"On attend les médicaments étiologiques en France pour le premier semestre 2024", a estimé le Dr Julien Dumurgier, neurologue et chercheur au centre de neurologie cognitive de l’hôpital Lariboisière à Paris, lors de la présentation du rapport 2023 de la Fondation vaincre alzheimer sur la recherche médicale, le 14 septembre à l’Académie de médecine. Le lecanemab des laboratoires Eisai et Biogen et le donanemab d’Eli Lilly ont montré un ralentissement du déclin cognitif à 18 mois de 27% et de 35% respectivement chez les patients à un stade débutant de la maladie ou présentant des troubles légers. La première de ces immunothérapies anti-amyloïde a reçu son AMM aux États-Unis en juillet et attend le feu vert de l’Agence européenne du médicament. La seconde est en cours d’examen par les autorités américaines et européennes. En France, quelques 300 000 personnes seraient éligibles à ces traitements. "Ces anticorps ne stoppent pas la maladie mais la ralentissent. Ils nettoient les plaques amyloïdes présentes dans le cerveau de façon assez spectaculaire et normalisent quasiment l’IRM au bout d’un an, avec une amélioration clinique", a décrit le Dr Dumurgier. Des effets secondaires graves mais rares ont été observés : réaction liée à la perfusion, œdèmes cérébraux, hémorragies cérébrales. Autre limite : ces thérapies interviennent au stade débutant de la pathologie, nécessitant un développement du diagnostic précoce. Des avancées sont déjà enregistrées dans le domaine, avec l’amélioration de l’imagerie cérébrale (IRM plus précise, détection des lésions cérébrales par TEP-scan) et la découverte de biomarqueurs décelables par prélèvement sanguin, oculométrie, tests génétiques ou encore tests sur smartphone. 141 molécules à l’étude en 2023 Du fait de la complexité et de l’hétérogénéité de la maladie, "il faudra vraisemblablement recourir à différentes molécules et approches thérapeutiques telles que la thérapie génique, des méthodes moléculaires ou biologiques, l’immunothérapie, la vaccination et même la greffe de cellules souches (…) et combiner les approches symptomatiques et les approches thérapeutiques", décrit le rapport. Au niveau mondial, 141 molécules sont en cours d’essai clinique. Parmi elles, 111 sont des "disease modifiers", visant à ralentir ou arrêter la progression de la pathologie voire à restaurer des fonctions cognitives. Les pistes explorées sont la protéinopathie (34%), la dérégulation de la neuro-inflammation (23%), la neuroprotection (18%), le métabolisme des cellules (12%), la neurotransmission, le système vasculaire, la génétique ou encore le microbiote intestinal. Trente traitements symptomatiques sont en phase II ou III, la moitié dans les troubles cognitifs, l’autre dans les troubles neuropsychiatriques, principalement l’agitation, devant les symptômes comportementaux ou psychotiques et la dépression. La prévention par le mode de vie La prise en charge doit être globale. Des interventions non médicamenteuses peuvent être mises en place : stimulation cognitive, orthophonie, musicothérapie, activité physique adaptée… "Elles n’ont pas démontré de résultats significatifs à grande échelle. Néanmoins, cette prise en charge permet principalement de retarder la perte d’autonomie", selon la fondation. L’adoption d’une bonne hygiène de vie peut agir en prévention primaire et secondaire : stimulation mentale, maintien des liens sociaux, activité physique régulière, alimentation équilibrée, correction des troubles de la vue et de l’ouïe, suivi des risques cardiovasculaires (hypertension artérielle, diabète, tabagisme, obésité). En effet, si le principal facteur de risque est le vieillissement, des facteurs environnementaux et socio-économiques entrent également en jeu, alors que seuls 1% des cas seraient d’origine génétique. "Un facteur protecteur est la réserve cognitive, constituée avant l’âge de vingt ans. Ainsi, l’incidence de la maladie a moins progressé qu’annoncé il y a vingt ou trente ans grâce à l’amélioration du niveau éducatif de la population générale, notamment des femmes, et grâce à une meilleure prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaires", a souligné le Dr Dumurgier. "La maladie d’Alzheimer n’est pas une fatalité !" Elle touche aujourd’hui près d’un million de personnes en France, soit 8% des plus de 65 ans, et représente la première cause de perte d’autonomie des sujets âgés.
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