'aggravation de ces manquements au sein du service ou de la structure interne concerné" passé ce délai, il peut alors mettre en demeure le directeur de l'établissement "de lui remettre un rapport précisant les engagements pris et mesures décidées pour remédier à cette situation", sous 4 mois également. Ce délai peut néanmoins être ramené à deux mois "lorsque les circonstances l’exigent", précise le décret.
"Cette mise en demeure vaut ouverture d'une procédure à l'issue de laquelle il pourra [...] décider de prononcer une pénalité financière à l'égard de l'établissement et il l'informe de la possibilité pour celui-ci de se faire assister d'un conseil", est-il encore indiqué. Enfin, à compter de la réception du rapport, le directeur de l’ARS dispose de deux mois pour "apprécier la situation" et prononcer une pénalité financière, si rien ne s’est arrangé.
"Pour nous, le fait que les sanctions soient a posteriori et finalement jamais réellement applicables, c’est fait pour ne pas faire peur aux représentants hospitaliers. Ça n'envoie pas le bon signal", déplore auprès d’Egora Théophile Denise, premier vice-président de l’Intersyndicale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG). "Le délai est passé de 15 mois à 10 mois, c’est une avancée mais ce n’est toujours pas suffisant. Ce décret aurait dû permettre d’aborder la question du temps de travail de manière générale, renchérit Olivia Fraigneau. Là, ça n'empêche pas les hôpitaux de ne pas respecter le temps de travail. Cela dit juste qu’ils paieront s’ils sont en dehors du cadre légal. Nous, on ne veut pas que les hôpitaux fassent des coupes budgétaires pour que les internes travaillent plus. Les hôpitaux doivent mettre en place le décompte pour que les internes arrêtent de se suicider."
Ce sont les directeurs des ARS qui définiront le montant des pénalités, qui feront l’objet d’arrêtés individuels. "Le montant de la pénalité financière qui peut être prononcée en application du présent article tient compte de la gravité des manquements constatés, de leur durée et de leur répétition éventuelle ainsi que du nombre d'étudiants concernés. Il ne peut excéder le montant total des crédits délégués pour le financement des postes d'étudiants de troisième cycle accueillis sur le lieu de stage concerné", détaille le ministère de la Santé.
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