Le Covid-19 est une maladie de médecine générale qui doit être traitée en ville, selon MG France

06/05/2020 Par Louise Claereboudt
Santé publique

Alors que les mesures de confinement mises en place en France à la mi-mars s’apprêtent à être assouplies, le syndicat MG France a souhaité réaffirmer l’importance des généralistes dans ce processus de déconfinement, lors d’une conférence de presse ce mercredi 6 avril.     Placés au second plan au début de l’épidémie de coronavirus au profit de l’hôpital, les médecins généralistes vont constituer dès ce lundi 11 mai la première ligne dans la recherche des cas contacts. Loin d’avoir attendu le discours d’Edouard Philippe pour se préparer et prendre en charge les patients Covid après le déconfinement, ces professionnels de terrain vont toutefois devoir adapter certaines de leurs pratiques pour mener à bien leur mission d’identification. Pour MG France, il faudra transmettre un message clair aux patients. “Il faut construire cette confiance de la population autour d’un consensus partagé sur les méthodes mises en place”, estime Jacques Battistoni, président du syndicat. Ainsi, il sera plus aisé de “circoncire” les foyers qui se révèlent et d’éviter le déclenchement d’une deuxième vague, principale inquiétude de la population à l’heure actuelle. Cela implique la vigilance de tous les acteurs, avant tout des citoyens.

“On aimerait que ce message soit porté par les autorités mais aussi par les personnes susceptibles d’entraîner l’adhésion”, indique Jacques Battistoni, conscient du discrédit actuel porté au discours des politiques “au vu des errements dans la gestion de la crise”. Mais alors quelle sera la place du médecin généraliste dès la semaine prochaine ? “J’ai envie de dire, c’est sa place normale”, confie le président de MG France, indiquant qu’il est nécessaire de s’appuyer sur ce qui existe déjà en matière d’organisation des soins.   Diagnostiquer, isoler, protéger les proches “Le travail qui consiste à recevoir un patient présentant les symptômes du Covid est le même que celui que nous faisons tous les jours dans nos cabinets pour recevoir des patients qui présentent des pathologies quelles qu'elles soient, qu’il s’agisse d’une cystite, d’une lombalgie, ou des premiers symptômes d’un cancer”, précise le médecin généraliste à Ifs, près de Caen. Selon le syndicat, le coronavirus est, en effet, une maladie de médecine générale...

 ce qui implique qu’elle soit traitée par les spécialistes de la médecine générale. Un travail qui n’est pas “considérable” d’après MG France qui s’appuie sur plusieurs études réalisées par Santé publique France. Cette dernière estime à 3.000 le nombre de nouveaux cas par jour, soit 21.000 cas par semaine. “Rapporté aux 55.000 médecins généralistes de France, cela ne représente qu’un cas environ toutes les deux semaines” pour un professionnel de terrain, note Jacques Battistoni pour qui il est toutefois nécessaire d’apporter une “grande rigueur” dans leur prise en charge.

Ainsi, “il n’est pas question de consacrer une demi-journée par jour à recevoir des patients Covid”, estime le président du syndicat. Les médecins devront effectivement se consacrer au retour, dans un circuit normal, des patients qui ne sont pas concernés par une infection au Sars-CoV2, à l’image de ceux atteints de pathologies chroniques qui ont déserté les cabinets. Pour MG France, la prise en charge des patients atteints de Covid-19 repose sur trois piliers : le diagnostic, l’isolement, et la protection de l’entourage. Concernant la RT PCR, le syndicat réclame le droit de demander un second test pour les personnes dont symptômes ressemblent fortement à ceux du Covid et ayant déjà réalisé un premier test qui ce serait révélé négatif. Les recos ministérielles ne prévoient en effet de réaliser une enquête de cas contacts uniquement pour les personnes reconnues positives.   Respect du secret médical Une deuxième consultation, dite d’annonce, qui pourra être cotée 55 euros dès lundi, devra être réalisée pour un patient testé positif. Un peu plus longue qu’une consultation classique, cet acte permettra au généraliste d’organiser le suivi médical du patient. Un isolement dans des conditions sécurisées devra alors être mis en place. Une discussion, qui devra s’établir entre le médecin et...

 le patient dans un climat de confiance, permettra enfin de protéger son entourage. “Qui mieux que le médecin généraliste connaît l’environnement des patients ?” s’interroge le Dr Battistoni. Ces derniers passeront ensuite le relai à l’Assurance maladie. “Ce n’est pas notre rôle que d’être n’importe de je ne sais quelle brigade à titre individuel”, indique Jacques Battistoni. Concernant le signalement d’un sujet diagnostiqué Covid à l’Assurance maladie, via le portail Amelipro, le président de MG France estime que le secret médical sera garanti. Il devra cependant être possible pour les praticiens qui ne souhaitent pas réaliser ce signalement de s’abstenir au nom du secret médical.

  Eduquer au port du masque Selon MG France il sera nécessaire d’obtenir d’ici lundi 11 mai la liste des centres de prélèvement pour orienter les patients suspects. Jean-Louis Bensoussan, secrétaire général du syndicat MG France et médecin généraliste à Castelmaurou, indique par exemple qu’une cartographie des centres a été mise en place en Occitanie avec l’URPS Biologistes. Bien sûr, le respect des mesures barrières est un levier indispensable. Mais, selon MG France, le port du masque est la mesure la plus efficace. Si le président du syndicat constate que les citoyens se mettent de plus en plus au port à en porter, il sera nécessaire selon lui que les généralistes deviennent des acteurs d’éducation thérapeutique en matière de protection collective. “Une des raisons de l'obligation de confinement est la non culture des masques en France”, explique-t-il, déplorant le “chacun pour soi”. Ce dernier note qu’il est prévu de pouvoir délivrer des ordonnances de masques à la pharmacie, mais il s’avère également important que toute personne en soit dotée pour se rendre en cabinet. Pas question toutefois de refuser des personnes qui ne seraient pas équipées...

“Idéalement il faudrait, mais en pratique, c’est très difficile. Je ne me vois pas dire à la personne ‘vous n’avez pas de masques, vous repartez’”, reconnaît Jacques Battistoni qui réclame de fait une dotation pour les patients qui viennent en cabinet. Concernant la protection des soignants, le généraliste déplore des pénuries. “On n’a pas eu la protection adéquat qu’on aurait aimé avoir, c’est certainement un des reproches qu’il faudra faire à la fin de l’épidémie au Gouvernement.”  Dès ce jeudi, les soignants “les plus exposés” pourront retirer 24 masques par semaine. Mais là encore, aucune garantie d’avoir des FFP2 au vu des “tensions d’approvisionnement”, précise la Direction générale de la Santé. Quoi qu’il en soit, “on a tous intérêt à ce que ça réussisse, on n’a pas trop le choix, explique Jacques Battistoni. On a besoin de jouer notre partition dans ce processus, en fait, on est un peu condamnés à réussir.”

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