Le scandale des actes de maltraitance dans certains Ehpad est à nouveau d’actualité alors que nous dénombrons, dans notre pays, 7 600 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Les plaintes de résidents, ou de leur famille, ne sont pas exceptionnelles et peuvent mettre en cause, non seulement la direction administrative de ces établissements, mais également le personnel soignant auquel il peut être reproché une mauvaise prise en charge de ces résidents ou des négligences graves pouvant porter atteinte à leur dignité. Les tribunaux administratifs et judiciaires sont régulièrement saisis de ces difficultés, comme l’attestent plusieurs décisions récentes. A la question de savoir si un Ehpad peut être tenu pour responsable en cas de suicide de l’un de ses résidents, il convient de rappeler qu’un Ehpad a une obligation de surveillance et de sécurité à l’égard de ses pensionnaires même si cette obligation est une obligation plus de moyens que de résultat. Un Ehpad ne peut garantir une surveillance continue ni un dispositif de sécurité particulier contre des actes a priori imprévisibles. Il pourrait en être autrement si l’établissement avait clairement connaissance d’idées suicidaires exprimées par tel ou tel pensionnaire, qui pourraient justifier des mesures adaptées, des soins appropriés ou une prise en charge pertinente. Une surveillance particulière et renforcée, voire le transfert de ce pensionnaire vers un établissement spécialisé, devront alors être envisagés en cas de risques avérés. La responsabilité du médecin coordinateur de l’établissement ou celle du médecin traitant du résident pourrait alors être recherchée. Insuffisance professionnelle : quand l'absence de pratique rend dangereux l'exercice de la médecine générale Dans un arrêt du 8 juin 2021, la Cour d’appel de Dijon a prononcé la co-responsabilité d’un Ehpad et d’un médecin dans la prise en charge d’un patient décédé des suites d’une chute. La Cour de Dijon a ainsi reproché, d’une part, au personnel de l’établissement de ne pas avoir demandé au médecin de se déplacer mais d’avoir uniquement requis une aide téléphonique et, d’autre part, au médecin de ne pas avoir sollicité l’hospitalisation du patient compte tenu des éléments dont il disposait. Le personnel salarié des Ehpad peut aussi être mis en cause et licencié pour faute grave. Dans un arrêt du 31 mars 2021, la Cour de Cassation a validé le licenciement pour faute grave d’une aide-soignante, en raison de plusieurs actes de maltraitance de sa part à l’encontre de plusieurs résidents d’un Ehpad. Un licenciement justifié en raison de l’atteinte « à la dignité de personnes fragiles, dépendantes ou peu à même de se défendre ». Des sanctions civiles, pénales voire disciplinaires peuvent ainsi être prononcées à l’encontre de ces professions médicales ou paramédicales en cas de manquements à leurs obligations ou encore en cas de non-assistance à personne en danger.
Nicolas LOUBRY, Juriste
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