Il y a dix ans, Catherine*, médecin généraliste et sexologue, a été abusée sexuellement par un confrère. L'agresseur a été démis de ses fonctions de conseiller régional par l'Ordre des médecins, mais l'affaire a été classée sans suite par le procureur de la République. Elle a tenu à témoigner pour Egora.fr à la suite de notre récent article sur le harcèlement sexuel des femmes médecin. Catherine ne l'avait pas vu venir. La praticienne n'avait jamais eu de problèmes avec les hommes qu'elle rencontrait. Jusqu'à ce rendez-vous, il y a dix ans. Ce soir-là, la généraliste-sexologue, qui exercait dans un hôpital de province, avait été invitée au restaurant par un confrère, un généraliste de dix ans son aîné, mandaté par l'Ordre pour discuter d'un litige entre elle et une patiente. Elle le connaissait depuis une dizaine d'années et avait déjà soigné son épouse et son petit-fils. Alors elle avait accepté. Quand vint la fin du repas, le médecin insista pour régler l'addition. "Tu m'offres un café ? Tu habites où ?" demanda-t-il alors à Catherine. L'homme ne lui ayant pas fait d'avances pendant le dîner, Catherine ne vit pas le danger et accepta de lui offrir un café. "Nous discutions sur le canapé puis il s'est rapproché de moi. Il m'a dit qu'il savait que j'avais des problèmes dans ma vie, que lui aussi, il en avait", confie la praticienne qui s'était à l'époque séparée de son compagnon. À ce moment-là, l'homme se mit à la toucher...
puis il se jeta sur elle. "J'ai dit non ! Non ! Non ! raconte-t-elle. J'ai essayé de me débattre, mais il me bloquait." Au bout de quelques minutes, Catherine parvint à le faire partir. En descendant l'escalier de l'appartement, son violeur lui lança : "Ah, bah, à un de ces jours, tu me feras une gâterie !" "Il faisait ça tout le temps" Choquée, Catherine contacte dès le lendemain un de ses amis et lui raconte ce qu'il s'est passé. "Il m'a dit : "Écoute, essaie d'avoir la preuve, sinon tu vas avoir des ennuis", se souvient-elle. Elle prend alors son téléphone, appelle son agresseur et lui laisse un message en lui demandant de s'excuser. "Il l'a fait, et, bien évidemment, j'ai tout enregistré." Cet enregistrement, Catherine décide de le transmettre à l'Ordre des médecins, qui convoque alors la praticienne et son agresseur. "Il a signé un papier dans lequel il reconnaissait avoir abusé de moi." L'homme est démis de ses fonctions de conseiller départemental et régional de l'Ordre. "Je pensais que ça allait me suffire. Je me disais : Allez ! Tu es une grande fille. Mais ça m'a fracassée". Quelques temps plus tard, Catherine apprend que plusieurs déléguées médicales qui travaillaient avec l'agresseur, ainsi que plusieurs de ses patientes, avaient peur de lui. Elle décide donc de porter plainte. La généraliste se rend à la gendarmerie de Paris, mais est finalement convoquée par la gendarmerie de la ville de son agresseur. "Lorsqu'il a été entendu, il a dit que c'était normal, que j'avais écrit des romans érotiques, que j'étais sexologue et que j'avais une belle poitrine, se souvient-elle. Surtout, je me rappelle qu'il a dit qu'il faisait tout le temps comme ça." Son violeur raconte alors aux gendarmes que Catherine est responsable du suicide récent de son fils dépressif. "Il essayait en plus de me faire culpabiliser", assure la praticienne, aujourd'hui à la retraite. Après une longue attente, Catherine apprend que...
la plainte est classée sans suite. Bien que déterminée à ne pas en rester là, elle renonce finalement à poursuivre la procédure, faute de moyens. Depuis, elle n'a plus eu de relation sexuelle. "J'en suis incapable, j'ai peur, dit-elle. C'est presque ce que j'ai subi de pire dans ma vie." "La frousse" Pendant ses études à la faculté de médecine, Catherine raconte qu'elle avait déjà été confrontée au harcèlement sexuel : "On était harcelées tout le temps, dans les congrès, les colloques, etc." Elle décrit "la frousse" qu'elle avait lorsqu'elle arpentait les couloirs de l'hôpital : "On était toujours à deux." La peur de croiser un chirurgien, connu pour avoir déjà harcelé des étudiantes. Mais aussi la pression sur leurs épaules : "Si t'as pas ton stage validé, t'es dans la merde." Elle se souvient également de son bizutage. Elle ne l'a jamais oublié, d'ailleurs. Devant plus de 1 500 étudiants et en plein milieu d'une place, elle avait été forcée à baisser le caleçon d'un ami étudiant handicapé et à lui mettre un préservatif. "Il était aussi tremblant que moi", explique-t-elle. Ils ne se sont plus jamais adressé la parole. Attachés, souillés, humiliés… Enquête ouverte après un bizutage à Toulouse Au lieu de se taire, Catherine n'a pas honte de raconter son histoire. Elle participe d'ailleurs à de nombreux colloques pour parler de la sexualité et des violences sexuelles. "L'acte sexuel n'a rien à voir avec une pénétration sauvage, martèle la retraitée. Il faut le faire comprendre". Elle dénonce également "un milieu médical très macho". Ce qui lui est souvent reproché : "Hier encore, on m'a dit que j'étais trop franche pour parler. Eh bien, moi, je n'ai pas honte. Si vous n'êtes pas contents, allez-vous faire voir." *Le prénom a été modifié
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