Après "l'échec" des négociations conventionnelles, la main tendue du directeur de la Cnam aux généralistes
C'est la première fois depuis le rejet par l'ensemble des syndicats de l'accord conventionnel, fin février, que le directeur de la Cnam se trouvait face à une assemblée de médecins généralistes, débattant aux côtés de trois représentants syndicaux : les Drs Agnès Giannotti, présidente de MG France, Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF et Claude Bronner, président de l'Union généraliste (FMF). Les partenaires sociaux sont revenus sur "l'échec" des négociations, faisant part de leurs regrets mutuels sur ces discussions dont le calendrier était particulièrement serré et l'enveloppe budgétaire contrainte, alors que les constats étaient "partagés".
"Pour nous le dialogue n'est pas rompu, il n'a pas abouti, a insisté Thomas Fatôme. Il n'y a jamais de vainqueur, jamais de vaincu quand il y a un échec des négociations, c'est une occasion manquée pour les patients comme pour les médecins." Il a rappelé que le projet de convention portait 1,5 milliard d'euros de revalorisations, majoritairement fléchées vers la médecine générale et les spécialités cliniques sous-rémunérées, comme la psychiatrie et la pédiatrie. "Quand on recommencera, on sera certainement sur cette même logique, moi je ne me satisfais pas quand je vois l'échelle de rémunération de ce pays de voir la spécialité de MG à son niveau, c'est un engagement fort que je porte. Un MG en moyenne gagne 90 000 euros, un spécialiste 140 000. Je dis que ça n'est pas normal, et que je veux rééquilibrer ça."
"Violence" de la Cnam?
Manifestant le souhait de l'Assurance maladie de "réenclencher" les discussions à l'issue du règlement arbitral, Thomas Fatôme a toutefois déploré une "négociation tendue, difficile". "On a entendu des choses pendant les négociations vis-à-vis de l'Assurance maladie extrêmement désagréables. Je le regrette : on joue dans la même équipe, on veut être partenaires des médecins", a-t-il déclaré, rejetant le terme de "violence" prononcé par un généraliste dans la salle. "Les attentes des médecins sont légitimes", a-t-il reconnu, assurant ne pas "minimiser" leur mobilisation de ces derniers mois. "Quand 30% des médecins s'arrêtent de travailler pendant deux jours, personne ne peut dire qu'il ne se passe rien et surtout pas moi." Mais "de l'autre côté", celui des patients, des parlementaires, du Gouvernement et des partenaires sociaux de l'Unocam, les attentes sont également grandes, a-t-il rappelé.
"C'est un échec collectif, cuisant, dramatique pour beaucoup de MG sur le terrain aujourd'hui, des gens qui sont en souffrance, a commenté Luc Duquesnel. Ça devient insupportable sur nos territoires de se dire, moi qui suis médecin de famille, qu'il y a des patients diabétiques, insuffisants cardiaques qu'on ne peut pas prendre en charge. Je n'ai pas fait médecin généraliste pour ça." Pour le syndicaliste CMSF, la proposition de la Cnam comportait des mesures "positives" (assouplissement de l'aide à l'emploi des assistants médicaux, hiérarchisation des actes, revalorisation du forfait patientèle médecin traitant), mais le contrat d'engagement territorial (CET) était "inacceptable" : "Comment imaginer que dans nos structures, on ait des médecins qui soient à 60 euros pour des consultations de patients de plus de 80 ans en ALD et que d'autres, parce qu'ils ne pouvaient pas cocher le CET (qu'ils soient à temps partiel, jeunes, en cumul emploi-retraite…) soient à 26,5 euros ?" Si la CSMF appelle à une reprise rapide des négociations, elle trace une ligne rouge : "On ne reprendra pas une négo conventionnelle s'il y a un CET, c’est-à-dire quelque chose de pénalisant. Ça n'est pas possible aujourd'hui de sanctionner des MG soit disant parce qu'ils ne travaillent pas assez", a martelé Luc Duquesnel.
"Oui, il y avait des revalorisations pour la médecine générale, a reconnu Agnès Giannotti. Sauf qu'on n'est plus assez nombreux, qu'on est aux limites de ce qu'on peut faire et que comme pour les profs, on nous demande de travailler plus. Chacun, vraiment, on fait notre maximum. On rentre dans une phase où il a va falloir tous qu'on se protège pour pas tous partir. Faut pas nous dire 'faites en encore plus' parce que là on va être encore plus nombreux à partir, c'est cette logique qui n'a pas été comprise."
"Qu'est-ce qui peut nous arriver de pire?"
"Le directeur de la Cnam a une enveloppe, il ne peut pas aller plus loin, elle était absolument contrainte", a concédé Claude Bronner, estimant qu'en lieu et place des 1,5 milliard d'euros mis sur la table, les besoins pour la médecine libérale se chiffraient à environ 5 milliards. "En 2021, la médecine générale, c'est 10,5 milliards d'euros de dépenses. On a dépensé 6,5 milliards pour les tests. Il y a peut être un problème quelque part : nos politiques ne veulent pas comprendre qu'il faut investir sur la médecine générale."
Appelant à un changement de "méthode" pour la reprise des négociations, la présidente de MG France s'est montrée optimiste : "Le règlement arbitral va arriver, on sait que l'enveloppe ne sera pas énorme - qu'est-ce qui peut nous arriver de pire ? On n'est pas à l'abri d'une mauvaise surprise, au moins avec un règlement qui donne une orientation pour la suite." Et de conclure : "On va s'en sortir, ensemble avec l'Assurance maladie. Même si on va continuer à se bagarrer parce qu'on n'est pas d'accord sur les chiffres. Si au moins est d'accord sur les objectifs et que le pouvoir politique nous donne les moyens."
La sélection de la rédaction
Approuvez-vous la nomination du Dr Yannick Neuder à la Santé ?
Michel Rivoal
Non
Disons que j'ai plutôt une réserve. Ce qui me gène n'est pas qu'il soit médecin ou pas et cardiologue ou pas et hospitalier ou p... Lire plus